Voici le deuxième projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale depuis que les lois de financement de la sécurité sociale existent - l'exercice est exceptionnel. Vous connaissez la philosophie qui préside à celui-ci : il est la transposition législative du pacte de responsabilité et de solidarité annoncé par le Président de la République en décembre 2013, et confirmé par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale. Sa lecture et sa compréhension sont indissociables du projet de loi de finances rectificative, les deux textes s'inscrivant dans une logique commune.
Ce projet court (16 articles) constitue la stricte déclinaison des engagements du Gouvernement dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité. Son principe directeur est de favoriser la reprise de la croissance, en donnant la priorité à l'emploi et en soutenant les investissements, afin de rendre notre pays attractif et compétitif, grâce à une politique résolue de soutien aux entreprises. Tel est le sens des allègements de cotisations sociales pour les employeurs, les salariés et les travailleurs indépendants, et de la baisse de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) prévus par le texte.
Seules les mesures qui auront un impact sur l'année 2015 figurent dans le projet de loi. Le pacte de responsabilité s'inscrivant sur trois ans, les effets des mesures votées seront évalués par paliers.
Les mesures d'allègement en faveur des entreprises entraîneront des pertes de recettes pour la sécurité sociale. Celles-ci seront compensées dans leur intégralité. Nous définirons, dans la loi de finances pour 2015, les mécanismes qui garantiront cet équilibre. Nous n'avons pu le faire dans des lois rectificatives, car la loi organique relative aux lois de finances interdit d'y inscrire des dispositions qui n'auront d'effet qu'en 2015.
L'équilibre du régime social des indépendants, touché par la suppression progressive de la C3S, sera assuré de façon pérenne. En effet, les branches maladie et vieillesse de base du RSI, qui reçoivent la C3S, seront adossées financièrement aux branches maladie et vieillesse du régime général. Ce dispositif de solidarité financière est celui qui prévaut depuis cinquante ans pour le régime des salariés agricoles. C'est aussi celui à l'oeuvre, depuis 2009, pour le régime maladie des exploitants agricoles. Ces précédents sont l'assurance que le financement pérenne du régime est garanti, et que ni sa gestion autonome, ni le niveau des cotisations et des prestations ne seront remis en cause.
Dans le même temps, le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale accélère nos efforts d'économies. Le Gouvernement a annoncé un plan d'économies de 50 milliards d'euros sur trois ans. Le texte en tire les conséquences pour 2015. La révision de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) 2014 en fonction de la sous-exécution de celui de 2013 ne remet pas en cause le taux de progression de 2,4 % voté en loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Le texte propose également de ne pas revaloriser, pendant un an, les retraites et l'allocation de logement familiale.
Conformément aux engagements du Premier ministre, les petites retraites ne seront pas touchées : la retraite de base des personnes dont le total des pensions mensuelles ne dépasse pas 1 200 euros sera bien revalorisée. Cela concerne la moitié des retraités. L'absence de revalorisation des retraites complémentaires a été décidée par les partenaires sociaux, il y a plus d'un an. Le Gouvernement qui n'a de compétence que sur les retraites de base, n'a pas à interférer sur ce point.
Je ne sous-estime pas l'effort que cette mesure représente pour les retraités concernés, y compris dans un contexte de faible inflation, et même si nous parlons d'une cinquantaine d'euros sur l'année. Cependant, le Gouvernement a pris des mesures fortes en faveur du pouvoir d'achat des retraités, qu'il s'agisse de la double revalorisation du minimum vieillesse, de la revalorisation de 50 euros de l'aide à la complémentaire santé pour les plus de 60 ans, ou encore du plan de revalorisation des petites retraites agricoles résultant de la réforme des retraites.
Le Gouvernement a également revalorisé de 25 % l'allocation de rentrée scolaire. Il a augmenté le complément familial pour les familles modestes et majoré de 25 % l'allocation de soutien familial. Il a garanti une augmentation du revenu de solidarité active (RSA) de 2 % par an pendant cinq ans, en plus de la revalorisation annuelle. Le projet de loi de finances rectificative et le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale contiennent deux mesures fortes en faveur du pouvoir d'achat des salariés : l'exonération des cotisations salariales pour les salaires jusqu'à 1,3 Smic, et une réduction d'impôt pour de nombreux ménages. Ces deux mesures amélioreront sensiblement le niveau de vie de nombreux ménages actifs et à revenus modestes. Un salarié pourra ainsi gagner 500 euros par an, et un couple dont les revenus n'excèdent pas 1,3 Smic gagnera deux fois 500 euros, car la mesure n'est pas fiscale mais individuelle. Ces mesures très fortes s'ajoutent dans la fonction publique aux gains de pouvoir d'achat induits par la revalorisation de 40 euros des salaires nets pour les agents de catégorie C, qui ont déjà reçu 21 euros cette année et recevront 18 euros l'an prochain, pour un gain total de pouvoir d'achat d'environ 80 euros par mois.
Le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale poursuit le rétablissement de l'équilibre de la sécurité sociale, engagé depuis deux ans. D'ores et déjà, les efforts portent leurs fruits. Le déficit du régime général et du fonds de solidarité vieillesse a atteint en 2013 son plus bas niveau depuis le début de la crise, soit 15,4 milliards d'euros. Il était de 23,8 milliards d'euros en 2011 et il approchera les 13 milliards en 2014. Au total, entre 2011 et 2013, le déficit du régime général a diminué de près de 30 %. Il a fallu une volonté politique. En 2010, alors que la croissance atteignait 1,6 %, le déficit avait progressé de 4,5 milliards d'euros pour atteindre 28 milliards. En 2013, avec une croissance de 0,1 %, nous l'avons réduit de plus de 2 milliards.
Voilà le résultat des réformes structurelles que nous avons engagées. Le redressement de nos comptes n'a pas remis en cause la qualité et le niveau de la protection sociale des Français, car des droits nouveaux ont été introduits (conditions de départ en retraite anticipé et mise en place d'un droit de pénibilité, applicable en janvier 2015 ; renforcement du droit à l'IVG et meilleure couverture de la contraception).
Ce texte est limité en ce qu'il décline les mesures du pacte de responsabilité et de solidarité. Il n'en reste pas moins une étape importante pour donner de l'ampleur à la politique structurelle que nous avons engagée en faveur de notre modèle social.