Intervention de Anne-Marie Escoffier

Réunion du 17 juin 2014 à 21h30
Exposition aux ondes électromagnétiques — Suite de la discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Anne-Marie EscoffierAnne-Marie Escoffier :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur de la commission des affaires économiques, monsieur le président de la commission du développement durable, mes chers collègues, j’ai été, comme nombre d’entre vous ici, concernée par le problème de l’exposition aux ondes électromagnétiques : j’ai rencontré certains concitoyens d’une commune de mon canton qui souffrent réellement de la proximité d’un pylône porteur de plusieurs antennes de téléphonie mobile.

Je connais, comme chacun d’entre vous, des personnes dont l’hypersensibilité aux ondes magnétiques constitue – le mot a été utilisé – une véritable souffrance.

Loin de moi, donc, l’idée de récuser d’entrée de jeu cette proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale après un long débat. Je reconnais qu’il y a des difficultés : elles ont été exprimées sur l’ensemble des travées et je veux dire que je les ai écoutées avec la plus grande attention.

Toutefois, si je salue le formidable travail du rapporteur Daniel Raoul, qui s’est attaché à reconstruire le texte en le simplifiant et en ne retenant que les seuls éléments devant concourir à faciliter « sobriété », « transparence » et « concertation en matière d’exposition aux ondes magnétiques », si je veux saluer la raison qui a cherché à rationaliser un débat en le débarrassant de ce qui relève du domaine du sensible, en tout état de cause et en dépit de ce travail de réécriture, je voudrais m’en tenir à l’esprit des conclusions de « mon » président de la commission du développement durable et relever les trois points principaux qui m’empêcheront de voter ce texte.

Il s’agit tout d’abord des conséquences indues d’un texte exclusivement à charge, qui méconnaît de façon partiale les analyses et conclusions de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail : tout prouve, au regard de ces analyses, que « l’exposition aux ondes magnétiques n’est pas de nature à provoquer des risques avérés, dès lors que sont respectées les limites réglementaires ».

Ces limites réglementaires nécessitent que des contrôles soient effectués et vérifiés. J’ai l’expérience, toujours dans mon canton, de mesures opérées par des organismes non habilités, voire des personnalités, certes honorablement connues, qui présentent à dessein des résultats alarmistes !

Dès lors, la mesure que vous avez introduite consistant à faire de l’Agence nationale des fréquences l’organisme assurant la mise à disposition du public des résultats de mesure des valeurs limites des champs électromagnétiques me paraît être, monsieur le président de la commission des affaires économiques, une sage disposition.

Ma deuxième opposition tient à la conséquence qui ne manquera pas de naître du fait de l’instauration d’une information préalable du maire. Cette dernière s’apparentera assurément très vite à une mise en responsabilité contraire au droit actuel.

Je voudrais, là aussi, signaler les déviations déjà existantes. Qui d’entre nous n’a pas observé, dans des temps rapprochés, la mise en cause directe des maires, tenus pour responsables de l’implantation d’une antenne relais, alors que la responsabilité de la décision échoit au préfet, c’est-à-dire au représentant de l’État ?

Il me paraîtrait de bonne administration, madame la secrétaire d'État, plutôt que de vouloir renforcer le rôle du maire, de rappeler le rôle premier des services de l’État, seuls compétents – j’y insiste – pour donner l’autorisation d’implantation de ces antennes relais sur la base du dossier technique réglementairement requis. Je peux vous assurer que ce rappel de la réglementation serait loin d’être inutile.

J’en viens au troisième point du texte auquel je ne puis apporter ma voix. Il s’agit des dispositions concernant les écoles maternelles, qui se verraient interdire l’installation d’un équipement terminal Wi-Fi dans les lieux d’accueil, de repos et d’activités des enfants.

Permettez-moi d’ignorer ici les difficultés auxquelles seraient confrontés les professeurs des écoles pour assumer leur mission d’éveil des enfants de trois ans des classes maternelles. Je ne veux pas méconnaître, en revanche, les réalités du quotidien. Dites-moi, mes chers collègues, combien y a-t-il aujourd’hui de parents qui n’utilisent pas, y compris devant leurs jeunes enfants, l’ensemble des systèmes informatiques et des appareils que nous avons déjà évoqués, dont le fameux micro-ondes ?

Au total, après avoir écouté vos interventions, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, je crois que cette proposition de loi a manqué sa cible. S’il s’agissait de répondre à un enjeu de couverture de territoire, à un enjeu de compétitivité et d’innovation ou à un enjeu sanitaire et social, le texte aurait dû être tout autre.

Ici, les mots choisis le disent de façon claire et nette, la proposition de loi soulève l’inquiétude, alors que, vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d’État, il faut restaurer un climat de confiance.

Il faut en effet restaurer un climat de confiance pour faire face au développement du numérique, qui est incontournable et indispensable pour notre économie, partout sur notre territoire, mais peut-être un peu plus encore dans les zones des nouvelles ruralités.

Il faut restaurer un climat de confiance envers le progrès, celui que la curiosité et l’innovation mettront en mouvement, au bénéfice de nos populations.

Un tel climat de confiance aurait permis d’éviter ces menaces et ces insultes proférées par ceux qui ne voient dans une attitude responsable que de prétendues interventions de lobbies de toute sorte. Malheureusement, madame la secrétaire d’État, il n’en est rien. Je le répète : à vouloir mélanger tous les objectifs, le texte n’en a atteint aucun.

Vous ne serez donc pas étonnés que les membres du groupe RDSE n’apportent pas leurs voix à cette proposition de loi. §

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