Intervention de Christian Eckert

Réunion du 22 juillet 2014 à 14h30
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 — Rejet d'un projet de loi en nouvelle lecture

Christian Eckert :

Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez examiné la semaine dernière le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, et cet examen s’est soldé par un rejet.

Le contenu de ce texte a été parfaitement détaillé en commission et en première lecture par votre rapporteur. Aussi n’est-il pas indispensable d’en présenter de manière approfondie les articles, que vous connaissez et avez en partie adoptés.

Je souhaite néanmoins rappeler la démarche globale dans laquelle s’inscrit ce texte.

Il s’agit d’abord, vous le savez, de renforcer la croissance au moyen du soutien à l’emploi, d’une part, et à la compétitivité des entreprises, d’autre part.

Pour atteindre cet objectif, nous avons un premier levier d’action : redonner aux entreprises les marges et la visibilité nécessaires à leurs projets.

Tel est le sens de la nouvelle baisse du coût du travail ciblée sur les bas salaires jusqu’à 1, 6 fois le SMIC. C’est aussi dans cette logique que les cotisations personnelles des travailleurs indépendants et des exploitants agricoles seront réduites dans le cadre d’une exonération qui concernera 90 % des artisans et commerçants et environ 95 % des non-salariés agricoles.

Nous avons un deuxième levier d’action : alléger la fiscalité des entreprises pesant sur la production, dans le but de soutenir l’investissement.

C’est dans cette perspective que nous vous proposons d’agir sur la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, particulièrement décriée en tant qu’impôt « antiéconomique ». Payée par les entreprises à proportion de leur chiffre d’affaires, la C3S pénalise principalement le secteur industriel, qui est au cœur de nos préoccupations.

Le Gouvernement propose de réduire la C3S dès 2015, avec une suppression prévue pour toutes les entreprises à l'horizon de 2017. Un abattement permettra aux deux tiers des 300 000 redevables d’être totalement exonérés dès 2015.

Je précise que l’effet sur la sécurité sociale des différentes mesures contenues dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 sera intégralement compensé, selon des modalités qui seront définies dans les lois financières pour 2015.

Cette compensation aura un impact sur les finances de l’État – il faut en être conscient –, mais l’effort est nécessaire et à la mesure de notre engagement en faveur de l’investissement et de la compétitivité des entreprises.

Enfin, et je sais, mesdames, messieurs les sénateurs, que le sujet vous tient à cœur, les députés ont souhaité concrétiser, dans une version davantage ciblée sur les publics qui en ont le plus besoin, le souhait que vous aviez exprimé qu’un geste soit fait en direction des particuliers employeurs, notamment en matière de garde d’enfants, lorsque l’âge des enfants ne permet pas de bénéficier d’aides des caisses d’allocations familiales, et en direction de certaines personnes fragiles qui n’ont pas droit aujourd’hui aux aides, notamment parce qu’elles ne sont pas reconnues comme suffisamment dépendantes.

Cette démarche ciblée, plus proche de ce que nos finances publiques peuvent raisonnablement supporter que ne le serait une hausse généralisée de l’abattement, est néanmoins une modification constructive à laquelle vous serez sensibles.

Sachez que ces baisses de prélèvement sont financées, comme le Gouvernement s’y est engagé, par la maîtrise concomitante des finances publiques. Je souhaite à cet égard rappeler que, depuis 2012, la progression de la dépense publique est tout à fait maîtrisée. Les mesures adoptées pour 2013 ont permis d’obtenir des résultats importants : la dépense publique a augmenté en valeur de 2 %, son plus bas niveau depuis 1998.

Vous avez déjà débattu la semaine dernière des économies qui seront réalisées sur les dépenses de l’État dans le cadre du débat d’orientation des finances publiques. Chacun a pu alors prendre la mesure de l’ampleur de l’effort prévu, mais aussi constater que la maîtrise de la dépense préservait, au sein du budget de l’État, les moyens nécessaires au financement des priorités du Gouvernement. Il s’agit de faire des choix et d’agir sur les marges pour réaliser des économies, sans remettre en cause le champ d’action de l’État, sans réduire la qualité du service public, sans renoncer à notre modèle social.

