Intervention de Caroline Cayeux

Réunion du 3 juillet 2014 à 21h45
Délimitation des régions et élections régionales et départementales — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi

Photo de Caroline CayeuxCaroline Cayeux :

Alors, évidemment, la maison n’est pas solide et il sera difficile d’y vivre !

Les oppositions, de tous bords, de toutes catégories sociales, de tous horizons, qui se multiplient partout dans le pays, et la façon dont sont organisés les débats parlementaires, dans la précipitation et l’amateurisme, démontrent de manière encore plus criante le caractère improvisé de cette réforme.

Cette carte des territoires, rédigée à la va-vite, n’est qu’un patchwork territorial, loin de l’ambition légitime que nous pouvions nourrir pour nos territoires et pour notre pays, bien loin de ce qu’il aurait été possible de faire si le Gouvernement, monsieur le ministre, avait pris le temps du dialogue, de la concertation et d’un débat parlementaire détendu.

Les élus locaux, dont nous faisons tous partie et dont vous avez fait partie, monsieur le ministre, ainsi que l’ensemble des Françaises et des Français sont conscients de la nécessité de réformer notre pays. Ils sont conscients aussi qu’il faut faire des économies et que cela supposera parfois des sacrifices. Toutefois, ils vous demandent du respect et de l’écoute. Je suis d’ailleurs convaincue qu’une réforme bien plus ambitieuse que la vôtre aurait été possible si le temps de la nécessaire concertation avait été pris.

Pourquoi avoir écarté par dogmatisme le conseiller territorial ? En effet, il avait l’avantage de donner à des élus une double vision, départementale et régionale, donc d’associer ces deux dimensions de manière complémentaire et cohérente, alors que, avec ce projet de loi, ce que vous proposez finalement de substituer au millefeuille territorial, ce sont 999 feuilles ! §

Pour quelle réforme et pour quelles économies ?

Car, vous le savez, les économies ne seront guère au rendez-vous du jour au lendemain ; elles viendront au mieux dans dix ans. J’ose même prédire, à la suite de plusieurs collègues, que, avant d’être source d’économies, ces grandes régions coûteront cher.

Dans ce texte, on ne trouve aucune cohérence territoriale, aucune étude d’impact digne de ce nom, aucune trace de concertation, aucune vision de l’aménagement du territoire.

On veut faire fusionner des régions qui n’expriment aucune envie de se regrouper, des élus qui n’ont ni le désir ni l’habitude de travailler ensemble et des habitants qui ne se retrouvent pas dans une nouvelle communauté de destin.

Pis, demain, nos conseils régionaux seront des assemblées réunissant des élus n’ayant aucune vision commune, et qui devront défendre des problématiques tellement opposées qu’ils ne pourront obtenir aucun résultat.

Je prendrai l’exemple de ma région, la Picardie, et, en contrepoint, celle de M. René-Paul Savary, Champagne-Ardenne, avec laquelle on nous impose un mariage d’office, un mariage arrangé et arbitraire. C’est un contresens territorial, économique, social et humain.

En vérité, tout comme vous, cher collègue René-Paul Savary, nous ne voulons pas de ce mariage forcé.

Comment nos deux régions pourraient-elles avoir un destin commun ? Nous, nous n’avons jamais regardé vers l’est, alors qu’avec l’ouest – la Haute-Normandie et la Basse-Normandie – ou le nord – je pense au Nord-Pas-de-Calais –, nous partageons une façade maritime, des voies de circulation ou encore des objectifs économiques.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État – je salue votre arrivée dans l’hémicycle, monsieur le secrétaire d'État à la réforme territoriale –, quitte à réformer, faisons-le d’une manière plus rationnelle. Ne nous obligez pas à des unions forcées avec des régions vers lesquelles nous ne sommes guère tournés et avec lesquelles il nous sera difficile d’engager des partenariats.

Je me demande encore qui a eu cette brillante idée ! Comment en sommes-nous arrivés là ? J’ai finalement l’impression qu’après avoir fait droit aux demandes de vos amis, que ce soit pour réclamer ou pour refuser telle ou telle alliance entre régions, vous avez songé que l’heure tournait et qu’il en restait deux dont vous ne saviez pas très bien quoi faire. Vous vous êtes alors dit : « Il n’y a qu’à les mettre ensemble ! »

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