Séance en hémicycle du 30 octobre 2014 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • alsacien
  • lorraine
  • l’alsace
  • nord
  • nord – pas-de-calais
  • picardie

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

le Premier ministre a demandé à M. le président du Sénat de bien vouloir lui faire connaître le nom de deux sénateurs appelés à siéger au sein du Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire.

La commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire et la commission des affaires économiques ont été invitées à présenter chacune une candidature.

Les nominations au sein de cet organisme extraparlementaire auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’ordre du jour appelle l’examen de six projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.

Pour ces six projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.

Je vais donc les mettre successivement aux voix.

Est autorisée la ratification du protocole facultatif se rapportant au pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, signé à New York le 11 décembre 2012, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification du protocole facultatif se rapportant au pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (projet n° 660 [2013-2014], texte de la commission n° 28, rapport n° 27).

Le projet de loi est adopté définitivement.

Est autorisée la ratification de l'accord sur la création d'un espace aérien commun entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la Géorgie, d'autre part, (ensemble quatre annexes), signé à Bruxelles le 2 décembre 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord sur la création d’un espace aérien commun entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la Géorgie, d’autre part (projet n° 661 [2013-2014], texte de la commission n° 20, rapport n° 19).

Le projet de loi est adopté définitivement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je constate que ce projet de loi a été adopté à l’unanimité des présents.

Est autorisée la ratification de l'accord euro-méditerranéen relatif aux services aériens entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et le Royaume hachémite de Jordanie, d'autre part, (ensemble quatre annexes), signé à Bruxelles le 15 décembre 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord euro-méditerranéen relatif aux services aériens entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et le Royaume hachémite de Jordanie, d’autre part (projet n° 662 [2013-2014], texte de la commission n° 22, rapport n° 21).

Le projet de loi est adopté définitivement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je constate que ce projet de loi a été adopté à l’unanimité des présents.

Est autorisée la ratification du protocole modifiant l'accord de transport aérien entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et les États-Unis d'Amérique, d'autre part, signé à Bruxelles le 25 avril 2007 et à Washington le 30 avril 2007 (ensemble un appendice, une déclaration commune et un échange de lettres), signé à Luxembourg, le 24 juin 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification du protocole modifiant l’accord de transport aérien entre la Communauté européenne et ses États membres, d’une part, et les États-Unis d’Amérique, d’autre part (projet n° 780 [2013-2014], texte de la commission n° 24, rapport n° 23).

Le projet de loi est adopté définitivement.

Est autorisée la ratification du traité entre la République française et la République tchèque sur la coopération dans le domaine de la protection civile, de la prévention et de la gestion des situations d'urgence, signé à Prague, le 16 décembre 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant la ratification du traité entre la République française et la République tchèque sur la coopération dans le domaine de la protection civile, de la prévention et de la gestion des situations d’urgence (projet n° 516 [2012-2013], texte de la commission n° 26, rapport n° 25).

Le projet de loi est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je constate que ce projet de loi a été adopté à l’unanimité des présents.

Est autorisée l'approbation du protocole additionnel à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relative au tunnel routier sous le Mont-Blanc, signé à Rome le 20 octobre 2011, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant l’approbation du protocole additionnel à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relative au tunnel routier sous le Mont-Blanc (projet n° 518 [2012-2013], texte de la commission n° 18, rapport n° 17).

Le projet de loi est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je constate que ce projet de loi a été adopté à l’unanimité des suffrages exprimés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral (projet n° 6, texte de la commission n° 43, rapport n° 42).

Nous poursuivons la discussion des articles.

Chapitre Ier

Dispositions relatives à la délimitation des régions

Au sein du chapitre Ier, nous poursuivons l’examen de l’article 1er, dont je rappelle les termes :

I. – L’article L. 4111-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

2° Le second alinéa est remplacé par un II ainsi rédigé :

« II. – Sans préjudice des dispositions applicables aux régions d’outre-mer et à la collectivité territoriale de Corse, les régions en vigueur à compter du 1er janvier 2016 sont constituées des régions suivantes, dans leurs limites territoriales en vigueur au 31 décembre 2015 :

« – Alsace ;

« – Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes ;

« – Auvergne et Rhône-Alpes ;

« – Bourgogne et Franche-Comté ;

« – Bretagne ;

« – Centre ;

« – Champagne-Ardenne et Lorraine ;

« – Île-de-France ;

« – Languedoc-Roussillon ;

« – Midi-Pyrénées ;

« – Nord-Pas-de-Calais et Picardie ;

« – Basse-Normandie et Haute-Normandie ;

« – Pays de la Loire ;

« – Provence-Alpes-Côte d’Azur. »

I bis. – Les régions constituées en application du I du présent article succèdent aux régions qu’elles regroupent dans tous leurs droits et obligations.

II. – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier 2016.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Hier soir, nous avons entamé l’examen d’une série d’amendements faisant l’objet d’une discussion commune. Pour la clarté des débats, j’en rappelle les termes :

L'amendement n° 41 rectifié ter, présenté par MM. P. Leroy, Adnot, Baroin, Grosdidier, Huré, Husson, Laménie, Namy, Gremillet, Pierre, Longuet et Nachbar, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« – Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine ;

II. – En conséquence, alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

Cet amendement est assorti d’un sous-amendement n° 146, présenté par MM. Guené et Sido, et ainsi libellé :

Amendement n° 41 rectifié ter

I. – Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« - Alsace, Bourgogne, Champagne-Ardenne, Franche-Comté et Lorraine ;

II. – En conséquence, après l’alinéa 3

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… - En conséquence, alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

L'amendement n° 24 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard, Arnell, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et M. Requier, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

Bourgogne, Franche-Comté et Lorraine

II.- En conséquence, alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

III. – En conséquence, alinéa 11

Supprimer les mots :

et Lorraine

Cet amendement est assorti d’un sous-amendement n° 145, présenté par MM. Guené et Sido, et ainsi libellé :

Amendement n° 24 rectifié

I. – Alinéa 3

Après le mot :

Bourgogne

insérer les mots :

Champagne-Ardenne

II. – En conséquence, alinéas 7 et 8

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

Supprimer cet alinéa.

L'amendement n° 66, présenté par MM. Masseret et Bigot et Mme Schillinger, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

et Lorraine

II. – En conséquence, alinéa 11

Supprimer les mots :

et Lorraine

L'amendement n° 1 rectifié bis, présenté par MM. Guené et Sido, Mme Loisier et MM. Kern, G. Bailly et Houpert, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

« - Bourgogne, Champagne-Ardenne, Franche-Comté et Lorraine ;

II. – En conséquence, alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

L'amendement n° 45, présenté par MM. Savary et Détraigne, Mmes Férat et Gruny, M. Lefèvre et Mme Troendlé, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Champagne-Ardenne, Lorraine et Picardie ;

II. – En conséquence, alinéa 15

Supprimer les mots :

et Picardie

L'amendement n° 8, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 11

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« – Champagne-Ardenne ;

« – Lorraine ;

II. – Après l’alinéa 19

Insérer un I ter ainsi rédigé :

I ter - Après l’application en Alsace, en Champagne-Ardenne et en Lorraine de la procédure de fusion prévue à l’article L. 4124-1 du code général des collectivités territoriales, ce même code est complété par un article L. 8111-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 8111-1. - Dans les trois régions Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine, un décret en Conseil d’État peut fusionner en une collectivité territoriale unique la région et les départements qui en font partie. Cette collectivité territoriale unique exerce l’ensemble des compétences attribuées par la loi à la région et aux départements qu’elle regroupe. Elle leur succède dans tous leurs droits et obligations.

« Le présent article s’applique par dérogation à l'article L. 4124-1 du code général des collectivités territoriales et par dérogation aux autres articles de la présente loi. »

Les amendements n° 70, présenté par Mme Létard et M. Lecerf, et l’amendement n° 43, présenté par MM. Delebarre et Vandierendonck, Mme Génisson et MM. Poher, D. Bailly, Percheron et J.C. Leroy, sont identiques.

Tous deux sont ainsi libellés :

Alinéa 15

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« - Nord-Pas-de-Calais ;

« - Picardie ;

Mes chers collègues, nous en sommes parvenus aux explications de vote sur le sous-amendement n° 146.

La parole est à M. Michel Raison.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Cet amendement vise à créer une région Grand Est. Vous l’aurez noté, il semblerait que l’honneur du Sénat soit de sortir sa propre carte. Pour ma part, au-delà de l’honneur, je pense qu’il s’agira surtout d’une belle prouesse !

En effet, nous l’avons encore vu cette nuit, comment dessiner une carte, comment réorganiser la gouvernance d’un pays si nous avons chacun notre propre méthode – moi y compris –, aussi noble soit-elle ? De plus, nous dessinons des cartes de région sans savoir ce que l’on mettra dedans. J’ai un peu l’impression que nous nous comportons comme si nous étions dans un grand immeuble en train de brûler : chacun essaie de sauver l’essentiel de ses petites affaires ! Je n’ai donc d’autre choix que faire de même, et d’essayer de sauver la Bourgogne-Franche-Comté !

Si l’Alsace se réunit à la Lorraine et à la Champagne-Ardenne, une belle grande région possédant une métropole verra le jour, au pied de laquelle on peut imaginer qu’une petite région comme la Bourgogne-Franche-Comté, peuplée seulement d’un peu plus de deux millions et demi d’habitants sur de grands territoires, se retrouverait bien isolée.

C’est la raison pour laquelle je vais soutenir cet amendement, qui vise à créer une vraie région Grand Est.

Je pourrais aussi adhérer à la thèse de la fabrication de gros départements, dans un second temps. Au cœur de cette grande région, à laquelle seraient dévolues des missions de planification et de programmation, la Franche-Comté, qui ne compterait jamais qu’un million d’habitants, pourrait être l’un de ceux-là, au côté de l’Alsace.

Avec cette méthode, qui n’est d’ailleurs pas que la mienne, nous pourrions redessiner une gouvernance nationale efficace, source d’économies et de développement pour notre pays.

MM. Charles Guené et Jackie Pierre applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Pour faire écho à ce qui vient d’être dit, il est vrai que nous butons depuis quelque temps sur la question de la méthode.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

J’ai justement essayé de voir, en termes de méthode, comment nous sortir de ce débat sur l’Alsace et le Grand Est. S’agissant de ce territoire, je dispose d’un avantage : élu d’un département situé à l’autre bout de la France, je ne suis concerné ni directement ni indirectement par cette question. J’aurai sans doute moins de recul dans d’autres débats à venir…

Le premier point concerne la volonté gouvernementale. Il me semble avoir compris – M. le ministre pourra me contredire – que toutes les futures grandes régions françaises devront s’appuyer sur une trame urbaine crédible, de niveau européen.

Il s’agit de l’un des éléments clés de cette réforme, et l’on voit bien se dessiner de grandes régions autour de métropoles importantes : Toulouse, Lyon, Bordeaux…

À la première question consistant à se demander si l’Alsace dispose d’une trame urbaine suffisante, la réponse est évidemment oui : l’axe Strasbourg-Mulhouse est une trame urbaine. S’il faut une grande métropole pour chaque territoire, l’Alsace peut donc rester une région.

Le deuxième point, auquel le Gouvernement me semble extrêmement attaché, concerne l’idée de simplification. On nous a expliqué que cette réforme allait nous faire gagner beaucoup d’argent en termes d’économies de fonctionnement. Cette question fait quelque peu débat – moi le premier, je ne suis pas convaincu… –, mais toujours est-il que la proposition alsacienne, qui ne se limite pas à la seule création d’une région mais comporte aussi la création d’une collectivité territoriale unique, va dans le sens de la simplification. Il s’agit en effet de supprimer l’échelon départemental. Sur ce deuxième point également, le sens de la réforme gouvernementale est donc respecté.

Le troisième point n’a pas encore été assez évoqué. Certains de mes camarades et moi-même – j’en suis d’ailleurs un peu désolé – avons parfois dit de cette réforme qu’elle était technocratique, d’essence jacobine et qu’elle s’imposait d’en haut. Si l’on examine la carte, ce n’est pas du tout le cas ! Manuel Valls est en effet extrêmement défenseur des identités régionales !

Dans sa proposition, le Gouvernement ne touche pas à la Bretagne – « on ne touche pas à la Bretagne ! », a dit l’ancien président du conseil régional de Bretagne, Jean-Yves Le Drian –, dont l’identité est forte.

De même, le grand comté de Toulouse, tronçonné par l’État et la France victorieux, est reconstitué pour la première fois depuis les Cathares. Historiquement, c’est tout de même fort ! Le Languedoc est aussi une région à identité culturelle très forte.

Bien évidemment, on ne touche pas non plus à la Corse, hors du champ de ce débat.

Manque donc l’Alsace, dont il faut aussi respecter l’identité historique et culturelle, comme on le fait pour les autres régions. Peut-être plus que d’autres, les Alsaciens ont réussi quelque chose de fantastique en matière de défense de leur langue, et je veux leur en rendre hommage. Il me semble donc légitime de les soutenir, car il y va de notre participation à la diversité culturelle du monde et d’une part de notre responsabilité globale.

Sur ces trois points, je pense que le maintien d’une identité alsacienne s’accorde tout à fait avec la volonté et la méthode gouvernementales.

J’ajouterai encore deux points, pour conclure.

Tout d’abord, l’Alsace nous offre quelque chose d’assez rare dans ce débat : les Alsaciens, au moins, ont vraiment discuté de la question. Ils sont d’accord s’agissant des régions et des départements ; un vote est même intervenu : les habitants, sauf dans un département – je ne vous rappellerai pas toute l’histoire, mes chers collègues ! – ont même voté majoritairement en faveur d’une collectivité territoriale unique.

Un vrai débat s’est donc tenu, donnant lieu à un quasi-consensus des élus, ce qui se rencontre rarement. Par conséquent, ne pas tenir compte de l’expérience du seul territoire où les acteurs se sont vraiment mis d’accord reviendrait à envoyer un signal assez désastreux.

Par ailleurs – et cela a été assez bien souligné par Michel Delebarre lors de nos débats d’hier –, il ne peut à mon avis pas y avoir de solution unique valable pour toute la France ; les territoires dépendent en effet de problématiques toujours différentes. Je pense notamment aux territoires frontaliers de régions européennes. Michel Delebarre indiquait par exemple que la région Nord-Pas-de-Calais devait renforcer ses liens avec la Belgique. Il est bien évident que la collectivité alsacienne connaît cette même situation avec les régions allemandes.

Pour une fois, mes chers collègues, nous avons affaire à un projet clair, un projet cohérent avec les grands objectifs du Gouvernement. Je soutiens donc le maintien de la région Alsace, et, demain, d’une collectivité territoriale unique. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Messieurs les secrétaires d’État, je ne peux adhérer aux arguments présentés par le Gouvernement à l’appui de l’amendement n° 143, qu’il a d’ailleurs retiré au profit de l’amendement n° 41 rectifié ter. Ces deux amendements identiques tendent en effet à réintroduire dans le texte la région Alsace–Lorraine–Champagne-Ardenne, dite « Alca ». Pour ma part, j’aurais aimé entendre le Gouvernement dire qu’il revenait à son projet initial, la création d’une région Alsace-Lorraine.

