Intervention de Thani Mohamed Soilihi

Réunion du 25 juin 2014 à 14h45
Renforcement de l'efficacité des sanctions pénales — Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, au 1er juin 2014, on comptait, dans notre pays, 68 645 personnes incarcérées. En treize ans, la population carcérale a augmenté de 44 %. De deux choses l’une : ou bien la délinquance a explosé dans des proportions étonnantes, ou bien la justice emprisonne davantage.

Si l’on procède de bonne foi à un examen de la situation, on observe que, à l’évidence, la justice est plus sévère : la moyenne des peines fermes d’emprisonnement est passée de 8, 7 à 11, 3 mois entre 2007 et 2011 ; de plus, 30 % des peines prononcées sont des peines de prison ferme, contre 5, 5 % en Allemagne, par exemple.

La politique pénale menée pendant dix ans par l’ancienne majorité, fondée sur l’enfermement, a entraîné de façon quasiment automatique une surpopulation carcérale. Or, comme Pierre-Victor Tournier, directeur de recherches au CNRS, le soulignait devant la commission des lois lors de son audition, « nous n’avons pas besoin d’évaluation pour le savoir, […] la surpopulation [carcérale], ne permettant pas ce minimum en démocratie qu’on appelle la dignité, favorise la récidive ».

Aujourd’hui, en France, le taux d’occupation carcérale moyen est de 119, 38 % par rapport au nombre de places disponibles. Sur 247 sites d’emprisonnement, tous types confondus, 10 ont une densité supérieure à 200 % et 32 une densité comprise entre 150 % et 200 %.

Outre-mer, la situation est pire encore : au 1er juillet 2012, le taux atteignait 223 % à la maison d’arrêt de Majicavo, à Mayotte, 234 % au quartier maison d’arrêt de Nouméa, en Nouvelle-Calédonie, et 306 % au quartier maison d’arrêt de Faa’a-Nuutania, en Polynésie française.

Ces taux d’occupation illustrent avec force la gravité de la situation propre aux collectivités et départements ultramarins, situation que vous avez, madame la garde des sceaux, prise en compte, en installant un groupe de travail spécifique sur ce sujet, lequel devrait rendre son rapport au mois de juillet prochain.

De nombreuses études ont également démontré que la vie en prison, où l’on peut côtoyer des criminels aguerris, fabrique de la récidive. Il s’agit même souvent d’une véritable école du crime. Une phrase prononcée par un prisonnier, et largement reprise par les médias, illustre très justement cette situation : « Vous entrez en prison avec un CAP de voleur, vous sortez avec un mastère de criminologie. »

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion