Intervention de Michel Delebarre

Réunion du 3 juillet 2014 à 15h00
Délimitation des régions et élections régionales et départementales — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi

Photo de Michel DelebarreMichel Delebarre, rapporteur :

La future création de la métropole de Lyon nous démontre que, en s’appuyant sur un consensus local, le « sur mesure » institutionnel est une voie à explorer. Lors de nos débats en commission spéciale, plusieurs de nos collègues l’ont affirmé : une solution qui satisfait une région de France n’est pas forcément pertinente pour une autre région.

La Haute Assemblée est fidèle à sa vocation en étant la caisse de résonance de débats qui parcourent nos régions. J’en veux pour preuve les plus de trente contributions que j’ai reçues en retour du courrier que j’avais adressé aux présidents de conseils généraux et régionaux. J’ai transmis ces documents à l’ensemble des membres de la commission spéciale, conformément au souhait de M. Mézard. §Je vais m’attacher à vous en restituer, à grands traits, quelques orientations.

Les réponses se montrent majoritairement favorables à une forme de « big-bang territorial ». Les élus régionaux et départementaux estiment qu’une modernisation de nos structures territoriales est aujourd’hui nécessaire. Toutefois, ils m’ont fait part de leurs inquiétudes, qui s’articulent, en particulier, autour de deux points principaux.

Le premier concerne la place du département dans la carte territoriale de demain. Beaucoup estiment que la puissance d’une région est non seulement liée à sa superficie, mais aussi aux compétences exercées et aux moyens budgétaires et financiers dont elle dispose pour les assumer. Si des régions plus grandes sont toutefois acceptées, c’est à la condition que le département, en tant qu’échelon de proximité et intermédiaire, soit préservé dans les territoires ruraux. Le département – dans les réponses que j’ai reçues – conserve toute sa légitimité dans une France où les régions verraient leur nombre réduit et leur périmètre élargi.

Sur ce premier point, je tiens également à préciser que les propositions de découpages régionaux se révèlent convergentes, qu’il s’agisse du regroupement du Poitou-Charentes et du Limousin avec l’Aquitaine ; du maintien du Languedoc-Roussillon et de Midi-Pyrénées dans leurs limites territoriales actuelles ; ou encore de la réunion de l’Auvergne avec Rhône-Alpes. En revanche, plusieurs propositions alternatives m’ont été adressées pour chacune des régions Picardie, Champagne-Ardenne et Lorraine, ainsi que pour les régions Centre et Pays de la Loire.

Le deuxième point qui émerge des réponses reçues concerne la répartition des conseillers régionaux par section départementale. Je tiens à signaler les nombreuses inquiétudes qui se sont fait jour quant à la représentation équitable des territoires ruraux au sein de conseils régionaux plus importants.

Les départements ruraux ainsi que les régions réclament un nombre minimal de conseillers régionaux pour leur permettre de défendre les intérêts de leur territoire au sein d’ensembles régionaux plus vastes.

Les régions ne sont pas seulement des circonscriptions administratives. Les structures territoriales existantes ont permis à notre pays d’entrer dans la modernité. Elles se sont construites au fil des décennies, même si leurs contours actuels sont récents au regard de l’histoire, d’une longue histoire que je me suis attaché à rappeler dans le rapport que j’ai déposé au nom de la commission spéciale.

À l’aube du XXIe siècle, nous devons franchir une nouvelle étape et prendre des décisions qui vont préparer la France de demain. Notre monde a changé, nous en sommes tous conscients. Mais si le monde a changé, nous devons changer nous aussi, pour moderniser nos structures afin de les conserver et de les rendre plus fortes. C’est le projet du Gouvernement.

Comme je l’ai relevé en commission, recueillant un large assentiment de la part de mes collègues, cette réforme ne peut pas uniquement se justifier par d’éventuelles économies financières à long terme, pour l’heure difficilement perceptibles. Non, le véritable but, c’est de bâtir des régions de taille européenne. La comparaison avec des collectivités semblables au sein d’autres États européens alimentera nos débats, que ce soit pour la récuser, la nuancer ou l’approuver.

On peut s’accorder sur le constat que les régions françaises sont en moyenne moins denses que leurs voisines européennes et, surtout, que leur poids économique est plus faible. La comparaison avec l’Allemagne est particulièrement éclairante : le PIB régional moyen en valeur absolue est deux fois plus important de l’autre côté du Rhin ! Des divergences se dessinent sans doute concernant les conséquences à en tirer : nouvelle délimitation, transfert de compétences, pouvoir réglementaire autonome ? Le débat est totalement ouvert !

Il m’a été donné de présider, pendant deux ans, le comité des régions, à Bruxelles. J’ai ainsi pu côtoyer des représentants des collectivités territoriales de tous les pays de l’Union européenne, et j’ai le souvenir des discussions menées avec les présidents de la Catalogne ou de la Rhénanie du Nord-Westphalie. Ces régions comptent plus de 10 millions d’habitants. En leur sein, les véritables questions sont : quels sont les enjeux de développement territorial, quelles sont les préoccupations en matière de développement économique, quelle est l’image de la région à l’échelle internationale ? Telle était la teneur du débat ! À l’avenir, il faut que, en France aussi, les présidents de conseil régional se focalisent sur ces enjeux, car ce sont ceux qui contribueront à la croissance de notre pays.

Le diagnostic a été établi. La commission spéciale s’est attachée à en dégager des grands principes pour la réforme territoriale.

Tout d’abord, sur l’initiative de nos collègues du groupe UDI-UC, elle a adopté, au titre d’un article additionnel, les principes qui doivent guider le législateur dans cette réforme : la recherche d’une meilleure efficience publique ; la lutte contre l’érosion de la démocratie locale ; le respect de la diversité des territoires ; la redéfinition de la sphère d’intervention de l’État et la réforme de la fiscalité locale pour accroître l’autonomie fiscale des collectivités territoriales.

Ensuite, s’agissant des limites régionales, la commission spéciale a adopté plusieurs amendements visant à redessiner la carte régionale.

Les modifications par rapport au projet initial sont les suivantes : comme je l’ai déjà indiqué, le Poitou-Charentes et le Limousin pourraient être rattachés à l’Aquitaine, et ce sur l’initiative de MM. Didier Guillaume et Philippe Adnot.

Les Pays de la Loire seraient rapprochés de la région Centre…

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