J’ai mené, lors des élections sénatoriales, une campagne de terrain au cours de laquelle j’ai pu entendre les revendications des grands électeurs alsaciens : ils veulent avant tout une Alsace seule, et a maxima seulement le regroupement de l’Alsace et de la Lorraine. Les défendre est mon rôle. C’est ce que je vais faire ; c’est pour cela que j’ai été réélue.

Dès lors, messieurs les secrétaires d’État, je vous demande de revoir votre copie et d’en revenir au projet de regroupement de l’Alsace et de la Lorraine, puisque, d’après ce que j’ai pu comprendre, vous avez définitivement abandonné le projet de l’Alsace seule.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Guy-Dominique Kennel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy-Dominique Kennel

Je ferai un rappel, deux commentaires et une explication de vote.

Le rappel porte sur le conseil d’Alsace, dont j’ai été l’un des acteurs, sans avoir pourtant, à la différence de certains autres, communiqué sur ce point. Voilà plus de quatre ans, nous partions du principe qu’une évolution institutionnelle était absolument indispensable, vu la diminution générale des moyens publics.

Contrairement au Gouvernement, nous avions une méthode et un projet. La méthode consistait à associer le plus largement possible tous ceux qui avaient des propositions d’évolution et de simplification à présenter, sans perte de qualité de service public et de proximité. Le projet, lui, consistait, en se référant à l’article 72-1 de la Constitution, à créer une collectivité unique en fusionnant région et départements : une assemblée, un budget, un président, et l’addition des compétences départementales et régionales ; une région stratège en somme, et une mise en œuvre différenciée et territorialisée, et ce avec 20 % d’élus en moins.

Le référendum imposé par les textes a connu 58 % de votes positifs, ce qui représente, en toute bonne démocratie, la majorité. Malheureusement, nous n’avons pas rempli la deuxième condition : le « oui » n’a pas recueilli le vote de 25 % des inscrits dans chaque département. C’est probablement ce résultat qui fait hésiter une bonne majorité d’entre nous, y compris le Gouvernement, à imposer la voie référendaire, risquée certes, mais probablement la plus démocratique.

C’est ce projet, mes chers collègues, que nous souhaitons aujourd’hui faire revivre.

J’en viens aux deux commentaires.

Le premier porte sur l’amendement du Gouvernement. Vendredi dernier, à dix-huit heures, nous avons été reçus, le président du conseil régional et les deux présidents de conseil général, par le Premier ministre pour un entretien fort républicain – je dois le dire – de trois quarts d’heure.

J’ai posé deux questions « pratico-pratiques » au Premier ministre.

La première visait à savoir en quoi notre projet gênerait le Gouvernement. M. Valls m’a répondu qu’il trouvait le projet intelligent et que, Catalan d’origine, il le comprenait très bien.

La seconde question portait sur ce que le Gouvernement comptait faire, s’agissant de notre proposition. Il m’a été répondu que le Gouvernement laisserait faire le travail parlementaire et qu’il ne s’opposerait pas à une éventuelle avancée entre le Sénat et l’Assemblée nationale. Le Premier ministre a cependant évoqué l’existence d’un problème politique avec sa majorité, puisque le texte avait été voté en première lecture à l’Assemblée nationale.

Or je constate, messieurs les secrétaires d’État, que le Gouvernement ne laisse pas faire le travail parlementaire, puisqu’il a déposé lui-même un amendement, fort judicieusement retiré ensuite au bénéfice de l’amendement n° 41 rectifié ter, dont l’objet est identique. On voit bien là le piège politique de ce retrait que vous tendez à la majorité sénatoriale.

Est-ce là, mes chers collègues, le respect de la parole du Premier ministre ? On dit une chose, on fait le contraire. Je vous laisse le choix du qualificatif qui sied à cette attitude.

J’en viens à mon second commentaire, qui porte sur l’amendement n° 41 rectifié ter. Je tiens à remercier du fond du cœur mes collègues pour l’affection qu’ils portent à l’Alsace. J’ignore cependant si cela est dû à notre bonhomie, à notre gastronomie, à notre cathédrale, à notre métropole ou, plus prosaïquement, à notre PIB.

En tout état de cause, de grâce, évitez de parler de « repli identitaire » ! Il n’y a pas plus ouvert que l’Alsace : quatre prix Nobel, 25 % d’étudiants étrangers, 75 % des investissements réalisés par des capitaux étrangers, 70 000 frontaliers – j’en passe et des meilleurs !

Je poserai une simple question, pour faire suite à l’amendement n° 41 rectifié ter : êtes-vous prêts, mes chers collègues, à dire à vos concitoyens et aux contribuables que, demain, ils paieront plus cher, que les services seront dégradés, que cela en est fini de la proximité ? Êtes-vous prêts à leur dire que, demain, il n’y aura qu’une préfecture de région, qu’un siège, qu’une capitale, et que ce sera Strasbourg ? Ne pensez-vous pas que ce serait faire le lit des votes extrêmes ?

Si M. le ministre de l’intérieur a abandonné son amendement à votre profit, cela devrait être de nature à vous inquiéter ou, pour le moins, à faire réfléchir. §

En conclusion, mes chers collègues, les élus français d’Alsace de la majorité sénatoriale de droite et du centre vous demandent d’autoriser notre expérimentation, dont vous pourrez vous servir dans le futur.

Sachez une chose : l’Alsace respire la France au quotidien. Elle est ouverte sur l’Europe ; et elle est prête à construire avec vous, par convention, un futur pour le Grand Est. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. François Grosdidier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

Le sous-amendement n° 146 tend à la création d’une très grande région, allant de Mâcon à la frontière belge, et de Paray-le-Monial à Haguenau.

Je comprends parfaitement l’intention des élus qui l’ont déposé : ils risquent en effet, avec le nouveau système régional proposé, de se retrouver isolés dans des régions rurales, dépourvues de métropole. Mais, dans le même temps, on touche là à l’absurdité de la démarche. Ronan Dantec a eu parfaitement raison de dénoncer l’absence totale de méthode dans le découpage proposé.

On nous propose en effet la création de très grandes régions, lesquelles ne nous paraissent pas, a priori, pertinentes pour exercer des compétences tirées – c’est ce qui a été annoncé au départ – des départements. Si, demain – mais ce n’est pour l’instant pas précisé –, les régions en question exerçaient des compétences en matière d’université, de très grandes infrastructures, de politique économique et sociale – les compétences en somme des régions d’autres pays européens, comme les Länder allemands, dont les budgets par habitant sont d’ailleurs dix fois plus importants que ceux des régions françaises actuelles –, elles auraient alors un sens ! Dans cette hypothèse, que penser de l’isolement de l’Alsace ?

Hier soir, le groupe socialiste a applaudi à tout rompre Michel Delebarre quand il a défendu l’isolement de la région Nord-Pas-de-Calais au détriment de la Picardie. M. Le Drian, quant à lui, a obtenu que la Bretagne reste seule, sans même que lui soit ajoutée la capitale historique de sa région. Tout cela n’a aucun sens, mes chers collègues, et n’obéit à aucune méthode. Nous sommes en train de nous écharper sur des amendements et de défendre les situations les moins mauvaises, en espérant pouvoir, par la suite, les modifier.

Moi, Lorrain, j’entends le discours de mon collègue alsacien Guy-Dominique Kennel ; je pourrais tenir le même en remplaçant le mot « Alsace » par le mot « Lorraine ». Nous aussi, mon cher collègue, nous sommes davantage motivés par l’approfondissement que par l’élargissement. Et nous, nous avons non pas, comme vous, deux frontières, mais trois. Hier, M. Jacques Mézard a défendu l’option du regroupement de l’Alsace, de la Lorraine et de la Franche-Comté, en mentionnant seulement les frontières allemandes et suisses, et en évoquant le sillon rhénan. Il a seulement oublié de mentionner le sillon constitué par la Moselle et la Saône, ainsi que nos frontières avec le Luxembourg et la Belgique !

Mes chers collègues, je reviendrai plus tard sur l’amendement n° 41 rectifié ter, mais je tiens à souligner d’ores et déjà que l’Alsace ne peut pas rester seule ; cela n’a aucun sens ! Pour autant, une grande région allant de Mâcon à la frontière belge n’aurait pas de sens non plus. Si l’on voulait former de grandes régions, articulées autour des grandes métropoles, le sud de la Bourgogne aurait dû être rattaché au Lyonnais, et non pas à Strasbourg. C’est donc autour de l’Alsace et de la Lorraine qu’une vraie grande région est à créer !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Mes chers collègues, l’Alsacien que je suis ne peut naturellement pas voter ce sous-amendement, pour des raisons de forme comme de fond.

Sur la forme, dès lors que je m’apprête à m’opposer à l’amendement n° 41 rectifié ter, je ne peux clairement pas voter le sous-amendement qui tend à le modifier.

Sur le fond, à la suite de ce que vient d’indiquer François Grosdidier, je voudrais moi aussi souligner que l’on voit apparaître une nouvelle fois l’erreur de la méthode retenue : la focalisation sur le périmètre plutôt que sur le contenu. Je voudrais, je le répète, que l’on se pose la question suivante : qu’apportera une grande région à ses habitants et à notre pays – à la France dans l’Europe, dirai-je même ? Qu’apportera, a fortiori, la « méga-région » à laquelle tend ce sous-amendement ? Je ne rappellerai pas ce que j’ai déjà signalé hier à propos des grandes régions, car ce serait me répéter ; permettez-moi seulement de vous faire cette observation, mes chers collègues : selon moi, la régionalisation n’a de sens que si elle se développe en suscitant la participation de la population à la vie et à l’activité du territoire.

Chers collègues qui avez déposé ce sous-amendement, je vous pose la question : comment concevez-vous l’adhésion de la population des diverses régions regroupées au sein de cette « méga-région » ? Soyons – excusez-moi du terme – réalistes : il n’y en aura pas !

Je signalerai, pour conclure, que la participation de la population ne peut se faire qu’au sein d’institutions à sa mesure. Ce ne sera vraiment pas le cas avec la région ici proposée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Je voudrais tout d’abord présenter mes excuses aux sénateurs à qui je brûle la politesse en intervenant dès maintenant ; il se trouve que je dois exposer devant la commission des finances le budget pour la mission de l’enseignement scolaire dans dix minutes. C’est un déchirement pour moi, car le sujet dont nous débattons actuellement est passionnant, non pas tant du point de vue du sénateur lorrain que je suis que pour les sénateurs français que nous sommes tous, mes chers collègues.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Je voudrais revenir sur l’amendement n° 41 rectifié ter, présenté par Philippe Leroy. Le sous-amendement n° 146 ne me gêne pas ; il ne règle pas le fond du problème immédiat qui se pose à nous.

Quel est ce problème ? Nous sommes des sénateurs. Or, dans le bicamérisme français, l’Assemblée nationale aura le dernier mot. Le Gouvernement a fait un choix : des grandes régions, avec une forte intégration.

Ce choix n’est pas possible. Le Gouvernement est en train de reculer, et à juste titre. Il revient sur les positions Krattinger, qui avaient été adoptées par la commission spéciale mais qui, à ma connaissance, n’ont pas fait l’objet d’un vote du Sénat. Le texte de M. Krattinger prévoyait de grandes régions, une faible intégration régionale et le maintien des départements.

À l’UMP, formation à laquelle j’appartiens depuis sa création, nous avions défendu et obtenu de la Haute Assemblée en 2010 le statu quo des régions et une forte intégration. Nous répondions à l’esprit que défendent nos collègues alsaciens : des régions identiques et une forte intégration.

Il se trouve que les électeurs ont choisi comme Président de la République François Hollande et qu’ils ont élu une majorité soutenant un projet différent du nôtre à l’Assemblée nationale. Et nous sommes tenus par la règle de l’entonnoir, profondément frustrante pour ceux dont le projet n’est pas celui qui est proposé.

Nous avons fait le choix de participer à ce débat avec l’Assemblée nationale. Il est donc évident que c’est autour de la grande région que nous sommes obligés de débattre et de nous organiser. Nier ce phénomène de grande région, ce serait nous livrer pieds et poings liés au seul jugement de l’Assemblée nationale et abdiquer nos responsabilités.

Le projet alsacien correspond à mes convictions d’intégration de régions existantes. Nous aurons l’occasion d’en discuter lors du débat sur les compétences territoriales, puisque nous pourrons alors évoquer librement la totalité du sujet.

À présent, j’aimerais évoquer l’Est en tant que Français. En 843, les petits-fils de Charlemagne ont séparé l’Empire. Après l’élection de Hugues Capet à Noyon, en Picardie, toute la construction française a visé à assurer l’unité du royaume et à marcher à l’Est. Il a fallu attendre Robert Schuman en 1950 pour que la France considère l’Est comme un lieu non plus de batailles, mais de développement.

Or ce développement ne fonctionne pas d’un point de vue français. Il y a une région Alsace rhénane, qui est une réussite. La Lorraine a tiré son épingle du jeu au début du XXe siècle grâce aux richesses de son sous-sol. Et la Champagne excelle par ses produits, notamment. Pour autant, force est de constater aujourd'hui que deux régions sur trois perdent des habitants, alors qu’elles devraient constituer le trait d’union, pour nous Français, entre la région d’Île-de-France, un atout de taille mondiale ou, en tout cas, européenne, et cette banane bleue, cette Lotharingie industrielle. L’Alsace tire son épingle du jeu grâce à sa culture, sa forte identité et sa proximité avec l’Allemagne rhénane et la banane bleue.

En tant que Français, et non pas en tant que Lorrain, je souhaite apporter à mon pays une organisation permettant de développer enfin ce Grand Est qui a été épuisé par la guerre de Trente ans, par les guerres napoléoniennes, par les trois guerres franco-allemandes, ainsi que par la reconversion industrielle.

Nous avons besoin d’un interlocuteur unique pour rappeler à la France l’existence du Grand Est, et à Bruxelles la présence de ce trait d’union. Nous ne demandons ni à gérer les affaires du voisin ni à faire son bonheur. Je suis incapable de parler du bonheur des Champardennais. Je sais simplement une chose : ensemble, nous serons respectés ; divisés, nous serons oubliés !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean-Marie Bockel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

En effet, mon cher collègue. Mais nous pouvons tous nous y retrouver.

Le débat sur le sous-amendement n° 146 a le mérite de démontrer que, sûrement avec de bonnes intentions, nous sommes sur deux logiques différentes.

Certes, cher Gérard Longuet, vous venez de démontrer, et avec beaucoup de talent, que l’on pouvait remonter très loin dans l’Histoire pour essayer de convaincre de la nécessité d’être sur de vastes périmètres. Je ne nie pas la réalité toujours très riche, passionnante et fondatrice de l’Histoire de France.

Mais l’Histoire récente, celle des dernières décennies, voire des dernières années, a également toute son utilité dans la construction d’une démarche régionale à laquelle on souhaite véritablement donner un sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

Notre collègue Ronan Dantec a dit les choses peut-être mieux que nous, Alsaciens, n’aurions pu le faire.

