S’agit-il là aussi de terrorisme ? Le retour en France de ces personnes doit-il être considéré comme une menace ? On voit bien que, de ce point de vue, l’intervention du juge judiciaire présenterait davantage de garanties. En effet, monsieur le ministre, si, pour vous connaître, je n’ai aucun doute sur vos intentions, il n’en demeure pas moins que la loi que nous voterons sera appliquée par tous les gouvernements à venir. Or, qui dit que tous seront animés par le même état d’esprit et les mêmes préoccupations ?
J’évoquerai une dernière question, celle du rôle dévolu à la CNIL. La disposition qui a été introduite par l’Assemblée nationale témoigne tout de même d’un certain embarras des promoteurs du texte au regard de ce que je viens d’évoquer. Car enfin, s’il s’agit d’aller vite en faisant appel à l’autorité administrative pour prendre la décision de blocage, pourquoi ajouter une intervention de la CNIL, qui prendra forcément un certain temps ?
Par ailleurs, la CNIL n’a pas de compétence particulière en ces domaines. Certes, on m’objectera qu’il appartient au législateur de fixer les compétences de cette instance, et qu’il lui est donc toujours loisible de les étendre, mais, jusqu’à présent, la CNIL n’a jamais eu à juger des contenus. En donnant une telle compétence à la CNIL, nous changerions donc assez largement son domaine d’intervention, d’autant que cette extension concernerait tous les domaines dans lesquels liberté et internet sont en cause, et pas seulement celui de la lutte contre le terrorisme. Il s’agirait par conséquent d’une évolution majeure, qu’il me paraîtrait assez maladroit d’improviser au détour de la discussion du présent texte.
Telles sont les observations que je voulais formuler à l’occasion de cette discussion générale. Je salue la volonté du Gouvernement de mener une action résolue contre le terrorisme, mais l’article 9 de ce projet de loi, qui introduit une exception à une logique que nous croyions, les uns et les autres, bien calée, ne me paraît tout à fait convaincant. J’y reviendrai lors de l’examen des articles, mais mes réserves ne concernent pas l’ensemble du texte, que je soutiens. §