Intervention de Jean-Claude Merceron

Réunion du 3 juin 2014 à 14h30
Réseau d'infrastructures de recharge de véhicules électriques — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jean-Claude MerceronJean-Claude Merceron :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le développement du véhicule électrique, tout le monde l’a rappelé depuis le début de l’examen de cette proposition de loi, doit être une priorité en termes à la fois de développement durable et de développement économique. Il s’agit d’un enjeu finalement devenu consensuel, y compris dans l’opinion publique ; nous nous en félicitons.

L’objet de cette proposition de loi est non pas de définir de nouveaux objectifs pour le véhicule électrique, mais simplement de mettre en œuvre des mesures d’accompagnement pour un meilleur déploiement en France.

Lors du débat sur le climat et l’énergie en Europe qui s’est déroulé le 21 mai dernier dans cet hémicycle, ma collègue Chantal Jouanno a rappelé un certain nombre de convictions auxquelles le groupe UDI-UC est attaché. J’en évoquerai deux : la première est que la politique énergétique doit être une nouvelle ambition pour l’Europe ; la seconde est que l’échelle d’action la plus pertinente, après l’Europe, est non pas l’État, mais la région et les territoires. C’est à partir de ces deux axes que je développerai mon propos.

Tout d’abord, il est essentiel que l’Europe se dote d’une véritable politique énergétique, avec comme priorités le développement des sources d’énergie propres et la maîtrise de la consommation.

Le véhicule électrique s’inscrit parfaitement dans ces objectifs, et son essor est fondamental.

Sur le plan environnemental, le réchauffement climatique doit conduire les pouvoirs publics à favoriser des modes de transport permettant de diminuer la pollution de l’air et les émissions de gaz à effet de serre. Il s’agit donc de trouver des solutions alternatives aux modes de transport citadins alimentés par des énergies fossiles.

Sur le plan industriel, l’avenir de la filière automobile française dépend largement de notre capacité à innover et à accompagner nos constructeurs vers la production massive de véhicules décarbonés. Derrière l’émergence de cette filière se joue aussi une course au leadership technologique mondial avec, à la clé, demain, de nombreux emplois.

La France dispose de la taille suffisante, de toute la base industrielle nécessaire et d’un savoir-faire en matière énergétique et d’aménagement urbain qui lui ouvre le chemin, à condition de saisir l’occasion à temps et sans esprit partisan.

Je tiens à déplorer, à cet instant, la mise en liquidation judiciaire de l’entreprise Mia Electric, le 12 mars dernier. Cette situation particulière prouve que le secteur est encore fragile et qu’il requiert toute l’attention des pouvoirs publics, ce qui ne signifie pas l’attribution d’aides financières à tout prix, mais bien d’accompagnement en matière de recherche et développement et l’amélioration de l’environnement économique et fiscal.

En matière de développement des véhicules propres, nous ne partons pas de rien. Dès les premières tables rondes du Grenelle de l’environnement, l’ensemble des acteurs s’étaient accordés sur l’objectif de lancer une filière automobile décarbonée, avec une véritable dynamique industrielle.

Le plan français « véhicules décarbonés », lancé par Jean-Louis Borloo en 2008, visait à accompagner les ruptures technologiques indispensables pour que l’industrie automobile française se tourne vers la production de véhicules propres, en créant un écosystème complet, s’ajoutant au dispositif du bonus-malus.

En 2009, le pacte automobile s’est traduit par l’émergence d’une offre industrielle pour la batterie et la chaîne de traction électrique, par la mise en place d’une démarche coordonnée d’achats de véhicules électriques entre l’État et les grands comptes publics et privés, puis par de nouvelles actions concernant les infrastructures de recharge.

Dans ce domaine, le rôle moteur joué par l’ADEME doit être salué. Deux appels à manifestation d’intérêt ont été lancés depuis 2011 dans le cadre du programme « véhicule du futur » des investissements d’avenir, doté de 50 millions d’euros, afin de soutenir les projets d’infrastructures de recharge de véhicules électriques menés par les collectivités territoriales. J’y reviendrai plus loin, lorsque j’évoquerai mon expérience en Vendée.

