Intervention de Jean-Paul Virapoullé

Réunion du 4 mai 2011 à 21h30
Lutte contre l'habitat indigne dans les départements et régions d'outre-mer — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean-Paul VirapoulléJean-Paul Virapoullé :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la Haute Assemblée doit bien comprendre ce soir que la politique du logement social en métropole a très peu de points communs avec celle qui est conduite outre-mer. En comparant des choses qui ne sont pas comparables, vous faites un contresens politique évident, mes chers collègues !

Comment est financé le logement social, ici, en métropole ? D’abord, il est essentiellement en location. Ensuite, son titulaire peut bénéficier de l'Aide personnalisée au logement, l’APL. En outre-mer, contrairement à ce qu’on a pu dire, ce dispositif n’existe pas ! Ici, l’aide principale est l’aide à la personne, l’aide à la pierre étant accessoire. Là-bas, c’est l’aide à la pierre qui est l’aide principale. Les Ultramarins ne bénéficient que de l’allocation logement.

Vouloir établir un parallèle, comme l’a fait notre collègue Thierry Repentin, entre la construction de logement social outre-mer et la construction de logement social en métropole n’a aucun sens.

En effet, depuis 1976, tous les gouvernements, qu’ils soient de droite ou de gauche, ont continué à programmer le financement du logement social outre-mer à partir de l’aide à la pierre de la ligne budgétaire unique.

Pour quels produits ? Je rappelle que c’est la loi votée ici qui a défini les produits issus de la LBU en matière de logement social ! Parce que nous avons eu pendant de nombreuses années un foncier disponible et pour répondre à la demande de la quasi-totalité de la population – ne l’oubliez jamais ! – d’avoir une petite maison en accession à la propriété, notamment pour les plus pauvres, la loi a créé le logement évolutif social, qui n’existe pas en métropole.

Ce dispositif n’a pas été mis en place par quelques maires qui l’auraient financé sans autorisation. C’est vous qui, à notre demande relayant celle de la population, l’avez autorisé et encouragé.

En ne nous versant pas l’APL, qui aurait représenté un apport supplémentaire de plusieurs centaines de millions d’euros pour le financement du logement social outre-mer, vous n’avez pas vu, mes chers collègues, qu’il y avait là une injustice à notre égard. Cela arrangeait bien tous les gouvernements de nous priver de ces financements !

Ce soir, je vous exhorte d’ôter enfin vos œillères et de regarder la réalité telle que nous l’avons créée tous ensemble dans cette assemblée. On ne peut la nier : jusque dans les années quatre-vingt-dix, un logement social outre-mer était essentiellement un logement en accession à la propriété, le locatif étant très peu répandu.

Ensuite, avec l’augmentation de la population, la raréfaction du foncier aménagé, nous avons dû construire les logements verticaux, les fameux logements locatifs sociaux, les LLS, qui datent de moins de quinze ans.

En fait, il est dommage qu’au moment du vote de la loi SRU, que j’approuve à l’évidence, les parlementaires des départements d'outre-mer n’aient pas attiré l’attention sur le fait que l’outre-mer avait deux types de logements sociaux.

On a donc concentré les efforts sur les logements locatifs sociaux et l’on a considéré ceux qui occupaient les logements en accession à la propriété comme des privilégiés, à tort. Il s’agissait en réalité des plus pauvres auxquels on avait offert un outil d’intégration, de cohésion sociale.

Savez-vous que, dans ces lotissements regroupant parfois les populations les plus pauvres, la délinquance n’existe pas ? La plupart des enfants qui y habitent, qui ont vu leur maison évoluer, progressent eux aussi socialement. C’est la plus belle réussite sociale en matière de logement de l’outre-mer.

Si nous avions eu suffisamment de terrains en outre-mer, nous n’y aurions construit que des logements évolutifs sociaux. Aujourd’hui encore, ils font partie des promesses électorales de nombre de candidats. Certains veulent même créer des villes dans les Hauts.

Vous avez tous évoqué la situation difficile des communes. Je demande simplement que celles qui mettent la main à la poche pour financer la réalisation de logements sociaux, et dont les budgets sont extrêmement serrés, ne soient pas sanctionnées parce que le législateur, à un moment donné, n’a pas regardé la réalité telle qu’elle est.

Il n’est pire injustice que de traiter de la même manière des régions dont les situations sont tout à fait différentes. Sanctionner les communes qui ont eu le courage de mettre en œuvre cette politique qui répond le plus au souhait des populations les plus pauvres, ce n’est faire œuvre ni d’équité ni de justice sociale, c’est commettre une erreur et une grave injustice.

C’est pour toutes ces raisons que je présente à nouveau un amendement, et non pour ouvrir une quelconque boîte de Pandore ou pour trouver un moyen d’échapper à l’article 55 de la loi SRU. D’ailleurs, pour ma part, je suis favorable au passage de 20 % à 25 % de la part de logements sociaux, également réclamé par les socialistes de la Réunion.

Vous savez, chers collègues du parti socialiste, je n’ai pas inventé cet amendement ! À l’occasion du Forum des idées pour l’outre-mer organisé par le parti socialiste en vue de l’élection présidentielle, qui a eu lieu le 27 avril dernier, le premier secrétaire fédéral du parti socialiste de la Réunion, M. Annette, ainsi que les députés Jean-Claude Fruteau et Patrick Lebreton sont venus à Paris pour demander que cette augmentation de 20 % à 25 % soit inscrite dans le programme présidentiel socialiste pour la période 2012-2017, et que les logements évolutifs sociaux soient pris en compte, car c’est une simple mesure de justice.

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