Or les anciens combattants méritent mieux, soyez-en convaincu. Néanmoins, nous comptons sur votre implication personnelle. Pouvez-vous nous rassurer à cet égard ?
Le budget des anciens combattants doit traduire un droit imprescriptible à réparation et un devoir de mémoire. Il doit permettre d’exprimer notre solidarité envers celles et ceux qui se sont battus pour défendre nos libertés.
Or le budget qui nous est transmis par l’Assemblée nationale est sans doute historiquement le plus mauvais que nous ayons connu. Tous les amendements visant à augmenter les crédits des anciens combattants, adoptés contre l’avis du Gouvernement, ont été annulés par les députés de la majorité.
Votre prédécesseur, monsieur le ministre d’État, s’est justifié en expliquant que, face à la crise, les anciens combattants devaient participer à l’effort collectif. Si personne ne peut nier la crise – et je ne la nie pas –, celle-ci ne doit pas servir à justifier des choix budgétaires contestables et contestés par l’ensemble des associations d’anciens combattants. Bien sûr, il est nécessaire de consentir des efforts, mais ils doivent être répartis équitablement.
Aussi, monsieur le ministre d’État, permettez-moi de vous poser cette simple question : les anciens combattants doivent-ils vraiment être appelés à participer à cet effort ? Pour notre part, à gauche, nous refusons cette double peine. Comment en effet exiger d’eux qu’ils contribuent à la réduction des déficits publics alors qu’ils ont déjà tant donné ?
S’il semble légitime de leur demander, en tant que simples citoyens, de participer à l’effort commun, il n’est pas acceptable de leur imposer, en tant qu’anciens combattants, les mêmes efforts qu’aux autres composantes de la société. Cela témoignerait d’un mépris intolérable à leur endroit !
Or la crise à laquelle votre gouvernement impute cette diminution du budget ne vaut pas pour tous. Permettez-moi de donner un exemple pour illustrer mon propos : un point d’augmentation de la retraite du combattant représente environ 17 millions d’euros. En comparaison, la ristourne accordée à Mme Bettencourt au titre du bouclier fiscal a été de 30 millions d’euros, soit l’équivalent de deux points perdus pour la retraite du combattant !
En introduction de mon intervention, je soulignais que ce budget n’était pas un budget comme les autres. C’est pourquoi nous devons veiller ensemble à ce qu’il ne soit pas traité comme les autres. Or, si nous ne modifions pas en profondeur le budget qui nous est soumis, l’année 2011 sera pour les anciens combattants un panier vide !
Monsieur le ministre d’État, c’est avec une certaine amertume, je vous l’avoue, que j’interviens aujourd’hui à la tribune, car le budget que vous nous présentez est un budget de renoncements, mais aussi de reniements.
D’abord, les crédits sont en baisse en 2011 de 3, 89 %, soit une diminution de 110 millions d’euros ! Et il est prévu qu’ils baissent encore dans les années à venir : de 3, 7 % en 2012 et de 3, 2 % en 2013.
Ensuite, ce budget ne comporte aucune avancée réelle : rien, ou si peu, sur la carte du combattant ; rien, ou si peu, sur les retraites ; rien, ou si peu, sur la rente mutualiste ; rien, ou si peu, sur l’allocation différentielle en faveur des conjoints survivants ! Il a fallu attendre le discours de votre prédécesseur à l’Assemblée nationale pour entendre évoquer quelques rares et très modestes avancées.
Enfin, et surtout, ce budget est un renoncement aux promesses antérieures du Gouvernement, et surtout à celles du Président de la République ! Certes, me direz-vous, nous devrions y être habitués…
Sur la retraite, Nicolas Sarkozy n’avait-il pas en effet promis 48 points pour la fin de la législature, ce que Hubert Falco avait lui-même confirmé l’an dernier en évoquant le passage de 43 à 46 points en 2011, puis de 46 à 48 points en 2012 ? À l’évidence, mes chers collègues, nous ne les atteindrons pas.
Monsieur le ministre d’État, n’attendons pas que les anciens combattants ne soient plus là pour leur donner une juste reconnaissance !
Depuis des années, les associations d’anciens combattants réclament que leur budget soit équivalent au précédent. Le simple maintien du budget de 2011 au niveau de celui de 2010 aurait permis de satisfaire de nombreuses revendications.
Un tel maintien aurait permis la revalorisation de trois points d’indice de la retraite du combattant en 2011 ; l’attribution de la carte du combattant aux militaires arrivés en Algérie avant le 2 juillet 1962 et justifiant de 120 jours de présence ; un niveau minimal de ressources assuré par l’allocation différentielle de solidarité en faveur des conjoints survivants les plus démunis et son extension aux anciens combattants eux-mêmes.
Il aurait également permis une juste indexation des pensions militaires d’invalidité, laquelle ne devrait pas être inférieure à celle du coût de la vie. Je rappelle que la perte de pouvoir d’achat de ces dernières années est de l’ordre de 7 % en ce qui concerne les traitements bruts de la fonction publique.
Ce maintien aurait par ailleurs permis le relèvement du plafond de la retraite mutualiste du combattant de l’indice 125 à l’indice 130 pour achever le rattrapage.
Aussi, et parce que les réponses apportées par votre prédécesseur lors de son audition par la commission élargie de l’Assemblée nationale le 11 octobre dernier n’ont convaincu personne, je profite de ce débat, monsieur le ministre d’État, pour vous demander de retirer le décret du 29 juillet 2010 sur les bonifications de campagne à égalité de droits entre combattants de tous les conflits, car il est quasiment inopérant, les conditions qu’il prévoit étant trop restrictives.
Cependant, je dois bien admettre une avancée : la décristallisation des pensions militaires des anciens ressortissants de pays étrangers anciennement sous souveraineté française. Toutefois, c’est à une décision du Conseil d’État que l’on doit cette réévaluation du montant des pensions.
Il est un autre point sur lequel je souhaite insister, monsieur le ministre d’État : que comptez-vous faire pour donner aux victimes de l’OAS leur place dans la mémoire nationale ? Dois-je vous rappeler le nombre de morts et de blessés liés aux attentats commis par cette organisation criminelle ?
Monsieur le ministre d’État, je souhaite que les cérémonies du 19 mars, qui regroupent incontestablement le plus grand nombre d’anciens combattants, soient l’occasion de réunir les autorités civiles et militaires de manière obligatoire.
Pour conclure, pourriez-vous nous apporter des précisions sur le dossier de l’indemnisation des orphelins victimes de la barbarie nazie ?
« Ils ont des droits sur nous » disait Georges Clemenceau à propos des anciens combattants. Ce que nous vous demandons avec force, c’est que la Nation assume envers eux ses devoirs ! À défaut, comme vous l’a dit avant moi ma collègue Gisèle Printz, le groupe socialiste ne votera pas le budget de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».