Intervention de Jean-Pierre Godefroy

Réunion du 7 avril 2011 à 21h30
Bioéthique — Articles additionnels après l'article 22 quater

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

M. Retailleau m’a fait remarquer tout à l’heure que j’avais une certaine constance. J’ai constaté qu’il faisait lui-même preuve de constance, toutefois en sens inverse, ce qui est logique.

Très sincèrement, je crois que c’est en légalisant la gestation pour autrui dans notre pays que l’on évitera la marchandisation du corps de la femme. On pourrait estimer que nous avons déjà fait le nécessaire. Mais comment ne pas prendre en compte ce qui se passe dans les autres pays ?

Je ne sais pas si les chiffres annoncés sont exacts, mais en Californie, la gestation pour autrui se monnaierait à hauteur de 100 000 euros et en Ukraine, pays qui pratique le dumping, à hauteur de 30 000 euros. De surcroît, les conditions ne sont certainement pas les mêmes d’un pays à l’autre. Sauf à faire preuve d’un égoïsme incroyable, nous ne pouvons pas nous désintéresser de cette marchandisation des femmes en dehors de nos frontières.

Quant aux problèmes liés à la grossesse – un enfant né avec des malformations, par exemple –, les femmes qui se rendent à l’étranger pour trouver une mère porteuse sont d’ores et déjà confrontées à ces risques, qui ne sont pas traités comme ils pourraient l’être en France, loin s’en faut.

Nous ne pouvons pas non plus laisser perdurer la situation des enfants dont l’acte de naissance n’est pas transcrit en France.

La Cour de cassation a rappelé que la mère est la personne qui accouche. Cette interprétation d’un adage romain n’est pas tout à fait juste ; la bonne traduction est plutôt que la mère est toujours certaine, même si ce n’est plus vraiment le cas aujourd’hui.

Je ferai un rapprochement entre le cas des enfants morts nés que nous avons examiné hier et la gestation pour autrui. À chaque fois, la Cour de cassation nous renvoie à nous-mêmes, autrement dit au législateur. Elle ne fait que dire ce que nous faisons, à savoir la loi. Si nous estimons que la loi actuelle est injuste, nous devons la modifier. Ne nous abritons pas derrière la Cour de cassation, derrière les juges. Assumons notre responsabilité !

Monsieur Cointat, vous n’arrêterez pas la pratique de la gestation pour autrui. Elle continuera, et dans des circonstances de plus en plus dramatiques. Comme Bernard Cazeau, je pense inutile de dresser un mur artificiel, lequel, comme tous les murs, tombera un jour, mais au prix de quels sacrifices, de quelles douleurs ? Il nous appartient de faire cesser ces souffrances et de légiférer.

La proposition défendue aujourd’hui est un point de départ. Mme la secrétaire d’État a demandé un scrutin public, précaution que j’ai bien comprise. Nous connaissons donc par avance le sort qui sera réservé aux amendements que nous examinons. Mais nous ne pourrons pas laisser perdurer la situation et nous serons bien obligés de réexaminer la question.

Aujourd’hui, le débat, dont l'Assemblée nationale ne s’était pas saisie, est ouvert. Il serait bon qu’une discussion s’engage devant l’opinion publique en deuxième lecture, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale. Peu importe le résultat, mais nous aurons mené un vrai débat. Si, aujourd’hui, on s’arrête là, on aura mis une chape de plomb sur un problème de société.

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