Car nous qui sommes « à l’instar de l’étranger effectif », comme l’on disait à l’époque de Louis XIV – M. le ministre a rappelé que l’on disait aussi : « Ne touchez pas aux affaires de l’Alsace ! » –, nous nous sentons plus Français que Français ; nous sommes des patriotes et des Européens en même temps. Mais il est des choses que nous n’aimons pas dire alors que nous les ressentons profondément !

Nous avons effectivement beaucoup en commun avec la Lorraine, même si la réalité est parfois plus compliquée, puisque l’on parle aussi de l’Alsace-Moselle… Si l’on s’en était tenu au projet que le Gouvernement défendait cet été, il y aurait peut-être eu des divisions sur nos travées, mais le débat aurait été différent. Je ne préconise évidemment pas un retour en arrière : ce qui est fait est fait. Mais j’insiste sur le traumatisme – le terme n’est pas trop fort – qu’a représenté le changement de pied brutal intervenu à l’Assemblée nationale au début de l’été.

Le Gouvernement et plusieurs orateurs ont rendu hommage à l’action de Philippe Richert et Jean-Pierre Masseret. Tous deux avaient mené avec courage – ils ont été critiqués à l’époque – un travail de préparation qui faisait sens. Et puis, patatras !

Croyez-moi, cela a été un choc, d’autant que notre volonté d’aller plus loin s’était déjà heurtée à l’échec du référendum de 2013. Certes, nous en avons analysé les raisons, et nous sommes en train d’abandonner ce type de référendums avec des conditions impossibles à remplir. Mais il s’est passé quelque chose. Cela a été compliqué au départ, mais les citoyens ont fini par s’intéresser à cet enjeu et à s’impliquer en faveur d’une région innovante en matière institutionnelle, avec évidemment les enjeux sous-jacents que vous avez rappelés.

Tel était l’esprit qui nous animait avant ce nouveau coup de tonnerre. Ne voyez d’ailleurs pas dans mon propos une critique à l’égard de la Champagne-Ardenne ou d’autres régions limitrophes. Simplement, les deux réflexions sont différentes.

Ainsi que Gérard Longuet l’a souligné, ce texte s’inscrit dans un mercato gouvernemental qui obéit à un certain nombre de règles et de contraintes. Nous avons tous indiqué lors de la discussion générale et hier encore ce que nous pensions de la méthode consistant à mettre la charrue avant les bœufs.

Comme nous n’avons pas eu le débat de fond sur les compétences, chacun y va de sa conception. Certains, dont je ne doute pas de la sincérité, prônent de très grandes régions. D’autres – c’est notre cas, et nous ne sommes pas les seuls – ont une vision très intégrée de l’avenir des régions ; en l’occurrence, ce n’est pas une question de taille.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

Je conclus, madame la présidente.

À mon sens, comme nous savons que le projet de loi reviendra devant l’Assemblée nationale, nous devons, dans l’intérêt même de la réforme et des futures régions qui vont se constituer, aller au bout de la démarche. Suivons la perspective tracée par la commission spéciale. Il s’agit non pas de s’isoler, mais de servir de fer de lance, avec une capacité de prise de risques et d’innovation, pour les nouvelles régions de demain !

Mme Fabienne Keller applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Bigot

En effet, en termes de développement économique, l’ensemble régional visé par le sous-amendement est relativement peu soutenu par la République, qui regarde plutôt vers la mer.

Nous avons dû être les premières régions à financer nous-mêmes nos lignes TGV.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Bigot

Avec la Lorraine, la Champagne et la Bourgogne pour le TGV Rhin-Rhône !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Bigot

Nous avons effectivement des destins difficiles.

L’Alsace a la chance d’être située dans la vallée du Rhin supérieur, adossée à deux puissances économiques : la Suisse et la région du Bade-Wurtemberg. Nous avons ainsi des investisseurs, et une richesse que d’autres n’ont pas, mais qui peut se révéler fragile.

Certes, l’Alsace pourrait assurer son développement économique toute seule. Depuis plus de vingt ans, ce que l’on appelle aujourd'hui les conseils économiques, sociaux et environnementaux, ou CESER, ainsi que certains élus régionaux, dont moi, militent pour l’alliance des agences de développement économique, des agences de développement touristique… Pourtant, il en reste toujours trois. Nous n’avons pas été capables de les fusionner, même au lendemain de l’échec du référendum. Comme quoi, les choses ne sont pas toujours aussi simples.

Le Gouvernement a opté pour la méthode que notre collègue Ronan Dantec évoque souvent, celle qui consiste à simplement rapprocher les régions existantes et à ne pas tout retricoter. Dès lors, la démarche intelligente, celle qu’a eue le Gouvernement dans un premier temps, était le rapprochement de l’Alsace et de la Lorraine.

Ce n’était pas facile, a dit Jean-Marie Bockel. Mais ce n’était pas facile non plus de concevoir le pôle métropolitain entre Strasbourg et Mulhouse lorsque nous l’avons fait – c’est ainsi que l’on bâtit ! – ou de réaliser un pôle métropolitain entre Metz, Nancy, Thionville et Épinal !

On peut construire l’Histoire. Aujourd'hui, la difficulté pour moi est de comprendre comment pourrait fonctionner une très grande région, celle qui est envisagée par les auteurs du sous-amendement, ou une autre grande région qui n’y figure pas mais qui est tout de même extrêmement vaste et pour laquelle la cohérence du développement économique n’est sans doute pas suffisante.

Toutes les régions sont des régions européennes. C’est le cas de la région Rhône-Alpes : c’est la vallée dans laquelle le plus de gens circulent pour aller du Nord au Sud ou de la Méditerranée au Nord.

Je pense effectivement que cette grande région sera difficile à construire. Toutefois, mes chers collègues alsaciens, n’insultons pas l’avenir. Il nous faut veiller, pour le cas où nous devrions travailler demain avec les Champardennais ou les Lorrains – et c’est ainsi que les choses se dessinent, je le crains –, à ne pas les offenser dans ce débat !

Cher Guy-Dominique Kennel, il y a eu des sénateurs français d’Alsace ; c’était dans la période comprise entre 1870 et 1918, lorsque l’Alsace était devenue allemande. Depuis, nous sommes des sénateurs bas-rhinois et haut-rhinois. À vous, conseillers généraux du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, de réaliser l’alliance des deux départements, dans une région qui pourrait être, selon moi, l’Alsace-Lorraine. Ce sera peut-être la grande région sur laquelle on pourra construire l’agence de développement économique que vous n’avez jamais su réaliser entre le Haut-Rhin et le Bas-Rhin ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Je souhaite apporter à mon tour ma réflexion à ce débat. Une fois n’est pas coutume, j’évoquerai une question très personnelle : il se trouve que la moitié de ma famille vit en Alsace, et l’autre en Lorraine ; je me sens donc particulièrement concernée par ce sujet.

Mon groupe a proposé la suppression de l’article 1er, car il a contesté la méthode visant à modifier l’architecture de notre pays sans associer les habitants à cette opération. Nous avons souhaité que les citoyens puissent donner leur avis par référendum, et je souscris à cette demande.

Depuis un certain temps déjà, nous travaillons entre nous dans cet hémicycle à l’aide d’une paire de ciseaux. Chacun énonce, la main sur le cœur, des arguments tous aussi convaincants les uns que les autres. Qui irait dire à son voisin qu’il raconte une idiotie ? Nous nous respectons trop mutuellement pour cela, d’autant qu’après tout un argument peut en valoir un autre.

J’en viens à la Lorraine et à ses voisins. S’il est un territoire qui semblait a priori, au début de cette aventure, à l’abri des controverses, c’est bien l’Alsace-Lorraine – notre collègue Jean-Marie Bockel parle même de « coup de tonnerre ». Effectivement, d’autres propositions ont été soudainement avancées. Pourtant, le président du conseil régional de Lorraine, Jean-Pierre Masseret, et le président du conseil régional d’Alsace, Philippe Richert, avaient commencé à réfléchir ensemble. Le Gouvernement avait proposé cette option dans sa première carte. Même s’il existait des tiraillements, on s’en accommodait. Tout se passait de manière plutôt correcte.

Mais c’était sans compter sur l’imagination des uns et des autres. Au final, nous ne voyons plus très bien la ligne directrice de ce débat pour notre pays.

En fait, peu importe pour les promoteurs des grandes régions : l’essentiel est qu’elles soient grandes ! En effet, le postulat qui sous-tend cette idée est que la massification va contribuer à économiser l’argent public – plus personne ne le croit sérieusement… – et va créer de la richesse – cela n’est absolument pas démontré !

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

De tout temps, ce sont l’histoire et la géographie qui guident le développement. Les frontières administratives n’y changent rien ! Les entreprises se développent le long des fleuves, dans les vallées, sur les zones côtières, là où la population se masse – et le climat joue son rôle.

Finalement, l’Alsace veut faire cavalier seul dans un entre-soi que tous les groupes politiques, ou presque, tentent de justifier. Quelle harmonie, mes chers collègues !

Comme je l’ai souligné, on trouve toujours de bons arguments ! Je constate cependant que cette attitude est construite – elle est en effet arrivée après coup – sur le rejet de l’autre, même si vous vous en défendez. C’est dommage !

Au final, je vous proposerai volontiers de repartir du vote unanime de l’article 1er A et de passer directement au texte suivant : le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dit « NOTRe », pour que nous puissions discuter des compétences avant d’évoquer le découpage.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Il s’agit d’examiner le contenant avant le contenu, sans oublier bien entendu de consulter les populations, ce à quoi nous tenons beaucoup.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Je vous donnerai tout de même mon sentiment. Avec la Champagne-Ardenne et l’Alsace, la Lorraine a en commun trois axes structurants : la ligne TGV Est, l’A1 et l’A4, …

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

… qui relient l’Île-de-France à l’Europe. C’est l’un des arguments qui pourraient l’emporter.

Pour terminer, je souhaite dire à Ronan Dantec que son attachement à défendre l’option alsacienne m’a beaucoup étonnée, mais il a sûrement de très bonnes raisons. Quoi qu’il en soit, cette option pourrait être crédible si l’Alsace n’avait pas d’emblée envisagé d’accueillir la Moselle, laquelle se séparerait de sa région d’origine, à savoir la Lorraine ! Vous le voyez, on peut trouver à redire à beaucoup des arguments qui ont été développés ici.

À ce stade, vous l’aurez compris, je refuse d’entrer dans ce jeu qui nous entraîne dans un processus où les non-dits sont beaucoup plus nombreux que les choses dites ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.

Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Le Premier ministre nous a expliqué, notamment avant-hier – nous y sommes d’ailleurs sensibles –, la cohérence d’une réforme empreinte de clarté, de volonté, de proximité – j’en passe et des meilleures ! Comme beaucoup d’entre nous ici, mon premier grand regret est que ce énième projet de réforme territoriale nous parvienne sens dessus dessous, dépourvu de cohérence. À l’instar d’autres options gouvernementales prises depuis près de trente mois, il n’est qu’une suite de renoncements et de reniements. J’en veux pour preuve l’ensemble des projets, depuis le grand meeting de Dijon du candidat François Hollande jusqu’aux états généraux de la démocratie territoriale, ainsi que les copies – les brouillons, devrais-je plutôt dire – que vous nous avez présentées. D’ailleurs, depuis nos derniers débats sur ce sujet dans cet hémicycle – ils remontent au mois de juillet –, des évolutions ont eu lieu en dehors de toute intervention de la représentation nationale, du moins dans les enceintes parlementaires.

J’ai encore envie de me battre pour mon pays et il me reste des illusions. J’ose croire que le Parlement, notamment le Sénat, hier Grand conseil des communes de France, aujourd'hui assemblée des territoires, a non seulement une voix qui peut porter, mais également une voix qui doit être entendue, écoutée et surtout prise en compte.

Or le Premier ministre nous annonce, pratiquant une forme de chantage sympathique, que, si l’amendement n° 41 rectifié ter présenté par certains recueille l’assentiment du Sénat, le Gouvernement retirera son amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Jusqu’à présent, votre projet n’est finalement qu’une sorte de Monopoly – je l’avais d’ailleurs souligné au début de l’été. Pour poursuivre dans l’œcuménisme politique, une grande personnalité féminine du nord de la France, plutôt située à gauche sur l’échiquier politique, a affirmé la même chose, même si elle s’arrange pour faire de son côté son petit Monopoly à elle…

Quoi qu’il en soit, je souhaite que nous ayons une réflexion plutôt sur la stratégie à mettre en œuvre et surtout sur votre projet. Quel est l’objectif de celui-ci ? Michel Raison l’a souligné avec justesse, quand on défend un projet pour le territoire, il faut articuler entre les collectivités – finalement, vous n’avez pas choisi –, évaluer quelle force on donne au projet, définir son sens et sa dynamique, car nous avons bien compris qu’il s’agissait d’une compétition à la fois entre les pays, mais aussi à l’intérieur de nos territoires. Comment conforte-t-on aujourd'hui nos territoires ? Quelle est, dans ce projet de réorganisation territoriale, la force de nos économies qui s’appuient sur des zones démographiquement dynamiques ? Ce qui apparaît parfois comme un élément comptable doit être aussi et avant tout pris en compte puisque nos concitoyens choisissent de s’implanter dans les territoires où ils travaillent lorsque ceux-ci font preuve de dynamisme.

La question de l’échelle n’est pas tout, celle de la taille n’est pas suffisante, de même que le nombre. Messieurs les secrétaires d'État, redites-nous aujourd'hui clairement quelle est la stratégie du Gouvernement. Vous nous proposez uniquement une chaîne d’arpenteur sans même nous annoncer quelles compétences ces régions, quelle que soit leur taille, exerceront vraiment. Nous avons besoin de clarté. Or, pour l’instant, vous nous laissez dans le brouillard ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Adnot

J’ai cosigné l’amendement n° 41 rectifié ter de M. Leroy, car il est important que nous réfléchissions à la situation.

Debut de section - Permalien
Un sénateur du groupe Ump

On n’en est pas là !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Adnot

Certes, mais le sous-amendement n° 146 vise à modifier l’amendement n° 41 rectifié ter. Si vous le permettez, je m’exprimerai donc sur ce sujet.

Je commencerai mon propos par une remarque. Hier soir, nous avons entendu dire que les parlementaires n’avaient pas à s’occuper des affaires des Alsaciens, que ces derniers étaient libres de décider ce qui était bon pour eux. Je rappelle que nous sommes des élus non pas régionaux, mais nationaux. §En tant que tels, nous avons la responsabilité d’examiner globalement la situation. Je me sens donc en droit de discuter aussi bien de ce qui se passe en Aquitaine, en Bretagne, qu’en Midi-Pyrénées ou ailleurs encore !

Je veux dire à mes amis alsaciens que j’apprécie les conditions dans lesquelles se déroule le débat. Nous ne sommes pas en train de nous insulter, chacun expose sa position et nous déciderons ensuite.

Aujourd'hui, ce qui nous gêne, c’est que l’Alsace avait pris une disposition pour créer une collectivité nouvelle. Or elle considère que, si elle s’insère dans une grande région Est, elle ne pourra pas mettre en place cette structure.

