Intervention de Ronan Dantec

Réunion du 4 juillet 2014 à 9h45
Délimitation des régions et élections régionales et départementales — Articles additionnels avant l'article 1er

Photo de Ronan DantecRonan Dantec :

Le groupe écologiste votera cet amendement, qui peut aussi nous servir de feuille de route pour nos débats de ce jour, en nous permettant d’avoir les idées claires sur la manière dont nous allons travailler par la suite.

J’entends les arguments de Philippe Kaltenbach, mais, globalement, cet amendement reste tout de même assez littéraire ; et compte tenu du calendrier envisagé, la carte ne sera de toute façon mise en œuvre qu’après le vote du Parlement sur le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République. Le vote de cet amendement n’aura donc pas beaucoup de conséquences, sauf qu’il permettra de refixer le cadre politique de cette réforme.

Nous sommes actuellement dans une situation assez paradoxale. Si l’on en juge par les réactions sur le terrain, cette loi, fondamentalement, est voulue, y compris en Bretagne et dans les Pays de la Loire – en effet, en tant qu’habitant de la Loire-Atlantique, j’ai un peu un pied dans chacune de ces deux régions !

Qu’il s’agisse des acteurs économiques ou de la population en général, personne ne se manifeste pour le statu quo. Il est extrêmement important de le souligner. Le dernier sondage Louis Harris pour la presse quotidienne régionale, paru hier, montre que nos concitoyens sont favorables à la réforme, y compris en Bretagne : loin des craintes de dilution de l’identité bretonne que l’on aurait pu imaginer, l’on constate au contraire que les habitants de cette région seraient peut-être même prêts à aller jusqu’à la fusion avec les Pays de la Loire.

Ainsi, cette réforme est voulue, et elle doit réussir. Je vois bien que des collègues favorables et des collègues opposés à cette réforme vont se retrouver pour voter cet amendement. Mais le plus important, me semble-t-il, est de réussir cette réforme. Et nous sommes à cet égard dans une situation paradoxale, parce que cette dynamique de modification de la carte des régions, globalement soutenue par la population française et les acteurs économiques, se heurte à la méthode choisie.

Je comprends certes le raisonnement du Gouvernement. Il se dit que, s’il donne du temps au débat, s’il introduit de la souplesse, s’il laisse des départements quitter des régions, il ouvre la boîte de Pandore et court à l’échec. Il reprend donc la méthode utilisée en 1962 par Serge Antoine, lequel s’était notamment fondé sur les flux de courrier entre départements pour essayer d’établir un découpage somme toute assez technocratique. En tant que Breton de Loire-Atlantique, je n’adhère certes pas totalement au découpage de Serge Antoine. Je voudrais néanmoins rendre hommage à cet homme qui, par la suite – les itinéraires sont parfois étonnants –, fut l’un des rédacteurs du chapitre « collectivités territoriales » de l’Agenda 21 de Rio et passa une bonne partie de sa vie, y compris au sein du Club de Rome, à défendre les valeurs du développement durable.

Il n’en demeure pas moins que le choix de faire comme en 1962 est une véritable erreur politique. Nous ne sommes plus en 1962 ! Le tournant de 1981 et la première décentralisation sont passés par là, et les territoires ne peuvent pas être aujourd’hui dépossédés de ce débat. On ne peut pas imposer une carte d’en haut, et il faut se laisser un peu de temps pour voir comment les mouvements s’opèrent sur le terrain.

Pour reprendre l’exemple de la Bretagne et des Pays de la Loire, après un premier temps de sidération, durant lequel quelques voix fortes se sont élevées en faveur du statu quo, nous sommes désormais entrés dans le temps du débat, dans le temps d’un affrontement positif entre, d’une part, ceux qui considèrent qu’un rapprochement aboutirait à une Bretagne élargie majoritairement bretonne, et, d’autre part, ceux qui redoutent encore que l’identité bretonne n’imprègne trop fortement cette région Bretagne-Loire. Et je suis sûr que, cet automne, nous pourrons dégager, à défaut de consensus, tout au moins des majorités d’action.

Je trouve pour ma part la rédaction de l’amendement assez forte. Il me semble en particulier essentiel d’insister sur la nécessité d’une gestion différenciée des territoires français. Et je suis heureux de retrouver à mes côtés, pour défendre cette idée, des groupes qui, dans mon esprit, restaient attachés à une certaine vision jacobine de la France. Comme quoi tout évolue dans le bon sens !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion