Justement ! Elle est d'autant plus insidieuse qu'elle est mutante. Ce que vous exprimez dans votre question rejoint les préoccupations du Gouvernement et les échanges avec mes homologues européens. Les acteurs en face de nous sont dans la dissimulation. J'ai été très frappé de voir sur des sites internet qui expliquent comment se dissimuler de ses parents pour basculer sans laisser l'inquiétude poindre au sein de la famille. Parmi les familles que j'ai reçues, le témoignage d'une mère qui a perdu ses deux enfants en Syrie m'a terrifié et glacé. Elle m'a expliqué qu'elle avait vu apparaître les signes de la radicalisation de ses fils, s'en était inquiété auprès d'eux qui l'avaient rassuré ; les signes avaient alors disparu avant qu'ils ne partent au moment où elle s'apaisait. Elle a découvert que les sites qui avaient convaincu ses fils de partir comportaient des conseils de dissimulation pour rassurer ses proches.
Lorsque les personnes qui sont parties reviennent après avoir connu des atrocités que je ne détaillerai pas, elles ne sont pas indemnes. Le traumatisme psychologique est tel qu'il rend tout possible.
À cet égard, le concept de « loup solitaire » n'a pas de sens car si l'individu agit seul, l'endoctrinement n'est pas un acte solitaire. Ces individus sont sur notre territoire. Sans faire peur, il faut dire la vérité sur ce phénomène et s'armer pour y faire face. Désormais, le risque est d'une autre nature : il ne provient plus de personnes qui viennent d'ailleurs pour perpétrer sur notre sol des attentats puis repartir. Ceci implique de nouvelles organisations, d'autres formes de coopération européenne. Il faut avoir conscience de la nature du risque pour le combattre, sans remettre en cause les libertés publiques qui ne sont pas négociables.