Intervention de Christophe Béchu

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 21 mai 2014 : 1ère réunion
Délai de prescription de l'action publique des agressions sexuelles — Examen du rapport de la commission

Photo de Christophe BéchuChristophe Béchu :

Je crois que la comparaison avec l'abus de biens sociaux est malvenue et qu'elle affaiblit la démonstration : il y a bien un caractère clandestin, mais quel délit n'a pas ce caractère, quel auteur tiendrait-il à faire de la publicité sur le délit qu'il commet ?

Cependant, je ne veux pas laisser dire que ce texte serait une mauvaise chose pour les victimes : il leur donnerait la faculté de se plaindre, pas une obligation, ce n'est pas à nous de dire ce qu'il en adviendra. Même chose pour l'idée qu'il faudrait protéger l'ordre rétabli après des décennies d'impunité : n'est-ce pas plutôt un droit pour une victime qui resterait traumatisée que de vouloir rétablir un certain ordre, reconstruire sa vie, après avoir engagé une procédure si elle l'estime nécessaire ? Enfin, l'argument de l'âge des condamnés n'est certainement pas recevable : avec le vieillissement de la population, c'est probablement l'ensemble des prisonniers qui seront plus âgés en prison, ce n'est pas une raison pour les en exempter ; c'est au programme immobilier pénitentiaire de s'adapter, plutôt qu'à la loi pénale.

En revanche, je crois que le dépôt de plainte pour violences sexuelles constitue un véritable sujet : elles sont les seules violences où la victime peut être perçue et peut se percevoir comme responsable, au moins partiellement, de l'agression subie, où la victime peut être considérée comme coupable. Chacun sait qu'un certain climat se répand, fait d'insultes et de comportements agressifs envers les femmes au motif qu'elles s'habilleraient de manière provocatrice, et que ce climat entretient une réticence, voire des refus de déposer plainte. Cette singularité des violences sexuelles pourrait, elle, justifier un dispositif adapté.

Je me rallie à la proposition d'examiner l'ensemble des délais de prescription en matière pénale, il faut de la cohérence. Et contre les violences sexuelles, je préfèrerais une imprescriptibilité plutôt qu'un allongement du délai de prescription : le message politique serait plus fort.

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