Il me semble qu’on mélange là deux dossiers très différents. Certes, il s’agit de créer une collectivité nouvelle rassemblant les compétences des deux départements et de la région, mais cela peut très bien s’opérer à l’intérieur d’une grande région Est. De la même façon, dans les grandes régions, des métropoles vont pouvoir s’organiser en récupérant à peu près la totalité des compétences des départements.

Il serait d’ailleurs bon, monsieur le ministre, que vous éclairiez le débat en nous annonçant que, avec le Grand Est, il sera possible à l’Alsace de mettre en place son projet, de fusionner ses deux départements et de garder la responsabilité de l’ensemble.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Adnot

La Savoie et la Haute-Savoie ont elles aussi envie de le faire.

En disant les choses clairement, on rassurerait les Alsaciens sur la capacité d’avoir des responsabilités organisées, de rassembler leurs deux départements, de pouvoir exercer des compétences, à l’instar des métropoles qui pourront le faire en vidant pratiquement les régions et les départements de l’ensemble de leurs responsabilités sur leur territoire.

Le but, en créant les grandes régions, c’est de leur confier la gestion des grandes infrastructures. Par exemple, la construction du TGV Est incombera naturellement au Grand Est, de même que l’ensemble des équipements de cette nature. Selon moi, en raison de la subsidiarité, l’Alsace pourra s’organiser en conservant toutes les compétences de ses deux départements, et le Grand Est traitera, lui, des grands sujets. La Champagne, l’Alsace et la Lorraine ne se sont-elles pas rassemblées autour d’un cancéropôle afin d’aborder cette question dans toute sa dimension ?

Nos amis alsaciens peuvent croire en ma sympathie pour eux : c’est d’ailleurs dans l’Aube qu’est installé le plus grand choucroutier d’Alsace ! §Je voudrais que les Alsaciens soient convaincus qu’ils pourront réaliser leur communauté de destin entre les deux départements et la région à l’intérieur du Grand Est. Je suis certain que nous ferons des choses intéressantes ensemble !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

En cet instant, je souhaite replacer dans son contexte le sous-amendement n° 146 et le justifier brièvement.

Je rappelle qu’il répond à une philosophie qui aurait dû être celle de la réforme : réaliser de grandes régions stratèges, à partir d’une reconfiguration des départements – au nombre de quarante ou cinquante –, laquelle aurait ensuite permis une mise en réseau des régions. Ce n’est pas le choix qui a été retenu, comme je l’ai déjà précisé.

En réalité, le présent sous-amendement a deux sortes d’adversaires. J’emploie le mot « adversaires »…

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Tout à fait, mon cher collègue !

Il y a tout d’abord les partisans d’une Alsace seule, dont je respecte tout à fait la conception, que sous-tend la liberté de disposer de son propre destin. Toutefois, je relève que cette approche est tout aussi opposée à l’esprit du projet de loi que le concept des grandes régions.

Il y a ensuite ceux qui, en quelque sorte, préemptent l’issue du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République qui attribue aux régions des compétences de proximité. C’est la principale erreur introduite dans ce texte, car si l’on donne de telles compétences aux régions, mieux vaut qu’elles ne soient pas trop grandes. Ce projet de loi n’étant pas encore voté, nous pouvons peut-être espérer à cet égard.

Je formulerai maintenant trois raisons de souscrire au présent sous-amendement.

Premièrement, il me paraît plus opportun d’envisager pour le futur une évolution vers une taille XXL, ce qui permettra plus facilement une mise en réseau des territoires et un fonctionnement en bonne intelligence.

Deuxièmement, je pense que la proposition que Bruno Sido et moi-même soumettons au Sénat correspond beaucoup plus à ce que souhaitent les populations que je qualifierai d’« intermédiaires ». À titre d’exemple, mon département est situé en région Champagne-Ardenne mais je me sens plus bourguignon que champenois. De même, notre collègue Michel Raison, sénateur de Haute-Saône, a tout à l’heure évoqué ceux qui sont partagés entre le nord et le sud de son département. Or plus les régions seront larges, moins ces populations seront en déshérence, car elles s’inscriront dans un cadre mieux défini. Les limites actuelles de nos départements, qui ont été fixées voilà longtemps, ne sont plus adaptées à la réalité d’aujourd'hui.

Troisièmement, au final, si nos amis alsaciens font scission, nous aurons deux régions, Champagne-Ardenne – Lorraine et Bourgogne – Franche-Comté, qui ne seront pas suffisamment fortes pour faire entendre leur voix, et je crois qu’elles le regretteront.

Cela étant, et pour terminer sur une note consensuelle, comme l’ont souligné bon nombre d’entre vous, mes chers collègues, je pense que nous finirons par mettre en réseau ce très Grand Est, puisque, chacun en convient, y compris les élus alsaciens, nous allons y travailler ensemble. Et même si ce sous-amendement n’est pas adopté, ce que je crains, ses dispositions s’imposeront avec le temps.

Le sous-amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean-Pierre Masseret, pour explication de vote sur l'amendement n° 41 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Masseret

Hier, le ministre de l’intérieur m’a demandé de retirer l’amendement n° 66 visant à regrouper l’Alsace et la Lorraine, en sollicitant mon adhésion à l’amendement n° 41 rectifié ter. Je ne puis lui donner satisfaction.

Pour la définition de la carte, le président de la région Lorraine que je suis a un plan A depuis l’origine – je l’ai déjà exposé –, à savoir la fusion de l’Alsace et de la Lorraine, telle que le Gouvernement l’avait initialement proposée.

Le plan B consiste à souscrire à la proposition de regroupement des régions Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine. Le problème est que le plan B va être soumis au vote avant l’examen du plan A. Je vais donc m’abstenir sur l’amendement n° 41 rectifié ter et maintiens l’amendement n° 66, que je voterai évidemment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Mes chers collègues, je tiens à vous remercier du climat apaisé – je m’en félicite – qui préside à l’examen du présent amendement qui a pu déchaîner les passions. Je remercie de leurs contributions – je pense aux Champenois-Ardennais, notamment à Charles Guené, aux Alsaciens, aux Lorrains, aux Francs-Comtois – ceux qui ont apporté leur pierre avec passion – la passion est naturelle et ne me choque en rien –, mais sans excès.

Monsieur le ministre, vous avez retiré l’amendement que le Gouvernement avait déposé, ce qui m’a surpris et fait réagir, ainsi que d’autres collègues, particulièrement le président Jacques Mézard. Je tiens à vous le dire, l’habileté du procédé ne nous a pas échappé.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

(Exclamations et applaudissements sur les travées de l'UMP.) Je voulais filer la métaphore de la confession de Jean-François Husson !

Sourires sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

En agissant ainsi, vous avez fait « l’oblique génuflexion des dévots pressés », comme l’aurait dit Flaubert. §

Cela étant, je voudrais récuser un argument que vous avez utilisé hier soir selon lequel l’Alsace seule ne peut être le siège de la capitale européenne. À ce compte-là, il faudrait absorber aussi l’Île-de-France pour conforter le statut européen de la capitale alsacienne !

Je rappellerai que Genève, qui est l’une des capitales internationales, est située dans un petit canton suisse

M. Michel Bouvard s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

La taille, comme le disait tout à l’heure notre excellente collègue Évelyne Didier, ne fait rien à l’affaire. En effet, si l’on compare les États américains, on constate que plus de quarante d’entre eux ont une population inférieure à celle de l’Île-de-France.

Pour revenir à la question sur laquelle nous allons nous prononcer dans quelques instants, à savoir une Alsace seule ou au sein d’une grande région, je suivrai l’avis de la commission spéciale pour trois raisons. Ceux d’entre vous, mes chers collègues, qui ne sont pas de cet avis ne m’en voudront pas j’espère.

Tout d’abord, au nom de quoi contraindrait-on des élus et une population qui a largement approuvé par référendum l’idée d’une collectivité unique ? Au nom de quoi érigerait-on un principe supérieur à cette volonté locale pour faire obstacle à la liberté ? Nous savons fort bien, mes chers collègues, que les mariages forcés débouchent toujours sur des divorces programmés.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Ensuite, comme je l’ai dit, mardi dernier, en répondant au Premier ministre, la réforme territoriale ne doit pas être un grand jardin à la française. Parce que la modernité l’impose, on doit être capable d’assumer une diversité. Si un territoire de France veut inventer une nouvelle organisation amalgamant une région et des départements, on peut envisager cette expérimentation avec, si ce n’est sympathie, au moins bienveillance.

Enfin, j’évoquerai la question de l’identité.

Mon département est doté d’une très forte identité. J’ai entendu l’argument que certains se sont jeté au visage : l’identité, c’est le passé, il faut se méfier de cette notion. Or, en France, le mépris du passé a bien souvent alimenté les peurs de l’avenir. À l’ère de la mondialisation, accepter que celle-ci soit le grand bain de l’uniformité, c’est être tous perdants.

Les identités, lorsqu’elles restent ouvertes, sont des moteurs extraordinaires de développement. Dans mon département, plus de 1 000 entreprises ont choisi d’intégrer dans leur dénomination le mot « Vendée » parce que cela les distingue sur les marchés, qu’il s’agisse du marché domestique français ou des grands marchés internationaux. Pourquoi ne pas le reconnaître ?

Enfin, mes chers collègues, vous savez parfaitement que l’altérité n’est pas contradictoire avec l’identité, au contraire. Si nous étions les mêmes, il n’y aurait pas d’altérité. L’altérité suppose aussi l’identité, à la condition, bien entendu, que celle-ci reste ouverte au monde, aux autres, et c’est la conception, me semble-t-il, de nos amis alsaciens.

En conclusion, je souligne que nous vivons depuis des années avec des régions aux limites imparfaites. Cela ne nous a pas empêchés de travailler pour l’avenir. J’espère que ces questions de frontières seront rapidement oubliées et que l’on en viendra très vite aux compétences, c'est-à-dire au contenu, de manière que nous puissions nous projeter vers l’avenir.

Voilà ce que je voulais dire à ce moment d’un débat qui est important pour nous tous. §

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur

Monsieur Retailleau, je voudrais vous apporter plusieurs éléments de réponse.

D’abord, je ne suis pas un adepte de la « génuflexion oblique des dévots pressés ».

Rires.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur

Ensuite, hier, j’ai indiqué qu’il n’y a pas d’antinomie entre l’identité et la réalisation de grandes régions, et je suis convaincu que l’Alsace ne perdrait en rien son identité si, demain, elle s’intégrait dans une grande région. De la même manière qu’il n’y a pas d’incompatibilité entre le fait d’appartenir à une région et de s’ouvrir à d’autres en restant soi-même, il n’y a pas non plus nécessairement de logique qui voudrait que l’on perde son identité en s’intégrant dans des ensembles plus vastes. Votre argument est donc juste mais il est tout à fait réversible.

Comme nous pouvons raisonner de deux manières différentes sur cette question en ayant tous les deux raison, ne nous querellons pas inutilement !

Je voudrais maintenant insister sur le rôle de Strasbourg, qui est selon moi essentiel. Je reprends d'ailleurs pleinement à mon compte le propos très juste et extrêmement fort, dont la représentation nationale peut s’inspirer, qu’a tenu Gérard Longuet tout à l’heure : d’une part, l’Alsace ne retirerait rien à son âme en s’intégrant dans un ensemble plus vaste ; d’autre part, le statut de capitale européenne de Strasbourg se trouverait conforté, je le crois profondément, si cette ville devenait capitale d’une région Grand Est. Ainsi s’ouvrirait un pont vers un certain nombre de régions allemandes avec lesquelles, dans le cadre de coopérations transfrontalières, des habitudes de travail ont été prises.

Enfin, on ne peut pas à la fois reprocher au Gouvernement de présenter des amendements qui ne tiennent pas compte des propositions du Sénat et critiquer son « habileté » quand il se rallie à un amendement présenté par plusieurs des membres de votre groupe, monsieur Retailleau – parmi lesquels se trouvent d’éminents sénateurs, notamment François Baroin –, et non par l’ensemble de la majorité.

Le Gouvernement a retiré son amendement au profit de l'amendement n° 41 rectifié ter parce qu’il respecte le travail accompli par les membres de votre groupe qui l’ont signé, bien que ceux-ci ne partagent pas nos convictions. Dire que, ce faisant, nous sommes dans l’habileté, non !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Nous sommes dans la coproduction, dans la recherche du compromis, car nous avons la volonté de travailler avec vous. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Je propose que nous ne nous livrions pas à de mauvaise polémique sur ces sujets, que nous ne nous prêtions pas mutuellement de l’habileté. Même si je veux bien reconnaître que ni vous ni moi n’en sommes nécessairement dépourvus, vous pouvez accepter qu’elle ne soit pas la seule modalité qui guide notre parole et notre action lorsque nous sommes dans l’espace public, défendant nos convictions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. René Vandierendonck, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

M’exprimant au nom du groupe socialiste, je tiens à saluer la méthode retenue par le Gouvernement, à savoir donner la parole au Sénat et être à l’écoute de ses propositions. Nous avons choisi de voter pour le présent amendement non par habileté, mais par sincérité.

En effet, vous pouvez comprendre, mes chers collègues, que, pour certains membres de mon groupe, être à l’écoute des propositions du Gouvernement, c'est préférer la première proposition que celui-ci a faite, comme l’a expliqué mon ami Jacques Bigot et comme l’exprimeront de nombreux sénateurs du Nord – Pas-de-Calais.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Monsieur le ministre, vous êtes d’accord avec le Sénat quand il est lui-même d’accord avec vos propositions ! Donner l’impression que le Gouvernement est prêt à dialoguer avec le Sénat alors que c'est uniquement si celui-ci vote ce que vous souhaitez, c'est une gigantesque hypocrisie ! Je trouve tout de même cela exagéré !

Il serait préférable que le Gouvernement assume clairement sa position. Dans l’affaire qui nous occupe, il veut manifestement bloquer la position de la commission spéciale du Sénat. Mais on trouvera toujours dans cette enceinte quelques sénateurs pour présenter tel ou tel amendement…

Mes chers collègues, depuis trois jours, le principal reproche qui est fait au Gouvernement, c’est de vouloir forcer la main des collectivités territoriales, de refuser le dialogue, d’empêcher l’expression des souhaits des populations locales.

Je suis tout de même quelque peu stupéfait de voir que, après avoir adressé, avec insistance, ce reproche au Gouvernement, certains membres de notre assemblée font exactement la même chose en voulant forcer la main de nos collègues alsaciens !

Comment voulez-vous sérieusement reprocher au Gouvernement de ne pas écouter, de n’en avoir rien à faire de nos propos, de ne pas faire de concertation – tout cela est vrai ! –, si, dans le même temps, alors que nous avons la possibilité de prendre en compte les souhaits de ceux qui sont sur le terrain, on leur fait un bras d’honneur et on leur dit d’aller se faire voir ?

Dans ces conditions, voter cet amendement, c’est en fait donner raison au Gouvernement. Pourquoi n’aurait-il pas le droit de faire comme certains d’entre nous, qui se sont montrés très durs à son égard, lui reprochant de ne rien écouter, et qui font aujourd'hui exactement la même chose ? Ils pourraient être ministre de l’intérieur !

