Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je pourrais partager beaucoup de ce qui a été dit depuis deux jours.
C’est le premier point que je souhaiterais aborder : de grâce, ayons confiance en la Haute Assemblée, en nos propres débats ! Quels que puissent être les projets des gouvernements, et pas seulement du gouvernement actuel, le rôle du Parlement est de discuter, de délibérer, d’améliorer les textes législatifs et de voter en conviction.
J’aimerais lancer un appel. Il nous faut croire à la force de la discussion parlementaire, à la force du Sénat, à la force de conviction des sénateurs. Nous évoquons un grand et beau sujet, celui des territoires. Nous devons avoir à l’esprit deux exigences : clarté et cohérence.
Mettons un terme aux faux débats, notamment sur la forme ou la procédure. Tout le monde a eu recours à des motions prévues par notre règlement. Je ne parlerai pas de « blocage » ou de « retardement », car cette pratique fait partie du jeu. Il serait même possible de déposer encore deux ou trois autres motions. Néanmoins, débattons du fond !
Il faut parler en sincérité. Je crois que chacun l’a fait. Chacun a sa part de vérité. Les différents intervenants, y compris ceux dont je ne partageais pas les analyses, se sont exprimés avec conviction. Acceptons de présumer que chacun parle de la même façon.
Toutes les positions sont respectables, mais tous les excès sont condamnables ; j’essaierai de bien m’en garder. Les positions des groupes ou des partis ont certainement évolué.
Il y a ici de nouveaux convertis, dont votre serviteur. La réforme envisagée par le Gouvernement ne correspond pas forcément à ce que moi ou mon organisation avions pu prôner par le passé. De même, nos collègues de l’UMP défendent aujourd'hui des thèses qui n’étaient pas celles de leur parti voilà quelques semaines encore. C’est vrai pour la fusion des départements et des régions, pour la création des grandes régions ou pour la suppression des conseils généraux, une mesure qui figurait noir sur blanc dans le programme présidentiel rédigé par mon excellent ami le député de Drôme Hervé Mariton. Tout cela, c’est le débat politique.
Aujourd'hui, le Gouvernement nous demande de clarifier et de moderniser l’administration territoriale. Nous avons le choix entre deux attitudes : ne rien faire, parce que nous serions contre le Gouvernement, quitte à opter pour l’immobilisme et à prendre le risque que rien ne sorte des travaux du Sénat, ou bien avancer et essayer d’aller – j’ose le dire – dans le sens de l’histoire.
Le sens de l’histoire, c’est celui de cette belle décentralisation. Sur ce point aussi, les positions des uns et des autres ont évolué. Il y a trente ans, certains combattaient la décentralisation. Aujourd'hui, ils lui trouvent toutes les vertus : le rapprochement du pouvoir au plus près du terrain, la proximité entre les citoyens et les lieux de décision territoriale !
La décentralisation a été conçue sur le diptyque commune-département. Oui, en 1982, nos beaux départements ont eu des compétences fortes grâce à la décentralisation Mitterrand-Mauroy-Defferre ! Puis, les intercommunalités et les régions sont apparues. Et la vie a changé. On est passé des établissements publics régionaux à de véritables conseils régionaux, d’abord gérés par la droite, puis aujourd'hui par la gauche. Les régions réalisent de grands aménagements, engagent des politiques fortes.
Ensuite, il y a eu la régionalisation des services de l’État, qui m’a posé plus de problèmes, car cela éloignait l’action de l’État des citoyens et des élus locaux.
Pour notre part, nous sommes prêts à aider la réforme, à soutenir la décentralisation, à accompagner l’évolution territoriale. Cependant, nous nous opposerons à la recentralisation : il n’est pas question de redonner des pouvoirs aux préfets en en enlevant aux élus locaux !