Intervention de Philippe Bonnecarrere

Réunion du 15 octobre 2014 à 21h30
Lutte contre le terrorisme — Article 4

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la lutte contre le terrorisme exige l’unité nationale.

Vous avez évoqué cet après-midi, monsieur le ministre, un nouveau type de terrorisme, que vous avez décrit comme un « terrorisme de libre accès ». Je suis un peu plus réservé que vous quant au nombre de ressortissants français concernés ; au regard de mon expérience d’élu local, j’ai en effet tendance à penser qu’ils sont plus nombreux.

Vous avez dit que 80 % des départements français étaient concernés et évoqué une augmentation « exponentielle » de ce phénomène. Ces propos attestent d’une indiscutable prise de conscience des difficultés rencontrées par notre pays. Je n’entrerai donc pas plus avant dans le débat arithmétique...

Une seule question se pose : comment lutter au mieux contre le terrorisme ? Mon approche de l’article 4 a été strictement pratique : je me suis posé la question des éléments de preuve, que l’on pourrait appeler aujourd’hui les éléments de recherche de renseignements.

Nous savons que les pouvoirs sont différents selon qu’il s’agit de flagrant délit ou d’enquête préliminaire. Or, en matière de terrorisme, je suis persuadé que la plupart des dossiers seront traités dans le cadre d’enquêtes préliminaires et non pas de flagrants délits.

Je me suis donc interrogé sur les différents éléments de preuve. Un élément classique est celui des écoutes téléphoniques, pour lesquelles il n’existe pas de quantum de peine. Il y en a, en revanche, en cas de mandat de recherche. À cet égard, ma mémoire m’a fait défaut. J’avais en tête que ce mandat nécessitait que l’infraction soit susceptible d’une peine de cinq ans, ce qui est faux.

Le texte du Gouvernement, à l’article 421-2-5 nouveau du code pénal, est quant à lui exact. Il suffit, tout au moins s’agissant de la provocation directe à des actes de terrorisme, que le quantum de peine soit de trois ans.

Comme je poussais mes recherches plus avant, deux éléments de preuve complémentaires m’ont paru intéressants pour nos magistrats et nos enquêteurs.

Le premier est celui qui concerne les perquisitions dites « informatiques », lesquelles seront abordées ultérieurement. Des moyens supplémentaires seront donnés aux officiers de police judiciaire pour « remonter » les données informatiques, ainsi que le prévoient les dispositions de l’article 76-3 du code de procédure pénale. Ceux-ci peuvent en effet, pour les nécessités de l’enquête, dans les conditions prévues à l’article 76, recourir aux opérations prévues par l’article 57-1.

Il m’est apparu qu’un amendement de coordination était en l’occurrence nécessaire, le quantum de peine de trois ans n’étant pas suffisant pour mettre en œuvre ce dispositif. J’ai constaté avec plaisir que la commission des lois en avait tenu compte et avait porté ce quantum à cinq ans.

La même question pouvait se poser s’agissant de la perquisition sans assentiment exprès prévue à l’article 76 du code de procédure pénale, laquelle procédure, tout à fait adaptée au travail des enquêteurs, n’est autorisée que pour les infractions passibles d’une peine supérieure ou égale à cinq ans.

Pour toutes ces raisons, j’avais rédigé un amendement tendant à modifier le quantum de peine en le portant à cinq ans. Cette proposition a été retenue par la commission des lois et figure dans la version du projet de loi qui nous a été distribuée. J’en remercie mes collègues.

J’indique également, intervenant ainsi dans le débat plus large qui a précédé, que les deux dispositions auxquelles je viens de faire référence, c’est-à-dire ces deux moyens de preuve supplémentaires donnés aux enquêteurs, ne sont en aucun cas liberticides, puisqu’ils sont tous deux conditionnés à l’autorisation préalable du juge des libertés.

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