Il y va de la crédibilité du Sénat. Si nous, sénateurs, nous forçons la main aux Alsaciens, nous serons ensuite mal placés pour nous plaindre du Gouvernement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Alain Joyandet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Joyandet

Mon explication de vote vaudra pour tous les amendements qui tendront à modifier la position de la commission spéciale. Au fond, nous sommes dans une situation particulièrement compliquée.

Je voudrais d’abord expliquer pourquoi je me suis abstenu lors du vote du sous-amendement n° 146. En tant que Franc-comtois, je n’ai rien contre une grande région, ni d’ailleurs contre une petite ! Je n’ai rien non plus contre le fait de fusionner la région et les quatre départements, comme je l’ai dit hier dans mon intervention. Une fois n’est pas coutume, je rejoins Jean Louis Masson : un certain nombre de propositions de nos collègues ressemblent fort à ce que le Gouvernement a fait. En quelques heures, nous voudrions nous aussi, chacun avec notre solution, réécrire une carte, ce qui est particulièrement complexe…

Je le répète, je souhaite en rester au texte de la commission spéciale, même si je n’ai absolument rien contre les propositions de mes collègues. Je trouve d’ailleurs que ce temps d’explication est utile, car c’est peut-être l’un des rares moments où chaque parlementaire, en faisant preuve de respect, a pu exprimer, selon ses convictions, ses idées pour sa région et ses concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Joyandet

Et nous ne pouvons que constater que la précipitation gouvernementale a créé un manque de débats, d’explications.

L’exercice est très limité : nous faisons, là aussi, la démonstration que si nous voulions tous nous mettre d’accord pour élaborer une carte, ce sont nos petits-enfants qui auraient une chance de la voir !

Nous avons chacun nos convictions, qui doivent toutes être respectées. Néanmoins, à ce stade de la compétition, si je puis m’exprimer ainsi, si l’on veut en rester au texte de la commission spéciale élaboré par des représentants de tous les groupes siégeant dans cet hémicycle, nous sommes quasiment obligés de voter contre les amendements de nos amis. Cela ne nous réjouit guère, mais si nous nous abstenons, une minorité fera adopter des amendements contre une majorité qui veut s’en tenir à la position de la commission spéciale.

Mes chers collègues, je voterai donc contre tous les amendements qui s’éloignent de la position de la commission spéciale, par pure cohérence, même si je n’ai absolument rien contre les convictions de leurs auteurs et les solutions qu’ils proposent, dont ils estiment qu’elles sont meilleures que celle du Gouvernement.

Cette démarche législative, plutôt originale, est, dans le même temps, contraignante. Nous sommes partis de la contrainte du fameux entonnoir, nous allons y rester jusqu’au bout ! Au fond, la solution de simplicité, c’est de rester droit dans ses bottes et de suivre la position de la commission spéciale. Autrement, on ouvre la boîte de Pandore et on ne sait pas du tout ce qui sortira de votes divers et variés, en fonction des amendements qui seront adoptés. On risque d’aboutir à un résultat totalement hybride. Je suis un adepte de la génuflexion non pas oblique, mais plutôt verticale, en bon fidèle, loyal – pas dévot ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean-Marie Bockel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

J’interviens au nom de la plupart de mes collègues du groupe UDI-UC, et sur un ton moins véhément que celui de mon collègue Jean Louis Masson, lequel a pourtant rappelé quelques vérités.

Monsieur le ministre, le fait que vous ayez immédiatement répondu à Bruno Retailleau à la suite de son intervention, puissante, m’a fait penser à un mot : touché ! L’argumentation a porté et a été finalement plus forte que les arguties.

Je voudrais dire, sans aucune agressivité et avec beaucoup de respect, car, au fond, cela nous permet de remettre les choses en perspective, que nous devrions tous balayer devant notre porte.

Sur le sujet dont nous débattons, je l’indiquais précédemment, le Gouvernement a tout de même souvent varié. Au début de l’été, nous avons d’ailleurs été pris de court par un changement de pied brutal. Qui nous dit, monsieur le ministre, que votre position d’aujourd’hui, par-delà l’habilité qui a été évoquée, est totalement intangible ?

Si je formule cette remarque, c’est parce le match n’est pas joué, le débat n’est pas terminé ! Plusieurs de nos collègues ont dit, en toute bonne foi et sincérité, qu’il fallait anticiper ce qui allait se passer à l’Assemblée nationale et se préparer à une situation inéluctable. Non ! À chaque jour suffit sa peine ! La discussion a lieu au Sénat. Nous connaissons la position actuelle du Gouvernement, nos idées respectives, mais le débat doit se tenir, car il n’est pas terminé.

D’une certaine manière, le sujet que nous examinons est le sujet par excellence pour un Sénat qui veut retrouver pleinement sa place et son influence. C’est dans cet esprit-là que la commission spéciale a travaillé. Ce qui est en jeu aujourd’hui, au travers de la position qu’adoptera in fine le Sénat, c’est la réaffirmation de notre assemblée.

C'est dans le débat démocratique que se jouera le rapport de forces, au sens le plus républicain du terme : dans les discussions que nous aurons avec nos collègues députés d’ici à l’examen du présent texte en deuxième lecture par l’Assemblée nationale, avec l’exécutif, bien entendu, dans le respect, mais avec force, également entre nous, entre l’opposition et la majorité et à l’intérieur des différents groupes qui constituent nos assemblées. Tout cela est encore devant nous ; l’affaire n’est pas terminée. La discussion que nous avons aujourd’hui et le vote que nous émettrons tout à l’heure – c’est en quelque sorte le nœud du débat – sont extrêmement importants.

Nos prises de position et nos décisions nous permettent de répondre à une question à laquelle ceux d’entre nous qui sont allés sur le terrain pour défendre leur candidature à l’élection ou à la réélection à la Haute Assemblée ont été constamment confrontés – pour ma part, je l’ai entendu des centaines de fois : à quoi sert le Sénat à l’heure actuelle ? Va-t-il de nouveau jouer son rôle d’assemblée des territoires ? Voilà ce qui est attendu de nous et en train de se jouer en ce moment.

Donc ne faisons pas comme si ce débat était inutile eu égard au rôle final de l’Assemblée nationale. Nous sommes dans notre rôle ! Ce que nous faisons en ce moment est important et, je le répète, la partie n’est pas jouée ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. François Grosdidier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

Mes chers collègues, je voudrais d’abord écarter complètement la question de savoir si Strasbourg restera capitale européenne. Là n’est pas le sujet ! On sait très bien que Strasbourg restera capitale de l’Europe si l’État français défend avec suffisamment de persuasion cette position auprès de nos collègues européens.

Cela étant, le président du conseil général de Vendée, département à forte identité, a magnifiquement défendu cette idée d’identité, qui est légitime, mais qui peut s’exprimer aussi dans un cadre départemental, à l’intérieur d’une région qui pourtant n’en a pas, dès lors que cette collectivité conserve des compétences économiques, touristiques, culturelles et qu’elle ne devient pas simplement un super bureau d’aide sociale. De la même façon, l’Alsace dans une grande région pourrait défendre au moins autant son identité que la Vendée peut le faire en Pays de la Loire aujourd’hui.

Ensuite, comme beaucoup de Lorrains, je ne peux pas suivre la position de la commission spéciale. Avec Gérard Longuet, François Baroin et tous mes collègues des départements lorrain, champenois et ardennais, je veux réfuter l’argument selon lequel l’amendement n° 41 rectifié bis deviendrait suspect parce que le Gouvernement en a présenté un identique. Cela vaudrait même tout d’un coup adhésion à la réforme instaurant les grandes régions !

Nous sommes nombreux à être opposés aux grandes régions. Mais en vertu de la règle de l’entonnoir et en raison de la nécessité pour le Sénat d’être partie prenante aux débats, la majorité sénatoriale et la commission spéciale estiment qu’il s’agit non plus de revenir à ce que nous aurions souhaité, c’est-à-dire l’approfondissement des régions, mais de nous inscrire dans un schéma de grandes régions. Nous le faisons à contrecœur, mais en cherchant au minimum à assurer une cohérence entre ces grandes régions. Il serait bon que le Gouvernement propose une carte cohérente avec l’idée qu’il défend, qui n’était pas la nôtre initialement, mais que la majorité sénatoriale nous demande d’accepter.

Aujourd’hui, on nous incite à modifier la carte pour permettre à certaines régions – l’Alsace, la Bretagne – de vivre une vie solitaire, en rompant avec les régions limitrophes sans lesquelles une grande région n’a pas de sens.

Une grande région de l’Est avec la Lorraine mais sans l’Alsace est insensée. Au reste, les Lorrains ont au moins autant de raisons que les Alsaciens – les mêmes, pour la plupart – de demander l’approfondissement de leur région plutôt que son élargissement. Or le texte issu des travaux de la commission spéciale ne le permet pas.

Au fond, ceux qui appellent au rejet de l’amendement n° 41 rectifié ter nous demandent de souscrire à un texte dont nous ne nous satisfaisons pas, pour permettre à d’autres d’échapper à ce que nous ne voulons pas… Cette situation n’est pas tenable. Elle n’est, bien sûr, pas défendable territorialement, et, de surcroît, elle n’est même pas cohérente, ni intellectuellement, ni politiquement, ni philosophiquement.

Mes chers collègues, nous vous prions donc de voter en faveur du présent amendement. Je le répète, ses auteurs ne soutenaient pas le projet du Gouvernement et auraient préféré approfondir la construction régionale actuelle plutôt que de l’élargir. Cela étant, animés par un esprit de compromis, ils considèrent que, tant qu’à découper de grandes régions, il faut le faire avec une certaine cohérence pour que cette réforme puisse avoir un sens et s’applique sur l’ensemble du territoire.

Au-delà de la question de l’autonomie de l’Alsace, nous sommes déjà passés, hier soir, à côté de certaines réformes. Nous avons maintenu un conseil général et un conseil régional dans les départements et régions d’outre-mer, sur un même territoire. Cela n’a pas de sens ! Nous avons maintenu, en Corse, un conseil régional et deux conseils généraux.

Dès lors, dessinons au moins sur le continent une carte qui ait un minimum de cohérence, pour construire, par le biais des lois qui vont être adoptées ultérieurement, une réforme qui ait un sens, une réforme qui, sans consacrer l’uniformité de toutes les régions, leur donne, à toutes, des chances égales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote.

Debut de section - Permalien
Un sénateur du groupe Ump

Un sorcier !

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Voilà quelques jours, vous déposiez un amendement, pour rétablir, par la force, cette carte, qui est votre seul objectif. Puis, en l’espace d’une nuit, vous l’avez très habilement fait disparaître du dérouleur, nous laissant face à un autre amendement, celui de l’UMP, que nous examinons actuellement et que vous soutenez.

Non, monsieur le ministre, vous ne faites pas confiance au Sénat. Vous avez voulu imposer votre carte, et le retrait de votre amendement n’est qu’un élément tactique, qui vous permet, en cet instant, de tenir ce discours. Mais les faits sont là…

Je veux maintenant évoquer Strasbourg, capitale européenne – c’est un vrai sujet –, qui fait l’objet non de déclaration, mais de preuves d’amour ! §Or le montant du contrat triennal voté à l’automne 2012, que vous avez évoqué hier, est deux fois et demie plus faible que le celui du contrat précédent… Au-delà des déclarations, le Gouvernement doit donc encore faire la preuve de la force de son amour pour Strasbourg l’Européenne.

Enfin, chers collègues de Champagne, des Ardennes et de Lorraine, il est vrai que nous avons plaisir à rappeler ce qui nous unit. Ce qui nous rassemble, ce sont de belles choses ! Il ne s’agit pas d’ériger des murailles entre nos régions. Ensemble, nous avons construit le formidable TGV Est, qui a désenclavé nos territoires. Nous avons tous participé à sa mise en œuvre et à celle de ses dessertes vosgiennes, non seulement financièrement, mais aussi pour lui donner du sens, permettant ainsi à Charleville-Mézières et au territoire de la Meuse d’être désenclavés.

Avec nos amis vosgiens, nous savons soutenir les projets du massif des Vosges. Avec nos amis lorrains, nous savons porter le cancéropôle et encore bien d’autres projets qui ont du sens. Il ne s’agit donc pas en l’espèce d’arrêter tout projet ou de mettre un terme à toute volonté de coopération. Il s’agit de tenir compte du fait que, depuis plusieurs années, l’Alsace porte un projet. Celui-ci a mis du temps à mûrir. Les esprits ont évolué, et ce projet s’est enrichi. Cette démarche au long cours en croise une autre beaucoup plus récente, celle qu’a engagée voilà quelques mois le Gouvernement, dont la mise en œuvre nécessite l’adaptation du présent projet de loi à laquelle vous invitent les auteurs de l’amendement n° 41 rectifié ter.

C’est dans cet état d’esprit, mes chers collègues, que je vous prie de rejeter cet amendement. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

J’ai annoncé tout à l'heure que je voterai contre l’amendement n° 41 rectifié ter. Vous me permettrez d’intervenir maintenant pour vous en donner les raisons.

Selon moi, cet amendement est inacceptable, sur la forme comme sur le fond.

Sur la forme, son exposé des motifs évoque « la fausse bonne idée de donner à l'Alsace la facilité d'exprimer son particularisme », une volonté de s’isoler, de « promouvoir […] les replis identitaires »… Vous comprendrez qu’un Alsacien ne puisse qu’être frappé, choqué et, même – je n’hésite pas à le dire –, blessé à sa lecture !

Comme nous avons essayé de le démontrer tout à l'heure, il ne s’agit en aucun cas de particularisme, d’un repli identitaire, d’une volonté d’entrer dans un splendide isolement ; au contraire ! Je voudrais que vous le compreniez, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues. Il s'agit de créer une collectivité territoriale unique, en supprimant un niveau de collectivité. Il s'agit de simplifier l’organisation administrative et politique. Il s'agit de faire des économies – parce que nous pourrons en faire ! Il s'agit, surtout, de gagner en compétitivité et de permettre à l’Alsace de jouer le rôle de poste avancé en Europe, pour le développement de notre pays. Vous le voyez, nous sommes loin des motifs invoqués…

Bien entendu, j’ai noté, comme d’autres, que nous ne pouvons plus nous exprimer sur l’amendement du Gouvernement, puisque cet amendement a été retiré. Mais, hier, nous avons eu le temps de le lire, et le retour de l’Alsace dans la grande région que vous souhaitez, monsieur le ministre, avait pour seule motivation votre volonté de limiter le nombre de régions à douze, plutôt qu’à quatorze… C’était écrit noir sur blanc dans l’exposé des motifs ! Si vous me permettez cet euphémisme, une telle motivation est pour le moins surprenante.

À nos yeux, il n’est pas question de limiter le débat à un problème d’arithmétique : il y va de l’avenir de l’Alsace, il y va de l’avenir et de la dynamique d’une région au sein de notre pays et, vous l’avez compris, il y va de l’avenir du développement de la France au sein de l’Europe.

