Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 16 juillet 2014 à 14h30
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 — Article liminaire

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Cet article dit « liminaire » est une nouveauté, puisque sa création remonte à la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques. Il a pour objet de présenter la prévision rectifiée de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques.

De présentation austère, cet article laisse apparaître que le déficit public effectif accuse une dégradation de 0, 2 point, le plus important étant sans doute que le solde conjoncturel s’inscrit en amélioration de 0, 3 point, alors que le déficit structurel affiche, lui aussi, une détérioration de 0, 6 point.

Si j’insiste sur ces éléments un peu complexes, c’est parce que la réduction du déficit public effectif, qui est réelle, s’opère sur le compte et au détriment des salariés, des retraités et des précaires, notamment de celles et de ceux qui sont ou seront privés d’emploi. En effet, si le déficit effectif diminue, c’est au prix tant de l’allongement de la durée de cotisations obligatoires pour pouvoir bénéficier d’une retraite à taux plein que des décotes accompagnant toutes les réformes des retraites, lesquelles s’imputent essentiellement sur les pensions des femmes.

Les chiffres sont clairs : la réduction des déficits publics est la conséquence des baisses contraintes des dépenses prévues dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, qui atteignent tout de même 4 milliards d’euros, l’objectif étant de parvenir aussi vite que possible aux fameux 3 % imposés par la Commission européenne.

Force est de constater que les mesures d’austérité, que certains appellent de « rigueur » au prix de subtilités terminologiques ne changeant pas le fond et qui sont mises en œuvre depuis deux ans, produisent leurs effets puisque le déficit des administrations publiques a été ramené à 3, 8 % du PIB en 2014, contre 4, 3 % en 2013. Pour autant, pouvons-nous nous en réjouir ? Je ne le crois pas.

Comme vous, mes chers collègues, nous souhaitons sortir la sécurité sociale de la nasse dans laquelle elle se trouve.

Comme vous, nous souhaitons que les comptes sociaux reviennent à l’équilibre, ne serait-ce que pour soustraire la sécurité sociale de l’emprise des marchés financiers à laquelle elle est soumise, puisqu’elle est, de fait, contrainte d’emprunter pour se financer, y compris à court terme, en raison notamment des retards de remboursements par l’État des dettes qu’il a envers la sécurité sociale au titre des compensations partielles des exonérations de cotisations patronales.

En revanche, ce que nous contestons, c’est le moyen d’y parvenir.

Vous faites le choix de geler les prestations sociales et les pensions, donc de réduire encore les dépenses sociales. Ainsi, la nouvelle convention d’assurance chômage qui allonge les délais de carence avant indemnisation des cadres devrait réduire la dépense de l’ordre de 600 millions d’euros, même si, pour ce faire, il faut asphyxier financièrement les salariés privés d’emploi.

Vous faites même le choix contestable de réduire de 400 millions d’euros les investissements d’avenir, mais vous choisissez surtout de réduire massivement les ressources de la sécurité sociale, ce qui, indiscutablement, va accroître plus encore le déficit structurel, d’autant que les prévisions de croissance sur lesquelles vous tablez sont, de l’avis de tous, y compris de l’INSEE, surévaluées. En effet, vos estimations reposent sur un taux de croissance de 1 %, quand tout le monde s’accorde à dire qu’il sera déjà difficile, avec la montée continue du chômage, d’atteindre le seuil de 0, 7 %.

Toutes ces raisons nous conduisent à voter contre un article qui, en réalité, entérine la politique d’austérité que vous imposez au peuple, alors qu’elle a déjà fait preuve de sa dangerosité et de son inefficacité à atteindre les buts que vous vous assignez.

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