Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, comme j’ai eu l’occasion de le dire au cours de nos précédents débats, la nécessité d’un Contrôleur général des lieux de privation de liberté n’est plus à démontrer.
Le franchissement d’un nouveau seuil, au 1er avril 2014, avec 68 859 personnes écrouées pour 57 680 places en établissement pénitentiaire, vient renforcer cette certitude. L’existence d’une autorité indépendante chargée de veiller au respect des droits fondamentaux des personnes privées de liberté et dotée des prérogatives nécessaires pour exercer pleinement sa mission est plus que jamais indispensable.
Le groupe écologiste a voté ce texte avec conviction en première lecture, et nous ferons de même aujourd’hui.
Je veux saluer ici le travail des rapporteurs du Sénat et de l’Assemblée nationale, qui ont largement contribué à enrichir la proposition de loi qui nous est soumise.
Ainsi, si le Sénat avait ouvert au Contrôleur général la possibilité de prendre connaissance des procès-verbaux de garde à vue, la commission des lois de l’Assemblée nationale est allée plus loin en élargissant cette disposition à l’ensemble des procès-verbaux relatifs au déroulement d’une mesure privative de liberté. Cela permettra notamment d’inclure les procès-verbaux de déroulement de la retenue pour vérification du droit au séjour d’une personne de nationalité étrangère.
Nous nous réjouissons également que, sur l’initiative des députés écologistes, la possibilité pour les députés européens élus en France de saisir le Contrôleur général ait été introduite dans la proposition de loi ; Mme la rapporteur a mentionné cette disposition. Je salue à cet égard mon collègue et ami du groupe écologiste de l’Assemblée nationale, Sergio Coronado. Il s’agit sans aucun doute, à quelques jours des élections européennes, d’une avancée importante.
Le travail accompli depuis six ans par le Contrôleur général et ses équipes est immense, et ce sont, en moyenne, 151 lieux de privation de liberté qui ont été visités chaque année.
Mais il me semble que, si l’hommage unanime est amplement mérité et que nous ne pouvons que nous réjouir de l’adoption prochaine de la proposition de loi qui nous réunit aujourd’hui, la défense des droits fondamentaux des personnes privées de liberté doit rester notre priorité.
Les derniers rapports du Contrôleur général sont édifiants, et il relève de notre responsabilité de législateurs de nous en saisir pour faire avancer le droit et les droits dans notre pays.
Ainsi, le 23 avril dernier, le Contrôleur général publiait-il en urgence des recommandations sur le quartier des mineurs de la maison d’arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone. À la suite de signalements de violences entre mineurs, deux contrôleurs se sont rendus sur place en février dernier. Ils ont pu alors constater la gravité des violences qui se déroulent au quartier des mineurs.
Ce même 23 avril, le Contrôleur général publiait un avis relatif à l’encellulement individuel dans les établissements pénitentiaires. Ici encore, le constat est grave. L’encellulement individuel, réservé, sauf dérogation, aux prévenus en détention provisoire et aux condamnés, la nuit seulement, n’est pas mis œuvre dans les maisons d’arrêt en raison de la surpopulation.
Énumérant les « palliatifs » imaginés par le législateur pour repousser l’application de ce principe jusqu’à novembre 2014, le Contrôleur général propose de commencer par « rétablir l’encellulement individuel au bénéfice de certaines catégories de détenus », notamment les personnes handicapées, les personnes âgées de plus de 65 ans, les détenus souffrant d’affections mentales ou les étrangers ne comprenant pas le français.
Dans le même sens, Jean-Marie Delarue encourage à « redonner un sens plus restreint à l’usage du quartier d’isolement », qui, écrit-il en substance, ne doit être utilisé que pour des personnes dangereuses, et non pour des détenus menacés.
Je m’arrêterai ici, nul ne pouvant prétendre à l’exhaustivité en matière de mesures à mettre en œuvre pour défendre les droits fondamentaux des personnes privées de liberté...
Madame la ministre, mes chers collègues, les sénateurs du groupe écologiste voteront ce texte avec enthousiasme et conviction, mais seront attentifs, notamment lors de l’examen du projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines, à ce que l’ensemble de ces recommandations ne tombent pas dans l’oubli. §