Sur le fond, en prolongement de ce que j’ai déjà déclaré hier et tout à l'heure, je veux répéter à mes collègues soutenant l’amendement n° 41 rectifié ter que la création d’une grande région telle qu’ils la prévoient n’est pas le bon choix.

Expliquez-nous une fois pour toutes ce que cette grande région apportera de plus par rapport aux régions actuelles ! Pourquoi vouloir une intégration de ces régions ? Je vous renvoie à ce que vient de dire Fabienne Keller : même si nous nous trouvons des points communs, des atouts communs, même si nous faisons face à des difficultés communes – nous ne devons pas nous les cacher –, la coexistence d’une collectivité régionale alsacienne à côté de la région Champagne-Ardenne – Lorraine – solution que nous vous proposons et que défend la commission spéciale – ne nous empêchera pas de continuer à travailler ensemble, comme nous l’avons fait par le passé !

Dès lors, qu’apporterait de plus une grande région ? Comment peut-on estimer que transférer aux régions la gestion de tous les collèges ou celle de plus de 400 000 kilomètres de voirie départementale entraînera une amélioration qualitative et non, à l’inverse, une détérioration ? Sans compter, mes chers collègues, les difficultés de toutes sortes – organisationnelles, financières, immobilières – qui découleront des fusions réalisées et qui handicaperont sans doute pour de longues années la capacité de nos régions à définir et à mettre en œuvre les actions dont elles ont la responsabilité et que les habitants attendent d’elles.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous appelons à maintenir la position de la commission spéciale et à voter contre cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gremillet

Alors que mon mandat de sénateur ne fait que commencer, j’ai, depuis le début de cette discussion, un vrai sentiment de gâchis. En effet, je le répète à mon collègue qui préside le conseil régional de Lorraine – j’ai déjà eu l’occasion de le lui dire en tant qu’élu de cette région –, c’est comme si nous avions affaire à un chef d’entreprise nous annonçant son intention de construire un énorme bâtiment, sans savoir ce qu’il veut en faire. Tout cela parce que l’on n’a pas eu le courage de lier l’examen de l’espace territorial souhaité avec celui des missions et des compétences qu’on voulait lui confier… Cependant, on aurait gagné en efficacité et, surtout, en transparence et en lisibilité, au bénéfice des populations que nous représentons.

Ceux et celles d’entre nous qui viennent d’être élus ont beaucoup dialogué avec les représentants des territoires, les ont beaucoup écoutés. De ces échanges, il est ressorti que les communes avaient besoin de lisibilité, besoin de savoir quelle serait leur place dans la configuration à venir. Il est apparu également la nécessité de garder les départements, échelon de proximité, tout en clarifiant les compétences des uns et des autres.

Si je respecte le travail de la commission spéciale, je rappelle que le texte qui nous est présenté aujourd'hui a été réalisé avant que le Premier ministre et les ministres ne s’expriment. À l’époque, nous nous demandions tous quelle allait être la place de la commune, quelle serait celle des départements... Depuis, nous avons obtenu un certain nombre de réponses. Nous nous retrouvons donc dans un autre schéma. À cet égard, je pense que la position de la commission spéciale aurait aussi pu s’enrichir des éléments nouveaux que nous a communiqués le Gouvernement, lesquels donnent à la réforme une autre dimension.

À titre personnel, en tant qu’élu vosgien, je dois dire que le regroupement de l’Alsace et de la Lorraine m’allait très bien ! Mais, dès lors que l’on conforte le fait communal et la place du département, on peut imaginer des espaces différents. Dans ces conditions, et je rebondis sur ce que Gérard Longuet a brillamment déclaré, ce que souhaitent nos amis alsaciens est tout à fait possible, dans un espace nouveau, qu’il nous faut construire.

Respectons celui qui, dans cette enceinte, revendique l’identité de sa région – qu’il s’agisse ou non de l’Alsace – et exprime son besoin de proximité. Je le dis avec force ! Malgré les raisons et malgré les passions, respectons-nous les uns les autres, car nos racines sont ancrées au plus profond de nous-mêmes ; ce sont de vraies valeurs !

En présentant cet amendement, nous exprimons donc le souhait de nous retrouver autour de cette considération : oui, il existe une place, réaffirmée, pour la commune et une place pour des départements et, oui, il nous faut construire de nouveaux espaces de travail et de structuration des territoires.

Je l’ai indiqué hier et je le répète, je ne voudrais pas m’exprimer seulement en tant qu’élu du massif des Vosges, alors que le Sénat est le représentant des collectivités et des territoires, mais il me semble difficile d’imaginer que le massif vosgien ne puisse se retrouver dans une même entité régionale et soit déchiré entre l’Alsace et la Lorraine, voire entre la Lorraine et la Champagne-Ardenne. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

La question de l’Alsace et de la Lorraine est, hélas, dans notre pays, vieille comme le monde ! En tout cas, elle se pose depuis très longtemps et son poids a toujours été considérable.

À cet égard, il me semble très important que les élus de l’Alsace ou de la Lorraine ne soient pas les seuls à s’exprimer sur le sujet. Il y va de l’unité de la France, de l’égalité républicaine et de l’idée que l’on se fait du futur équilibre territorial de notre pays.

Je peux comprendre que des collègues d’une région donnée, qu’elle s’appelle l’Alsace ou porte un autre nom, considèrent le cadre de leur région actuelle comme le bon espace pour développer la solidarité, apporter une contribution pleine et entière à la France et préparer l’avenir. Je le conçois, même si je ne partage pas forcément cette position.

En revanche, permettez-moi de vous dire, mes chers collègues alsaciens, que certains arguments sont difficiles à accepter. Expliquer, comme nous l’avons entendu hier dans la bouche d’un sénateur du Haut-Rhin, que l’Alsace et, en particulier, le Haut-Rhin ont eu l’habitude par le passé de ne compter que sur eux-mêmes constitue une forme d’injure à l’histoire de ce pays. Nombreux sont ceux qui, précisément, ont considéré que le Haut-Rhin appartenait à la France et, de ce fait, devait pouvoir compter sur elle !

Je tiens également à signaler que Strasbourg reste la capitale européenne, non parce qu’elle est alsacienne, mais parce qu’elle est française.

Depuis toujours, je participe aux actions en faveur du maintien de Strasbourg comme capitale européenne. Je sais donc ce qu’il serait advenu sans le veto français, et les questions qui se posent au sein même de nos partis politiques pour savoir si cela vaut la chandelle de se battre en permanence au Parlement européen pour défendre une position minoritaire et faire en sorte que Strasbourg demeure capitale européenne. Heureusement que nous pouvons compter sur la France, et pas seulement sur l’Alsace !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Par ailleurs, si l’on considère le triangle institutionnel formé par les capitales européennes que sont Luxembourg, Bruxelles et Strasbourg, celui-ci plaide plus pour la constitution d’une grande région européenne Alsace-Lorraine que pour le maintien de l’Alsace seule.

Je vais suivre la position de mon groupe et je suis assez convaincue par les arguments de Jacques Bigot et de Jean-Pierre Masseret, le président du conseil régional de Lorraine. Mais, indépendamment de mes convictions et du vote des uns et des autres, je vous demande de faire très attention à vos argumentaires, mes chers collègues. L’identité culturelle n’implique pas nécessairement l’identité administrative. En outre, les questions d’identité et de diversité sont une chose, le particularisme en est une autre, en tant qu’organisation politique d’une diversité, d’une identité culturelle. Or la République française n’est ni un État fédéral ni une somme de particularismes !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Dans le cadre de ce débat, que l’on peut qualifier d’assez mouvant – mais c’est un beau débat d’idées –, je souhaite apporter quelques éléments d’appréciation à la fois sur la dimension géographique, la force du projet et les enjeux transfrontaliers, avant, peut-être, d’adresser un petit signe à l’histoire.

Commençons, une fois n’est pas coutume, par un éclairage précis sur la géographie, notamment sous l’angle des équipements.

Voici donc un grand ensemble territorial, situé à l’est de Paris et nous conduisant jusqu’aux frontières nationales avec l’Allemagne, mais aussi avec d’autres pays – je reviendrai sur le sujet –, qui dispose de grands équipements. Je citerai le canal de la Marne au Rhin et le canal de l’Est, puis, s’agissant des grandes infrastructures routières, la RN4 et l’autoroute A4 et, enfin, la liaison ferroviaire à grande vitesse.

Concernant cette dernière, c’est la première fois dans l’histoire de France que, de manière coopérative, les régions, départements et agglomérations ont contribué financièrement à la construction d’une grande infrastructure, laquelle donne beaucoup de satisfaction, même si, aujourd'hui, la desserte n’est pas complètement achevée jusqu’à Strasbourg. Il s’agit là d’un bel exemple de solidarité, que nous devons garder à l’esprit.

Autre élément, l’articulation entre les territoires et la force d’une nouvelle organisation, telle qu’elle apparaît dans sa forme de « chaîne d’arpenteur », pour reprendre le terme que j’ai employé précédemment.

Pour donner force et consistance à une région, il faut veiller à l’espace qu’elle recouvre, à sa démographie, notamment en termes de dynamiques, à sa richesse et à son potentiel économique. Si nous voulons construire une ou des stratégies de développement dans nos territoires, nous ne pouvons pas nous contenter de raisonnements cloisonnés et verticaux.

« Nous n’avons rien contre », ai-je beaucoup entendu dire… Il faut être pour, et non contre, mes chers collègues ! Il faut aussi pouvoir porter le projet, celui-ci devant s’inscrire dans un esprit de solidarités territoriales, humaines et économiques.

J’en viens maintenant à la force qui serait celle d’une grande région sous l’angle de son espace et de ses frontières.

C’est là un beau défi à relever ! Au-delà de la Belgique et du Luxembourg, le territoire considéré compterait une longue frontière avec l’Allemagne, un voisin important qui apporte beaucoup à la France en matière d’échanges, notamment à sa partie est. De plus, lorsqu’on se trouve à Saint-Louis, tout au sud de l’Alsace, on est quasiment à Bâle, donc tout près de la Suisse.

Quel beau barycentre formerait donc l’Alsace, avec Strasbourg comme pivot, pour irriguer, faire office de trait d’union et servir de réacteur à un développement économique qui se diffuserait bien au-delà des premières villes frontalières et des départements limitrophes !

Je rappellerai enfin – même si l’idéal ne fait pas tout, il me semble qu’il faut en avoir une part dans la vie et en politique – que nous commémorons cette année le début de la Première Guerre mondiale. Le grand est de la France a payé dans ce cadre un lourd tribut, avec la participation de Français, mais aussi d’étrangers venus de toutes parts.

Un siècle plus tard, il me semble que cela aurait tout de même de la « gueule » – c’est l’expression qu’employait le général Bigeard, auprès de qui j’ai travaillé pendant un moment – de voir naître en temps de paix, pour la France, mais aussi en mémoire de tous ceux qui sont tombés sur ces champs de bataille, une grande ambition fraternelle, une forme de rassemblement, de grande unité autour d’une région hier meurtrie.

Ainsi celle-ci pourrait-elle, comme d’autres, prendre toute sa place dans le développement de la France et d’une Europe dont nous avons besoin pour participer à l’effort indispensable au redressement de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Il est vraiment difficile de se déterminer quand on n’est pas directement concerné par les problématiques de l’est de la France. Nous débattons du sujet depuis hier soir et il est vrai que les arguments des uns et des autres peuvent se concevoir. En définitive, nous nous retrouvons dans la situation d’un couturier qui voudrait confectionner un costume sur mesure sans avoir les mensurations du client. C’est relativement complexe et, pourtant, nous devrons voter !

Toutefois, nous ne partons pas de rien, puisque nous avons à notre disposition le rapport Raffarin-Krattinger.

Ce document, qui fait référence, définit sur la base d’une méthode bien précise une organisation articulée autour de régions stratèges – une dizaine – et des départements maintenus pour garantir la proximité. Je dois reconnaître qu’il me paraissait tout à fait satisfaisant.

Puis a été installée la commission spéciale… Je croyais naïvement qu’elle aboutirait à un consensus. Malheureusement, je constate que le consensus n’est pas vraiment au rendez-vous aujourd'hui !

La commission spéciale s’est beaucoup écartée du rapport Raffarin-Krattinger : alors que ce dernier prévoyait huit à dix régions, elle en propose quinze, soit presque 50 % de plus.

Nous qui ne sommes pas directement concernés par la question soulevée par le présent amendement, nous sommes donc partagés entre la position du rapport précité et celle de la commission spéciale, qui va beaucoup plus loin en optant pour quinze régions – pourquoi ne pas revenir à vingt-deux dans ce cas ? – et des départements fondus dans chacune d’entre elles.

Nous faisons face à deux stratégies complètement différentes et, pour ce qui me concerne, je pense en toute bonne foi qu’il faut en rester au rapport Raffarin-Krattinger. Nous étions parvenus à un consensus sur ce dernier et le Sénat a tout intérêt à affirmer la nécessité de disposer de régions stratèges, à en limiter le nombre – une dizaine, voire une douzaine – et à conserver un grand nombre de départements assurant la proximité.

On ne peut pas, me semble-t-il, avoir tout et son contraire !

Par conséquent, je voterai l’amendement présenté, non pas uniquement pour des raisons locales, mais par fidélité au rapport Raffarin-Krattinger, qui, en proposant des régions stratèges et des départements garantissant la proximité, me semble apporter une solution correcte.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission spéciale n’a sans doute pas toutes les vertus que souhaiterait notre collègue Gérard Cornu, mais la vérité exige de dire qu’elle a prévu seulement quatorze régions, et non quinze. Elle a contribué à limiter le nombre de ces régions, la Corse n’étant cependant pas traitée dans le cadre de ce dossier !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Les arguments échangés sur cette question de l’Alsace sont en réalité tous estimables – on a le droit d’hésiter sur un sujet de cette nature ! – et il m’a semblé que toutes les interventions étaient inspirées par un sens très élevé de l’intérêt collectif, voire de l’intérêt national.

À ce stade de la discussion, je voudrais observer que les conditions dans lesquelles nous travaillons, notamment en termes de rapidité, exigeront la mise en place, au moins pendant la première année d’existence des nouvelles régions, d’un droit d’option réellement opérationnel pour pouvoir procéder à des ajustements. En effet, comme il est d’usage de le dire, nous allons légiférer d’une main tremblante sur un certain nombre de points déterminants pour les décennies à venir, mais pour lesquels la pesée du pour et du contre se révèle être un exercice assurément très difficile.

Je tiens également à préciser les éléments qui me déterminent à soutenir le choix de la commission spéciale.

Nous avons certes établi une ligne directrice, me semble-t-il très largement partagée, que nous avons énoncée dans le nouvel article adopté, hier, par notre assemblée et précédant l’article 1er du projet de loi.

Par principe, nous sommes favorables à de grandes régions, dès lors que celles-ci ont des responsabilités en matière de stratégie économique, de développement des territoires, des grandes infrastructures, de la formation professionnelle et de l’emploi.

Nous sommes favorables, en même temps, à des départements forts dans ces grandes régions pour l’exercice des compétences de proximité.

