Intervention de Jean-Noël Cardoux

Réunion du 15 juillet 2014 à 21h45
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de Jean-Noël CardouxJean-Noël Cardoux :

… rendu possible par le gel d’un certain nombre de prestations sociales, qui du reste est fortement contesté par votre aile gauche, comme certaines interventions précédentes l’ont montré. Le gel vise en particulier la retraite des classes moyennes, ce qui est à nos yeux inacceptable.

Vous prévoyez, de surcroît, de priver de 160 millions d’euros le Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés, ce qui à notre sens ne s’imposait pas.

Sans parler de votre fameux plan pour la dépendance, d’abord prévu à l’automne 2014 et désormais annoncé pour 2015, dont on ne sait pas comment il sera financé. Je crains que nous ne soyons encore confrontés à des impasses !

Au total, madame le ministre, nous sommes loin du choc de compétitivité si nécessaire à la France.

Dans notre esprit, la seule solution serait de lancer des signes forts aux secteurs qui en ont le plus besoin. Je pense d’abord aux services à la personne et aux emplois à domicile. À cet égard, M. Eckert, secrétaire d’État chargé du budget, a récemment déclaré que la réduction de cotisations devait être fixée par décret et qu’il envisageait une modulation d’abattement pour revenir sur la suppression du calcul au forfait intervenue il y a quelques mois ; cet abattement pourrait être compris entre 0, 75 euro et 2 euros.

Je me réjouis que la commission des affaires sociales ait adopté à l’unanimité un amendement, présenté par M. le rapporteur général, visant à instaurer un abattement de 1, 50 euro. Pour notre part, nous voudrions aller plus loin, au moins jusqu’à 2 euros, et peut-être même rétablir en partie le système du calcul au forfait.

Il faudrait aussi étendre les exonérations de charges des entreprises, en particulier de cotisations familiales, aux revenus représentant 3 ou 4 fois le SMIC, ce qui donnerait un coup de fouet salutaire aux entreprises innovantes et aux start-up. En effet, la limitation des exonérations au bas de l’échelle des salaires pénalise considérablement ces entreprises qui exportent et font preuve d’une grande imagination, alors qu’elles sont déjà défavorisées dans la compétition mondiale. Madame le ministre, en commission, vous nous avez dit que ce serait fait en 2016 ou en 2017. Bref, plus tard, toujours plus tard, encore plus tard.

Il faudra aussi réviser le CICE – ce n’est pas tout à fait le débat du jour, mais cela en fait partie – pour qu’il soit accessible aux catégories d’entreprises que je viens de mentionner – start-up, entreprises innovantes –, alors que, à l’heure actuelle, il bénéficie essentiellement, nous le savons, à de grandes entreprises non délocalisables comme les grandes surfaces, La Poste. Or ce sont les entreprises qui exportent qui auraient besoin de ce coup de pouce.

Pour financer ces mesures, nous préconisons la TVA anti-délocalisation, que vous avez supprimée, mais qui refait son chemin progressivement dans les esprits. Notre rapporteur général de la commission des affaires sociales n’en a d'ailleurs pas complètement écarté l’idée. En la matière, il faudrait vraiment réaliser des études approfondies. Il ne suffit pas d’augmenter la TVA de deux ou trois points ; il convient de prévoir des augmentations ciblées, des augmentations substantielles sur certains produits importés de haut niveau, je pense aux véhicules 4x4. On pourrait également envisager une TVA favorisant la fiscalité écologique.

Chacun sait que c’est la solution. J’en veux d'ailleurs pour preuve que les ministres des finances de la zone euro ont recommandé, le 7 juillet dernier, l’allégement de la fiscalité sur le travail, qui serait compensée par des « sources de revenus fiscaux moins préjudiciables à la croissance, comme des taxes sur la consommation ». C’est une phrase que j’aurais pu reprendre à mon compte.

Pour terminer, mes chers collègues, sans méchanceté mais avec un certain réalisme, j’aimerais vous livrer la définition que j’ai trouvée, parmi d’autres, de l’autodestruction : « Le comportement autodestructeur est une sorte d’autopunition en réponse à un échec personnel. Il est souvent motivé par un besoin d’attention. » §

Avec ce texte, comme avec les textes passés et à venir, nous sommes au cœur du problème. En effet, les textes que vous nous soumettez, qui relèvent bien souvent de l’affichage, reviennent sur des mesures que vous aviez vous-mêmes votées quelque temps auparavant. Après avoir minutieusement et laborieusement détricoté tout ce qu’avait fait le précédent gouvernement, vous commencez à détricoter ce que vous avez vous-mêmes enclenché. C’est tout de même le comble !

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