Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce texte vise à promouvoir dans leur ensemble nos commerces, nos artisans et nos très petites entreprises, qui sont au cœur du dynamisme de notre tissu économique. C’est là que se crée aujourd’hui l’emploi, et nous pouvons tous être fiers et satisfaits que ce projet de loi soit débattu au Parlement.
Ne disposant que de six minutes, je consacrerai exclusivement mon propos aux évolutions apportées au régime de l’auto-entrepreneur.
En tant que membre de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, j’ai récemment évalué, avec ma collègue Muguette Dini, les dispositions législatives encadrant l’auto-entreprise depuis bientôt six ans.
Depuis sa création, à l’été 2008, ce régime, il faut le reconnaître, a connu un succès considérable. Certes, les difficultés économiques n’y ont sûrement pas pour rien, le nombre de chômeurs ayant malheureusement augmenté de plus de 50 % depuis 2008. Néanmoins, ce n’est pas la seule explication : je suis convaincu que la volonté d’entreprendre est partagée par un nombre croissant de nos concitoyens. Or, monsieur le ministre, il ne peut pas y avoir de redressement productif sans cette volonté d’entreprendre, que nous devons encourager et soutenir.
Aujourd’hui, près d’un million d’auto-entrepreneurs sont enregistrés, mais ce chiffre est à relativiser, puisque seule la moitié d’entre eux ont déclaré un chiffre d’affaires l’an passé. Cependant, cela fait tout de même 500 000 auto-entrepreneurs actifs que nous devons aider et accompagner.
Dans le rapport d’information que Muguette Dini et moi-même avons remis au président Assouline au mois de juin dernier, nous avons noté que ce régime avait déjà fait l’objet de nombreuses modifications, rendues nécessaires par une mise en place, à l’époque, précipitée.
Si ce statut a immédiatement fait la preuve de son intérêt pour un grand nombre de Français, il méritait des améliorations. Ainsi, une dizaine de modifications législatives ont été apportées par le Parlement en à peine six ans, ce qui est sûrement un record. Néanmoins, il reste un point de fixation sur la question de la concurrence déloyale autour duquel s’affrontent, d’un côté, les auto-entrepreneurs et, de l’autre, les artisans.
Aussi, après avoir procédé à plusieurs auditions, nous avons formulé dans notre rapport d’information plusieurs préconisations visant à préserver l’attractivité de ce système, tout en proposant des corrections, afin de réduire les différents écueils : des problèmes pratiques de gestion ou de sécurité juridique, mais, surtout, la question de la concurrence déloyale entre les auto-entrepreneurs et les artisans.
Par la suite, nos collègues de l’Assemblée nationale, et tout particulièrement le député Laurent Grandguillaume, que je tiens à saluer, ont également exploré les pistes susceptibles de favoriser le développement pérenne des entreprises individuelles, notamment des auto-entreprises. L’excellent rapport qu’il a rédigé sur le sujet a d’ailleurs inspiré les travaux de l’Assemblée nationale. Au demeurant, la grande majorité des recommandations contenues dans ce rapport rejoignaient celles que Muguette Dini et moi-même avions retenues.
Toutes ces propositions ont rassuré les auto-entrepreneurs, alors que les premières pistes explorées par le Gouvernement lors de l’élaboration de ce projet de loi avaient pu susciter, force est de le reconnaître, quelques inquiétudes. Ce fut notamment le cas de l’introduction éventuelle, par décret, de nouveaux seuils de chiffres d’affaires, ce qui pouvait contraindre certains auto-entrepreneurs à sortir de ce régime.
Aussi, je me félicite de ce que le Gouvernement a su, sur ce point comme sur d’autres d’ailleurs, se montrer à l’écoute tant de la représentation nationale que des acteurs économiques.
Si, dans une minorité de cas, des problèmes récurrents de concurrence déloyale vis-à-vis des artisans peuvent se poser, notamment dans le bâtiment, il n’aurait pas été judicieux de risquer de déstabiliser l’ensemble des auto-entreprises par l’adoption d’une telle mesure.
En choisissant d’introduire l’immatriculation obligatoire des auto-entreprises auprès de la chambre des métiers et de l’artisanat, il me semble que vous avez su trouver un point d’équilibre de nature à concilier les attentes des artisans et celles des auto-entrepreneurs. Les diverses modifications proposées au vote de la Haute Assemblée vont donc permettre de garantir la pérennité du système, tout en préservant les atouts qui en font son attractivité.
Le travail des députés et des sénateurs, tout comme l’écoute du Gouvernement, aura été essentiel pour mener à bien cette entreprise. Dans le cadre de la discussion des articles, je soumettrai à votre examen deux amendements supplémentaires, identiques à ceux qui ont été déposés par Mme Dini – cela n’étonnera personne, car nous partageons l’ensemble des analyses et des diverses recommandations qui figurent dans le rapport d’information que nous avons co-rédigé –, tendant à donner une base juridique à la dénomination d’« auto-entrepreneur » et à favoriser l’accompagnement vers le régime de droit commun.
Je me félicite que le Gouvernement et la représentation nationale, dans une remarquable démonstration de coproduction législative, aient su faire évoluer un système au-delà des clivages politiques.
Il faut le reconnaître, à l’usage, le régime de l’auto-entrepreneur s’est révélé bon !