Telle est notre ligne directrice, qui peut, dans quelques cas, être tempérée par un certain pragmatisme.

L’Alsace n’a pas attendu cette réforme territoriale pour concevoir son propre projet. Elle s’autorise pour cela des dispositions constitutionnelles adoptées en 2003 et permettant de ne pas placer tous nos territoires sous la même toise, puisque la Constitution prévoit la possibilité de mettre en place de nouvelles collectivités territoriales qui ne sont ni des départements ni des régions, mais qui sont de nouvelles entités.

L’Alsace a voulu s’inscrire dans cette perspective que nous avons nous-mêmes, en tant que pouvoir constituant, ouverte. La réforme territoriale proposée par le Gouvernement est venue après. Or le projet alsacien est unique en France. Naturellement, d’autres départements, d’autres régions pourraient avoir la même idée, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

… mais force est de constater que les seuls à l’avoir eue et à l’avoir traduite juridiquement de manière très précise dans un projet sont les Alsaciens.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Nous sommes en train de délibérer non sur un projet virtuel ou théorique, mais sur un projet qui a pris forme, qui existe et a fait l’objet, même si la participation a été trop faible pour qu’il soit adopté, d’un vote majoritaire des Alsaciens eux-mêmes. Le but est non pas de retirer l’Alsace à une région qui existerait, mais de ne pas l’intégrer à une région qui n’existe pas encore.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il s’agit simplement de donner sa chance à cette collectivité particulière.

Par ces propos, je ne m’oppose pas aux projets alternatifs, puisque nous prenons parti pour les grandes régions en général et par principe. Cependant, nous devons être suffisamment pragmatiques pour envisager des formules différentes lorsque celles-ci ont déjà une certaine consistance.

Telle est la raison pour laquelle, en ce qui me concerne, j’ai fait le choix de soutenir la position de la commission spéciale. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Bigot

À l’article 1er A, adopté à une large majorité, nous avons su affirmer le rôle des régions, des départements, des communes et des intercommunalités. À partir de là, nous savons que l’orientation doit naturellement se porter vers des grandes régions.

S’agissant de la collectivité unique en Alsace, le texte porté en 2010 par Philippe Richert, à l’époque ministre chargé des collectivités locales, prévoyait des modalités de scrutin qui ont effectivement conduit, lors du référendum du mois d’avril 2013, à son rejet. L’un des problèmes de ce référendum, je le rappelle, a été la difficulté des protagonistes à se positionner clairement sur le rôle de Strasbourg, capitale régionale.

Aujourd’hui, je suis convaincu qu’il faut aller, conformément aux conclusions du rapport Raffarin-Krattinger et d’autres, vers des grandes régions. La grande région de l’est de la France, je l’ai dit, c’est, selon moi, celle que proposaient initialement le Gouvernement comme Philippe Richert et Jean-Pierre Masseret, à savoir l’Alsace-Lorraine.

Je ne vois pas comment construire un projet de développement économique incluant la région Champagne-Ardenne, les départements de l’Aube et de la Marne. Je crains que cela ne soit compliqué - mais peut-être l’avenir me démentira-t-il.

Soutenant l’amendement n° 66, vous comprendrez, mes chers collègues, que je ne puisse souscrire à l'amendement n° 41 rectifié ter. Je remercie d’ailleurs le Gouvernement d’avoir retiré le sien, identique : ainsi, c’est contre un amendement UMP que je voterai et non contre un amendement du Gouvernement. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Pour ceux qui sont extérieurs aux régions concernées, Gérard Cornu l’a précisément dit, le débat est difficile. Il s’apparente à celui qu’ont eu mes prédécesseurs en 1972 lorsqu’il s’agissait de savoir si les départements savoyards formeraient une région unique ou si les Alpes seraient intégrées dans une région rhodanienne. Dans chacune des deux collectivités, le débat a été très animé ; il s’agissait de peser les avantages et les inconvénients des deux solutions envisagées. Les majorités ont été constituées de justesse.

Pour éclairer le débat de ce jour, il me paraît essentiel de connaître la position qu’adoptera le Gouvernement à l’Assemblée nationale, compte tenu de l’adoption de l’article 1er A, quant au devenir des départements. Il ne s’agit pas de maintenir des départements partout ; il s’agit de tirer les conséquences de l’instauration de grandes régions, avec ou sans métropole, et de la place des territoires qui seront en dehors des espaces métropolitains.

Je comprends qu’une très grande région puisse être vécue par les Alsaciens comme menant, à terme, à la dissolution de leur identité, mais aussi à l’éloignement de leur partenaire économique naturel situé de l’autre côté de la frontière.

Si je le comprends, c’est parce que les départements savoyards rencontrent le même problème au sein de la région Rhône-Alpes aujourd’hui, lequel dépend de ce que deviendront les départements. Ceux-ci se verront-ils retirer toutes leurs compétences pour se transformer en bureau d’aide sociale, ou pas ?

Si demain, dans le Grand Est, qui peut effectivement constituer la démarche naturelle, on transfère toutes les compétences à la très grande région et si les départements ne sont plus que des bureaux d’aide sociale, une moindre prise en compte par la région des spécificités de la zone frontalière, dont une partie des territoires serait éloignée, représenterait un véritable problème.

La question a été soulevée hier à propos du Nord – Pas-de-Calais et de la Picardie. C’est ce qui ressort en ce moment même du débat sur le Grand Est et la place de l’Alsace, région autonome ou regroupée. Et c’est parce que nous en avons souffert, en tant qu’élus savoyards, que nous en comprenons l’enjeu.

Nous avons donc besoin que le Gouvernement éclaircisse sa position. Si demain les départements ne sont plus que de super bureaux d’aide sociale ou s’ils se sont regroupés pour faire des économies ou dissous dans les métropoles, avec le poids économique de ces dernières, quel sera le devenir de ces territoires frontaliers, qui sont liés à l’autre côté de la frontière, qui ont des intérêts économiques singuliers, des particularités, dans ces très grandes régions ?

J’y reviendrai ultérieurement, l’élargissement de la région Rhône-Alpes ne faisant qu’accentuer notre problème. Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons pas comprendre ce qui se passe et effectuer des choix sans éclaircissement.

Pour ma part, je suis très partagé : d’une part, la collectivité unique alsacienne peut être une chance pour d’autres territoires, d’autre part, nous avons besoin de grandes régions programmatiques pour réaliser de grands équipements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Tout d’abord, je salue l’état d’esprit qui anime tous les participants au débat. Cela dit, je pressens l’adhésion d’une assez large majorité de notre assemblée au projet de régions élargies et, en même temps, un large désir de soutenir le projet propre choisi par les élus alsaciens.

Nous avons entendu le Gouvernement, en particulier Bernard Cazeneuve, exprimer une volonté de dialogue constructif, qui se poursuivra après l’examen du présent projet de loi en deuxième lecture par le Sénat. Le texte sera examiné en deuxième lecture par l’Assemblée nationale et des efforts seront déployés pour définir un projet commun.

Or, si nous voulons aller jusqu’au bout de cette volonté de constituer de grandes régions, nous rencontrerons un peu partout, Michel Bouvard vient de le souligner très justement, un problème sérieux de gestion interne de ces grandes régions, d’autant plus que l’autre projet de loi, que nous avons déjà tous en tête, va leur attribuer des compétences relevant bien plus de la gestion. Nous voyons bien, même si le cheminement du Gouvernement est encore un peu inachevé, de mon point de vue, que la collectivité territoriale « département » subsistera, avec son identité, son droit à une assemblée élue et un ensemble de compétences.

Donc, il me semble que ce débat sur l’alternative entre la grande région Est et le projet alsacien nous amène de façon plus large à examiner une question qui n’est pas encore apparue dans le débat, sauf un peu lors de l’intervention de Philippe Adnot que j’ai beaucoup appréciée : ces grandes régions ont, par application du droit commun des collectivités territoriales, que nous connaissons tous, la possibilité de déléguer l’exercice de certaines de leurs compétences aux départements qui les constituent.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Or il me paraît évident que, lorsque les élus des régions nouvelles s’organiseront et dialogueront avec les départements, cette piste sera développée. Tout notre système actuel de gestion locale le permet, sans aucun texte supplémentaire.

Je sais bien que le Sénat va voter à la fois l’approbation des grandes régions et la création d’une région spécifique Alsace, mais, si la volonté de dialogue constructif continue à se manifester, je voudrais que l’on se demande, en particulier pour nos collègues alsaciens, si la solution d’un département regroupant le Bas-Rhin et le Haut-Rhin bénéficiant d’une large délégation de compétences de la part d’une grande région Est ne serait pas une solution au moins aussi originale et créative.

Dans ce cas, si je puis me permettre de formuler une suggestion supplémentaire au Gouvernement, puisque l’objectif est de réaliser de grandes régions dotées d’une cohérence géographique, les deux options du Grand Est ont leur mérite : celle à trois régions actuelles et celle à cinq régions actuelles.

Par conséquent, en vue de la conclusion d’un dialogue réellement constructif entre toutes les familles politiques à vocation gouvernementale, il me semble que l’on pourrait parvenir à l’élaboration d’un projet encore plus complet préservant la volonté de responsabilité propre de nos amis alsaciens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je mets aux voix l'amendement n° 41 rectifié ter.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission spéciale.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que l’avis du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Voici le résultat du scrutin n° 6 :

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à M. le président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Le débat a été extrêmement riche sur le sujet qui nous occupe actuellement, mais nous devons en examiner de nombreux autres, y compris concernant la carte. Mes chers collègues, je me permets de vous faire observer que certains d’entre vous sont intervenus sur l’article, sur l’amendement n° 41 rectifié bis, sur le sous-amendement n° 146 ; ils ont expliqué leur vote sur celui-ci. Certes, ces prises de parole enrichissent le débat, mais elles ont tout de même donné lieu à quelques répétitions. Je fais cette remarque en tant qu’observateur engagé.

Si nous voulons, comme prévu, terminer l’examen du présent projet de loi dans la nuit, je vous incite à la sobriété.

Permettez-moi également de vous dire que la répétition permanente des mêmes arguments ne convainc pas forcément. D’ailleurs, on le constate bien ! Et vous vous souvenez sans doute de cette formule d’un grand homme politique selon laquelle un bon discours pouvait le faire changer d’avis mais pas de vote. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Au-delà de la carte, nous devons aussi traiter d’autres sujets importants, ...

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean-Pierre Masseret, pour explication de vote sur l'amendement n° 66.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Masseret

En écho à la demande du président Hyest, je me bornerai à dire que cet amendement vise à rapprocher la région Alsace de la région Lorraine. Les débats ont été suffisants ; inutile de les prolonger. Je demande donc simplement que cette proposition, conforme à l’initiative prise initialement par le Gouvernement et au travail que j’ai conduit avec Philippe Richert, soit approuvée par le Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Bigot

Sans prolonger le débat, je demande solennellement à mes collègues alsaciens de penser à ce qu’ont voulu construire Philippe Richert et Jean-Pierre Masseret et de prendre la mesure du risque auquel nous allons être confrontés : une très grande région dont personne en Alsace ne veut en raison de l’absence d’avenir qui en résulterait. Voici venu l’ultime moment où nous pouvons encore mener le combat afin de renouer avec le projet que nous avions négocié avec le Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. François Grosdidier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

Je regrette profondément les abstentions, y compris celle de M. Masseret, sur l’amendement n° 41 rectifié bis, car lorsque le président de la région Lorraine avait pris l’initiative de réunir tous les grands exécutifs régionaux, ceux-ci avaient voté à l’unanimité en faveur de la fusion entre les régions Lorraine, Champagne-Ardenne et Alsace.

Je ne pratiquerai pas la réciprocité et je voterai l’amendement n° 66, adoptant ainsi une position de repli. Je regrette toutefois que cette grande région soit incomplète et qu’on laisse sur le bord du chemin la Champagne-Ardenne avec laquelle nous avons de vrais intérêts communs, y compris économiques.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote sur l’amendement n° 1 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Mes chers collègues, en réalité, le sous-amendement n° 146 n’avait été déposé que dans le cas où le présent amendement n’aurait pas pu être défendu. L’Alsace ayant été laissée seule, cet amendement se justifie pleinement. Selon moi, la fusion de la Bourgogne et la Franche-Comté ne permettra pas à cette région d’atteindre la taille critique lui assurant un poids européen.

Si vous estimez que l’Assemblée nationale reviendra complètement sur notre travail, ne votez pas cet amendement. En revanche, si vous croyez en ce que nous venons de faire, je vous invite à l’adopter.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote sur l'amendement n° 45.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Mes chers collègues, le présent amendement vise à tirer les conclusions des décisions lourdes de conséquences que nous venons de prendre en rejetant l’amendement n° 41 rectifié ter. Désormais, la conception est différente et les arguments que j’ai évoqués la nuit dernière me semblent encore pertinents aujourd’hui.

On peut effectivement concevoir une organisation territoriale associant la rationalité – l’« intégration » disent certains – des volontés locales affirmées. L’Alsace en est l’exemple. Ainsi, la découpe administrative est calée sur la réalité économique. On peut penser que, demain, la grande métropole va pouvoir s’affirmer en complémentarité. Créer des entités comme l’Alsace, résultant de la fusion de deux départements et d’une région, aboutira à une rationalisation. En effet, cela revient à faire en sorte, entre autres, de n’avoir plus qu’un seul comité du tourisme, et non plusieurs à l’échelon départemental et régional – dans l’exemple précité, on vend non pas le Haut-Rhin ou le Bas-Rhin, mais l’Alsace dans son ensemble. C’est aussi faire en sorte que le développement économique soit une réalité – c’était d’ailleurs le principe du conseiller territorial qui rapprochait les départements et les régions pour éviter les doublons. C’est également faire en sorte de disposer de structures fortes, puissantes, stratégiques en matière de politique de l’emploi et de la formation, à condition, toutefois, de ne pas imposer de surcroît à ces entités des compétences de gestion !

Le raisonnement vaut pour le Nord – Pas-de-Calais, et je sais que les élus de ce territoire réfléchissent à assurer une rationalisation administrative autour d’une métropole. Je partage les propos de M. Gremillet et d’autres collègues selon lesquels lorsque des territoires peuvent s’organiser, ils doivent se prendre en main.

On trouve ainsi un compromis entre ces grandes régions où des départements doivent se maintenir et ces métropoles qui doivent s’organiser différemment avec des départements et des régions qui travaillent main dans la main et, éventuellement, fusionnent.

Restent les régions sans métropole, où la population est moins dense : cinquante à soixante habitants au kilomètre carré alors que Lille ou Strasbourg en comptent plus de deux cents. Dans ce cas de figure, le concept de grande région stratégique ne peut avoir de l’allure, si je puis dire, que si l’on maintient les départements. On voit bien que les problèmes sont différents et que la massification est nécessaire. Associer la Lorraine seulement à la Champagne-Ardenne ne permettra pas de constituer une entité suffisamment forte ; adjoindre à cette association la Picardie, c’est constituer une entité de 5, 6 millions d’habitants, ouverte aux échanges mondiaux grâce à un port d’un côté, des aéroports internationaux de l’autre. Cette proposition a une valeur économique, elle est présentable aux populations et va, me semble-t-il, dans l’intérêt de ces trois régions qui connaissent un certain nombre de difficultés.

