Intervention de Guy-Dominique Kennel

Réunion du 30 octobre 2014 à 9h30
Délimitation des régions et élections régionales et départementales — Article 1er, amendement 41

Photo de Guy-Dominique KennelGuy-Dominique Kennel :

Je ferai un rappel, deux commentaires et une explication de vote.

Le rappel porte sur le conseil d’Alsace, dont j’ai été l’un des acteurs, sans avoir pourtant, à la différence de certains autres, communiqué sur ce point. Voilà plus de quatre ans, nous partions du principe qu’une évolution institutionnelle était absolument indispensable, vu la diminution générale des moyens publics.

Contrairement au Gouvernement, nous avions une méthode et un projet. La méthode consistait à associer le plus largement possible tous ceux qui avaient des propositions d’évolution et de simplification à présenter, sans perte de qualité de service public et de proximité. Le projet, lui, consistait, en se référant à l’article 72-1 de la Constitution, à créer une collectivité unique en fusionnant région et départements : une assemblée, un budget, un président, et l’addition des compétences départementales et régionales ; une région stratège en somme, et une mise en œuvre différenciée et territorialisée, et ce avec 20 % d’élus en moins.

Le référendum imposé par les textes a connu 58 % de votes positifs, ce qui représente, en toute bonne démocratie, la majorité. Malheureusement, nous n’avons pas rempli la deuxième condition : le « oui » n’a pas recueilli le vote de 25 % des inscrits dans chaque département. C’est probablement ce résultat qui fait hésiter une bonne majorité d’entre nous, y compris le Gouvernement, à imposer la voie référendaire, risquée certes, mais probablement la plus démocratique.

C’est ce projet, mes chers collègues, que nous souhaitons aujourd’hui faire revivre.

J’en viens aux deux commentaires.

Le premier porte sur l’amendement du Gouvernement. Vendredi dernier, à dix-huit heures, nous avons été reçus, le président du conseil régional et les deux présidents de conseil général, par le Premier ministre pour un entretien fort républicain – je dois le dire – de trois quarts d’heure.

J’ai posé deux questions « pratico-pratiques » au Premier ministre.

La première visait à savoir en quoi notre projet gênerait le Gouvernement. M. Valls m’a répondu qu’il trouvait le projet intelligent et que, Catalan d’origine, il le comprenait très bien.

La seconde question portait sur ce que le Gouvernement comptait faire, s’agissant de notre proposition. Il m’a été répondu que le Gouvernement laisserait faire le travail parlementaire et qu’il ne s’opposerait pas à une éventuelle avancée entre le Sénat et l’Assemblée nationale. Le Premier ministre a cependant évoqué l’existence d’un problème politique avec sa majorité, puisque le texte avait été voté en première lecture à l’Assemblée nationale.

Or je constate, messieurs les secrétaires d’État, que le Gouvernement ne laisse pas faire le travail parlementaire, puisqu’il a déposé lui-même un amendement, fort judicieusement retiré ensuite au bénéfice de l’amendement n° 41 rectifié ter, dont l’objet est identique. On voit bien là le piège politique de ce retrait que vous tendez à la majorité sénatoriale.

Est-ce là, mes chers collègues, le respect de la parole du Premier ministre ? On dit une chose, on fait le contraire. Je vous laisse le choix du qualificatif qui sied à cette attitude.

J’en viens à mon second commentaire, qui porte sur l’amendement n° 41 rectifié ter. Je tiens à remercier du fond du cœur mes collègues pour l’affection qu’ils portent à l’Alsace. J’ignore cependant si cela est dû à notre bonhomie, à notre gastronomie, à notre cathédrale, à notre métropole ou, plus prosaïquement, à notre PIB.

En tout état de cause, de grâce, évitez de parler de « repli identitaire » ! Il n’y a pas plus ouvert que l’Alsace : quatre prix Nobel, 25 % d’étudiants étrangers, 75 % des investissements réalisés par des capitaux étrangers, 70 000 frontaliers – j’en passe et des meilleurs !

Je poserai une simple question, pour faire suite à l’amendement n° 41 rectifié ter : êtes-vous prêts, mes chers collègues, à dire à vos concitoyens et aux contribuables que, demain, ils paieront plus cher, que les services seront dégradés, que cela en est fini de la proximité ? Êtes-vous prêts à leur dire que, demain, il n’y aura qu’une préfecture de région, qu’un siège, qu’une capitale, et que ce sera Strasbourg ? Ne pensez-vous pas que ce serait faire le lit des votes extrêmes ?

Si M. le ministre de l’intérieur a abandonné son amendement à votre profit, cela devrait être de nature à vous inquiéter ou, pour le moins, à faire réfléchir. §

En conclusion, mes chers collègues, les élus français d’Alsace de la majorité sénatoriale de droite et du centre vous demandent d’autoriser notre expérimentation, dont vous pourrez vous servir dans le futur.

Sachez une chose : l’Alsace respire la France au quotidien. Elle est ouverte sur l’Europe ; et elle est prête à construire avec vous, par convention, un futur pour le Grand Est. §

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