La menace, c’est l’Iran, ajoute in petto le Président de la République.
Alors là, monsieur le ministre, je ne comprends plus ! En effet, si les dirigeants politiques et religieux de l’Iran, qui sont certes virulents, mais pas complètement irrationnels, en venaient à oser frapper l’un ou l’autre des pays dotés de l’arme nucléaire, cela signerait tout simplement l’acte de décès de la dissuasion nucléaire. À vrai dire, le simple fait que l’on se pose la question est déjà en soi problématique.
Je ne dis pas que l’Iran, dont les dépenses militaires, inférieures à 10 milliards d’euros, sont toutefois cent fois moins élevées que celles des pays de l’OTAN, ne pose pas de problèmes de sécurité au monde, mais je pense que c’est du côté du terrorisme, de la biopiraterie que se situe la menace iranienne, et pas du côté du nucléaire. La dissuasion nucléaire permettra-t-elle d’y répondre ? Bien sûr que non !
On ne sait plus vraiment quelle menace la dissuasion nucléaire vise à conjurer dans un monde multipolaire complexe.
Un monde sans armes nucléaires, ce n’est pas pour demain, me répondrez-vous. Évidemment ! Mais je retiens des conclusions du sommet de Lisbonne, que j’ai épluchées, que les pays de l’OTAN pourraient être les derniers à y renoncer.
Tant qu’un pays tiers disposera de quelques ogives, on pourrait effectivement être tenté de maintenir notre armement à un niveau opérationnel. Alors même que le Président de la République reconnaît finalement à demi-mot, puisqu’il éprouve le besoin de doter la France du bouclier antimissile, que les efforts consentis en matière de dissuasion ne permettent pas d’assurer de façon certaine et définitive la protection du territoire et de la population, nous sommes donc contraints d’inscrire une fois de plus dans le budget des sommes considérables à cette fin.
Si les finances publiques étaient florissantes, si nous n’avions que des problèmes de riches, nous pourrions nous accommoder de la juxtaposition de programmes coûteux, aux objectifs fumeux, et consacrer notre énergie à des débats moraux sur la question de l’acceptabilité du nucléaire.
Monsieur le ministre, le moment n’est-il pas venu de faire des choix ? Nous pourrions consacrer 3, 4 milliards d’euros par an à l’équipement des troupes, à leur formation, à leur maintien en condition opérationnelle, à leur entraînement, à leur acheminement en toute sécurité sur les théâtres d’opérations, à la satisfaction des engagements qui ont été pris envers nos soldats.
Vous avez posé des actes forts par le passé et vous êtes prononcé nettement, par exemple, en faveur d’un processus de désarmement nucléaire. Vous êtes un esprit libre, vous avez été Premier ministre, ministre des affaires étrangères, vous n’avez plus rien à prouver. Faites en sorte que prévale l’idée selon laquelle notre sécurité commune repose davantage sur nos efforts pour préserver la paix, pour accompagner le développement, pour conserver la confiance des pays qui doutent de notre détermination en la matière, que sur le montant des crédits que nous affecterons à une politique dépassée, qui n’a pas fait plus la preuve de son efficacité que la ligne Maginot en son temps.