Intervention de Gérard Le Cam

Réunion du 18 juillet 2014 à 10h30
Agriculture alimentation et forêt — Article 1er, amendement 39

Photo de Gérard Le CamGérard Le Cam :

L’article 1er du projet de loi tend à définir les objectifs de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation. Il appelle donc des textes d’application des lois ou des règlements.

Le projet de loi dispose :

« La politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation, dans ses dimensions internationale, européenne, nationale et territoriale, a pour finalités : »

« 11°nouveau de protéger et de valoriser les terres agricoles ».

Il s’agit là d’un ajout très important dans la mesure où, aujourd’hui, certaines pratiques mettent à mal de tels objectifs. Je veux parler ici de l’enfouissement des déchets, particulièrement des déchets dits inertes, sous les terres agricoles ou de leur dépôt sur ces mêmes terres. L’amendement n° 39, déposé sur l’initiative de Mme Evelyne Didier, membre de la commission du développement durable, vise donc à mettre au rang des objectifs celui de l’interdiction de telles pratiques qui contreviennent à la préservation des terres agricoles.

Tout d’abord, il nous semble que la législation actuelle n’interdit pas le stockage de déchets inertes sur des terres agricoles. Ainsi, en vertu de l’article L.541-30-1 du code de l’environnement, aucune autorisation administrative n’est nécessaire pour les installations où les déchets inertes sont entreposés pour une durée inférieure à trois ans, ce qui pose déjà un problème de contrôle.

Le 3° de cet article vise également à soustraire ces déchets à autorisation administrative pour « l’utilisation des déchets inertes pour la réalisation de travaux d’aménagement, de réhabilitation ou à des fins de construction ». Cela a permis à des entreprises de déverser des déchets inertes sur les chemins forestiers ou sur des terres agricoles.

De plus, le code de l’urbanisme dispense de l’obligation d’obtenir la délivrance d’un permis pour aménager les affouillements et exhaussements du sol dont la hauteur ne dépasse pas deux mètres et qui portent sur une superficie inférieure à deux hectares. Ainsi, aucune autorisation n’est nécessaire, et donc aucun contrôle n’est effectué, quand ces déchets, qui sont enfouis sous les terres agricoles, sont ensuite recouverts sans avoir été bâchés. C’est ce qui s’est passé récemment en Seine-et-Marne.

D’une part, il faut le savoir, les terres agricoles peuvent être recouvertes de mauvaises terres et laissées ensuite à l’abandon ; on ne peut pas dire que leur reconversion en décharge soit une valorisation.

D’autre part, il arrive que ces terres soient de nouveau cultivées. Se posent alors le problème de la capillarité ascendante et descendante, quelque peu gênée par les couches de déchets, mais également celui de la présence de déchets dangereux, d’arsenic, de plomb, de métaux lourds qui infiltrent les eaux et les terres. Les membres des commissions foncières de la chambre d’agriculture et de la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles de Seine-et-Marne, la FDSEA 77, se sont penchés sur ces questions. Ils ont estimé que « les remblais de déchets inertes posent question du fait des difficultés à contrôler la nature des dépôts. Olivier George, secrétaire général adjoint et président de la commission foncière, déclarait : « L’histoire nous rappelle chaque jour que certaines terres sont aujourd’hui polluées par des entrepreneurs peu scrupuleux ».

Ainsi, mes chers collègues, cet amendement, au-delà de la pollution de l’eau – c’est une question essentielle, comme en témoignent les contaminations de trop nombreux captages d’eau –, pose la question de la préservation du potentiel agronomique des terres agricoles.

C’est pourquoi nous aimerions que la législation sur les déchets dits inertes soit renforcée ; cet amendement, directement en lien avec la loi d’avenir pour l’agriculture, vise à inscrire parmi les objectifs celui de l’interdiction du dépôt et de l’enfouissement des déchets sur les terres agricoles. §

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