À cet égard, je veux insister devant vous sur la nécessité des économies prévues dans la sphère sociale.

Les économies ne sont jamais faciles à mettre en œuvre, mais celles que nous vous proposons sont équilibrées, puisque les prestations des plus modestes sont largement ou totalement préservées.

En outre, ces mesures d’économies ne doivent pas faire oublier les dispositions en faveur des assurés que nous défendons. Je pense à la revalorisation du plan pauvreté et à la revalorisation exceptionnelle du minimum vieillesse.

Un travail de fond a été conduit avec la majorité parlementaire sur l’ensemble du pacte, pour aménager certaines mesures, pour aboutir à un meilleur équilibre et renforcer la cohérence de l’ensemble avec les dispositions prises en faveur des plus modestes.

Le Sénat a modifié le texte en première lecture pour en retirer plusieurs mesures d’économie proposées. Le Gouvernement a répondu à ces amendements. Il ne s’agit pas pour autant de remettre en cause l’effort : les économies qui ne seront plus faites au moyen de tel ou tel dispositif seront effectuées d’une autre manière, dans le cadre de la poursuite du dialogue avec le Parlement.

Reste un élément de l’équilibre du pacte, en apparence extérieur à ce texte, mais qui en constitue pourtant une condition essentielle. Je veux bien entendu parler des contreparties.

Le Premier ministre l’a rappelé lors de la clôture de la grande conférence sociale, l’effort consenti par la puissance publique est sans précédent et il implique légitimement des contreparties en faveur de l’emploi. C’est un principe que le Gouvernement s’est fixé : à l’engagement de l’État doit correspondre un engagement de tous pour l’emploi. Tout l’enjeu est alors de se laisser la possibilité de réévaluer les efforts de l’État à l’aune de ceux des entreprises.

Aussi le Gouvernement souhaite-t-il mettre en place un dispositif de suivi du pacte de responsabilité et de solidarité, afin de garantir que les sommes ainsi perçues par les entreprises sont effectivement affectées à l’emploi et à l’investissement.

Sur ce point encore, le Président de la République et le Premier ministre ont été clairs la semaine dernière : pour mieux suivre les aides aux entreprises, les missions du comité de suivi du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, seront élargies afin que nous disposions d’un outil d’évaluation pérenne de l’usage des aides et de leur efficacité.

Dans chaque branche, les partenaires sociaux seront chargés de s’assurer de la bonne affectation des marges de manœuvre ainsi dégagées.

Vous avez adopté en première lecture, sur l’initiative du rapporteur général, un amendement pour que l’emploi des aides aux entreprises figure parmi les thèmes de la négociation annuelle obligatoire au niveau des entreprises. C’est un bon moyen de s’assurer que le pacte sera pris en compte dans les orientations stratégiques de l’entreprise.

Comme vous le savez, et j’y tiens tout particulièrement, si les deux textes financiers de cet été, le projet de loi de finances rectificative et le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, tracent bien des perspectives jusqu’en 2017, ils ne contiennent que les mesures pour 2014 et 2015. En effet, il est indispensable de pouvoir s’assurer que les entreprises assumeront bien la contrepartie de l’effort du Gouvernement. Après cette première étape, un bilan devra être fait qui conditionnera la poursuite de la mise en œuvre des mesures du pacte.

C’est une garantie que nous nous donnons, c’est la condition de la réciprocité et, en fin de compte, de l’efficacité de l’effort consenti par la puissance publique.

Un important travail de fond a donc été conduit avec la majorité parlementaire et les partenaires pour mettre au point ce dispositif. Il garantit l’équilibre du pacte et il en renforce la légitimité aux yeux de tous. Car c’est bien là que se joue aussi le pacte de responsabilité et de solidarité : dans sa capacité à rassembler, à faire dialoguer les acteurs économiques et sociaux, à dépasser les clivages et à créer une dynamique d’échanges et de mobilisation collective au service de l’emploi.

C’est le défi que nous devons relever cette année, et il est déterminant pour l’avenir de notre pays parce que ce sont tous les Français qui ont à y gagner !

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