Le troisième appel à manifestation d’intérêt, décalé au 31 janvier 2015, devrait enfin permettre à de nombreux territoires d’être couverts, ce qui portera le nombre d’infrastructures de recharge à 14 000 à l’horizon 2016.

En dépit de ces incitations fortes en direction des collectivités territoriales, notre pays souffre aujourd’hui de l’insuffisance de son réseau national de bornes de recharge, qui constitue un frein majeur au développement de la voiture électrique.

Ainsi, cette proposition de loi vise à accompagner la politique de déploiement des infrastructures de recharge sur le territoire.

Le second axe sur lequel je souhaitais insister, pour répondre à la question de la bonne échelle d’action en matière de développement de la politique énergétique, a trait aux territoires.

Je suis convaincu que l’innovation en matière de transition énergétique viendra des territoires, de nos régions et de nos départements, qui sont capables de prendre l’initiative et d’accompagner les bons programmes. Il faut faire confiance à l’intelligence territoriale !

C’est peut-être sur ce sujet que la proposition de loi qui nous est soumise pose le plus question à mes yeux. En effet, elle organise une dérogation en matière d’occupation de l’espace public au bénéfice de l’État ou d’un opérateur, pour des projets d’infrastructures de recharge de véhicules électriques d’ampleur nationale.

Or certaines collectivités ont été innovantes sur ce sujet, et ont mené des projets intéressants, à la taille de leur territoire. J’ai donc deux mises en garde à formuler : que les nouveaux projets bénéficiant de cette dérogation ne viennent pas concurrencer les projets existants et que l’on puisse continuer à soutenir les projets locaux qui se mettent déjà en place ! Il faudra veiller, une fois de plus, à ne pas trop recentraliser la prise de décision, qui pourrait sinon aller à l’encontre des volontés locales. Il faudra également veiller à ce que cette « recentralisation » ne vienne pas ralentir des initiatives locales, certaines collectivités pouvant se saisir de la présente proposition de loi comme d’un prétexte pour arrêter leurs projets en cours, en comptant sur l’État pour agir à leur place.

Je souhaiterais naturellement citer l’exemple que je connais le mieux, celui de la Vendée, et le projet soutenu par le Syndicat départemental d’énergie et d’équipement de la Vendée, le SIDEV, organisme que j’ai l’honneur de présider.

Ce syndicat est compétent pour la mise en place des infrastructures de charge, et il s’est engagé dans leur déploiement sur le domaine public vendéen.

Le SIDEV consacre un budget de 750 000 euros à la mise en place d’un réseau départemental de bornes de recharge tenant compte des flux de circulation et des distances de déplacement entre domicile et lieu de travail compatibles avec l’autonomie des véhicules électriques.

Après avoir consulté l’ensemble des communes vendéennes, le SIDEV a publié, en juin 2013, un schéma départemental de déploiement d’infrastructures de recharge de véhicules électriques, avec l’aide de Renault, qui a apporté, dans le cadre d’une convention de partenariat, son expertise en matière de véhicules électriques et de bornes de recharge.

Ce schéma d’implantation de 350 bornes sur 191 communes a été proposé à l’ensemble des maires vendéens. Le déploiement des bornes de recharge s’effectuera en trois phases, de 2014 à 2016. Une borne publique pour 1 800 habitants, en moyenne, sera donc implantée dans toutes les communes de plus de 900 habitants. Pour l’utilisateur, une charge accélérée d’une durée d’une heure coûtera 3 euros et assurera une autonomie de 120 à 150 kilomètres. Une charge normale, d’une durée d’une heure, coûtera 1 euro, pour une autonomie de 25 kilomètres environ.

La première borne de recharge a été inaugurée lundi 26 mai. J’en suis fier, car c’est un projet local qui me tenait à cœur ; c’est aussi un projet innovant, au service de tout un département.

Pour conclure, même si je me réjouis que ce texte soit d’initiative parlementaire, je regrette qu’il ne s’inscrive pas dans le cadre plus large de la future loi sur la transition énergétique, que nous attendons toujours et qui permettrait d’aborder cette thématique dans son ensemble, et non pas seulement par le biais d’une mesure technique. Néanmoins, le groupe UDI-UC votera en faveur de l’adoption de la présente proposition de loi, car il en partage les objectifs. §

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