À mon sens, un certain nombre d’entre nous devraient pouvoir y souscrire, d’autant que nous allons voter l’article instaurant un droit d’option pour les départements. Si les possibilités de détachement sont intelligentes, ni trop souples, pour éviter les fuites, ni trop complexes, ce qui empêcherait les départs cohérents, alors la carte répondra peut-être aux réalités de notre territoire.

Cela étant, je vous invite, mes chers collègues, à soutenir ma position et à voter le présent amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Yves Détraigne, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je m’inscris dans la même ligne que René-Paul Savary.

Je m’interroge sur l’intérêt du débat qui se déroule depuis hier au sein de cette assemblée.

Que veut-on faire ? Souhaite-t-on se livrer à un exercice intellectuel sympathique en dessinant une belle carte des régions sans se préoccuper des réalités du terrain, ou veut-on établir une carte des régions qui colle au terrain, qui soit durable, c’est-à-dire une carte que la population concernée s’approprie ?

La grande majorité d’entre nous, mes chers collègues, se tournent plutôt, selon moi, vers cette seconde branche de l’alternative. Or si l’on veut que la population s’approprie les régions et se reconnaisse dans celles-ci, on ne peut pas procéder aux redécoupages en faisant fi des réalités du terrain, de la vie des citoyens.

Quid de la Champagne-Ardenne ? Elle entretient des liens étroits avec la Lorraine, …

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

… ce que prend en compte la carte qui nous est proposée, et des liens tout aussi étroits avec la Picardie, notamment le département de l’Aisne.

Nous avons tous entendu hier le plaidoyer de notre collègue Yves Daudigny, président du conseil général de l’Aisne, qui s’exprimera sans doute de nouveau aujourd’hui.

Monsieur le ministre, si vous avez été attentif, vous avez également entendu à l’Assemblée nationale, j’en suis sûr, le plaidoyer de notre collègue député Jacques Krabal, maire de Château-Thierry, qui va dans le même sens.

D’ailleurs, si Antoine Lefèvre, maire de Laon, était présent dans l’hémicycle – il est fort pris par le travail en commission des finances –, il tiendrait les mêmes propos. Combien de fois m’a-t-il dit que sa ville était tournée vers la Marne ? Pour lui, la capitale régionale est Reims, douzième ville de France – peu d’entre nous le savent dans cet hémicycle. En revanche, nombreux sont ceux qui pensent que Reims est la préfecture de la région Champagne-Ardenne ; eh bien non, elle n’en est que la sous-préfecture ! Reims, ville ô combien importante dans l’histoire de notre pays, ville des sacres, est une ville marginalisée car elle se situe à la limite de la région Champagne-Ardenne.

Pour aller rendre visite à René-Paul Savary dans les bureaux du conseil général de la Marne, de chez moi – j’habite près de Reims, à Witry-lès-Reims – je mets quarante minutes en voiture, en étant très prudent, monsieur le ministre, alors que pour aller voir Antoine Lefèvre à Laon, il me faut cinq minutes de plus, en étant tout aussi prudent.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Vous me direz certainement, monsieur le ministre, que cela ne signifie rien, car ce constat, on peut le faire dans toutes les régions où des villes sont à la limite d’un territoire. Néanmoins, pourquoi la carte des régions que vous avez initialement élaborée, nuitamment, prévoyait-elle le regroupement de la Picardie et de la Champagne-Ardenne ? Parce que, vu de Paris, cela s’impose ! C’est la réalité : la plus grande ville de cet ensemble, Reims, est située au croisement de la Picardie et de la Champagne-Ardenne, ainsi qu’au croisement des autoroutes A4 et A26, qui assurent le lien entre ces deux régions.

De surcroît, sur le plan économique, il ne vous aura sûrement pas échappé que l’un des rares pôles de compétitivité à vocation mondiale qui fonctionne de façon satisfaisante, le pôle industries et agro-ressources, est à cheval sur deux régions. Lesquelles ? Comme par hasard, la Champagne-Ardenne et la Picardie. Pourquoi ? Parce que ce territoire est le grenier à blé de la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Si notre balance commerciale affiche un excédent de 10 milliards d’euros grâce à l’agroalimentaire, on le doit très largement à ces deux régions, …

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

… productrices non seulement de blé, de betteraves, mais aussi de champagne. Je remarque d’ailleurs que l’appellation « champagne » et le nom « Paris » sont les deux mots français les plus connus sur la planète.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

La zone d’appellation champagne se trouve aussi sur le territoire de la Picardie. Après la Marne, le premier département producteur de champagne, c’est l’Aisne.

Telle est la réalité, mais on n’y pense pas forcément quand on se trouve à Paris ou que l’on travaille dans un bureau au sein d’un ministère. Certes, ces observations peuvent faire sourire… Mais si l’on veut procéder à un redécoupage qui tienne compte des réalités du terrain, qui soit en phase non seulement avec les habitudes et les modes de vie des populations, mais aussi avec l’économie de la région que nous voulons créer, nous n’avons pas le choix : nous devons réunir la Picardie et la Champagne-Ardenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

M. Yves Daudigny. Je serai très sobre dans mon expression bien qu’appartenant à un département qui produit 10 % du champagne !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Les motifs que j’ai exposés hier soir en faveur du présent amendement demeurent totalement valables ce matin. Par conséquent, je le voterai.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jérôme Bignon, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

La première mouture de la carte proposée par le Gouvernement comprenait la fusion de la Champagne-Ardenne et de la Picardie, sans prise en compte de la Lorraine.

La stupéfaction avait été telle dans l’Oise et dans la Somme que le Gouvernement, après avoir seulement modifié à la marge cette première version, a pris en considération ce sentiment. En effet, dans la version qui a été adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale, on est revenu à un découpage à mes yeux plus cohérent et conforme à l’histoire commune des deux régions Nord – Pas-de-Calais et Picardie, en proposant la fusion de celles-ci.

Cela étant, j’observe que les signataires du présent amendement sont exclusivement des sénateurs de l’Aisne, aucun n’est originaire de l’Oise ou de la Somme. Certes, cet amendement est parfaitement recevable, mais cela démontre qu’il n’existe pas d’élan profond des habitants de la Somme et de l’Oise pour rejoindre la Champagne-Ardenne et la Lorraine.

Je regrette que l’on n’aboutisse pas à une région plus vaste. À cet égard, j’aurais été très favorable à une fusion entre le Nord – Pas-de-Calais, la Picardie et la Normandie, car il en serait résulté une entité située le long de la Manche ayant une véritable cohérence économique et maritime. Toutefois, il serait vain et inutile de revenir sur une solution qui n’a pas été retenue.

Quoi qu’il en soit, j’incite mes collègues de l’Aisne, dont je comprends et partage la démarche à bien des égards, une fois entérinée la fusion du Nord – Pas-de-Calais et de la Picardie, à utiliser la faculté qui leur sera donnée de s’en détacher et de rejoindre la région Champagne-Ardenne et Lorraine s’ils le souhaitent. Néanmoins, il me paraît quelque peu singulier, pour ne pas dire cavalier, de dire aux Picards qui ne sont pas d’accord avec la disposition : « Venez puis vous partirez si la situation ne vous convient pas. »

La solution inverse serait préférable : il vaudrait mieux leur suggérer de rejoindre la région Nord – Pas-de-Calais et, le cas échéant, l’Aisne pourra à son gré utiliser le dispositif extrêmement pertinent prévu par la commission spéciale, et assoupli. J’espère toutefois que nous l’adopterons et qu’il prospérera à l’Assemblée nationale…

Pour toutes ces raisons, je voterai contre cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Comme vient de l’indiquer M. Bignon, les élus de l’Aisne défendent le présent amendement. Mais la Picardie ne comporte pas que ce département !

De plus, je constate que, à l’instar de ce qui s’est passé tout à l’heure pour l’Alsace, les auteurs de cet amendement disposent allègrement du sort de la Lorraine sans demander l’avis de la population. De quel droit nos collègues de l’Aisne ou d’autres départements décident-ils pour les Lorrains de ce qui leur conviendrait ? §

Si ce choix était pertinent, je comprendrais. Mais très honnêtement, il faut tout de même avoir l’esprit un peu tortueux, j’insiste sur ce terme, pour vouloir créer une région qui va de la mer du Nord jusqu’à la ligne bleue des Vosges et au ballon d’Alsace, une sorte de « boudin » parallèle à la frontière, …

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Avec les changements climatiques, la différence va s’atténuer !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

… qui n’a strictement aucune cohérence du point de vue de l’aménagement du territoire !

La Picardie, c’est l’autoroute A1 et le TGV Nord ; la Champagne-Ardenne et la Lorraine, ce sont les autoroutes A4, A31 et le TGV Est. L’amendement qui nous est présenté tend à créer une sorte de mouton à cinq pattes – ou plutôt à dix pattes ! – qui n’a strictement aucune cohérence. Comment on peut proposer un tel découpage ?

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote sur l’amendement n° 8.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Je ne propose pas de rattacher telle région à telle autre. J’ai toujours été partisan du maintien des régions actuelles et de la fusion en leur sein des départements, car ainsi les entités restent à taille humaine.

Simplement, le système retenu pour l’Alsace me paraît très pertinent. Dans ces conditions, il serait intéressant et cohérent de s’en inspirer pour la Lorraine et d’adopter une solution du même type. Le présent amendement vise donc à tirer les conséquences de notre vote massif destiné à donner satisfaction à nos collègues alsaciens et rejetant les amendements qui tendaient à revenir sur l’avis de la commission spéciale.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 43 et 70.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Je suis moi-même membre de l’exécutif régional du Nord – Pas-de-Calais, et j’adhère à l’argumentaire selon lequel il ne faut pas réunir cette région et la Picardie.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Cette position a été défendue avec beaucoup de force par nos collègues Valérie Létard et Michel Delebarre, animateurs et acteurs, au-delà de leur engagement partisan, de la réalité du Nord – Pas-de-Calais d’aujourd’hui.

Il s’agit non pas d’opérer un repli égoïste, mais d’exprimer une volonté : continuer à bâtir des politiques économiques, sociales et écologiques structurantes, au regard des fonctions premières des régions, à savoir le développement économique et l’aménagement stratégique de leur territoire.

Ce constat a été rappelé hier, notre région se distingue par l’ampleur et la densité de sa population – elle dénombre 4, 1 millions d’habitants – qui la placent au rang des grandes régions dont le Gouvernement défend la création. Elle se caractérise par son dynamisme économique, par sa politique transfrontalière vers l’Europe du Nord et par sa métropole lilloise, qui s’impose comme collectivité fédératrice. Elle collabore activement avec les deux départements qu’elle regroupe, le Nord et le Pas-de-Calais, et elle est à même de dessiner un projet territorial fédérateur et innovant.

Monsieur le ministre, la proposition de ne pas fusionner les régions Nord – Pas-de-Calais et Picardie, c’est celle du Premier ministre et du Gouvernement. Notre position n’est pas incongrue : c’est la vôtre ! Or, vous venez de le rappeler, il est essentiel de poursuivre le travail de co-construction.

Aujourd’hui, vous avancez qu’il existe des collaborations entre le Nord – Pas-de-Calais et la Picardie dans un certain nombre de domaines, tels les projets agroalimentaires, l’aménagement de la Côte d’Opale et de la baie de Somme. De même, on pourrait invoquer l’histoire que nous avons en partage et que reflète l’usage de la langue picarde, au sud de notre région. Mais on pourrait également mentionner le flamand, qui est parlé au nord-est de notre territoire. Michel Delebarre ne me contredira pas.

Voilà un constat dont on ne peut que se féliciter : aucun mur étanche ne sépare le Nord – Pas-de-Calais et la Picardie ! Et c’est bien qu’il en soit ainsi. Le canal Seine-Nord va naître et, à cet égard, je tiens à remercier le Premier ministre, le Gouvernement tout entier, ainsi que toutes celles et tous ceux qui, dès l’origine, ont concouru à la réalisation de ce projet, sans oublier le secrétaire d’État chargé des transports, nos deux régions et nos cinq départements, qui participent aux financements. Cela étant, au-delà de cet équipement, qui occupera évidemment une place très structurante, force est d’admettre que les réseaux majeurs de communication et les infrastructures existantes n’ont pas joué un rôle moteur pour le Nord – Pas-de-Calais.

Je ne puis manquer de mentionner un autre point spécifique, celui de la santé. Le Pas-de-Calais compte plus de 1, 5 million d’habitants. Pourtant, il ne possède pas de centre hospitalier universitaire. C’est une particularité, voire une anomalie. Je le souligne, même si ce n’est pas le sujet de nos débats d’aujourd’hui. Malgré un maillage d’hôpitaux qui, par ailleurs, se révèle de grande qualité, nombre des patients de ce département sont transférés dans un autre département. Deux CHU se trouvent à proximité du Pas-de-Calais, ceux de Lille et d’Amiens. Parmi les patients transférés, 90 % sont dirigés vers Lille contre 10 % vers Amiens – il s’agit des habitants du Montreuillois.

Je pourrais multiplier les exemples prouvant que des collaborations existent, mais qu’elles ne relèvent pas pour autant d’un projet structurant, élaboré et partagé entre nos deux régions. Cela étant, Valérie Létard et Michel Delebarre ont largement exposé ces considérations hier.

Je me contenterai donc de cette précision : ces constats ne sont désobligeants ni pour le Nord – Pas-de-Calais ni pour la Picardie ! Et la mise en garde suivante, déjà formulée par Valérie Létard, n’est offensante pour personne : la fusion de ces deux régions impliquerait tant de démarches à suivre, tant de structures à mettre en place, qu’elle frapperait d’inertie leurs projets respectifs, en particulier en matière de développement économique et social. S’ensuivrait un traumatisme terrible, tant pour la Picardie que pour le Nord – Pas-de-Calais. En conséquence, certains orateurs l’ont rappelé, le chômage augmenterait encore davantage. Il s’élève déjà à 15 % dans certaines localités, et il pourrait croître dans des proportions dramatiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Enfin, je reviendrai sur quelques considérations qui ont été en grande partie développées hier.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Nos collègues de Picardie défendent des positions pour le moins hétérogènes. Certains soutiennent bien sûr la fusion des deux régions. Cependant, les élus de l’Aisne regardent surtout vers la Champagne-Ardenne ; d’autres se tournent vers l’Île-de-France. C’est une réalité que nous devons prendre en compte.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Je termine mon propos, madame la présidente. Permettez-moi tout de même de relever que, si j’assiste à ce débat depuis son commencement, je n’ai pas encore pris la parole.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Ce n’est pas une raison ! Le règlement, c’est le règlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Je demande à M. le ministre de bien vouloir nous écouter, …

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

… dans la diversité de nos appartenances partisanes. Nous faisons preuve de la plus grande détermination dans notre engagement républicain – j’insiste sur ce point –, et je le prie d’accéder à notre demande, à savoir le maintien de deux régions distinctes, le Nord – Pas-de-Calais et la Picardie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Létard

Mes chers collègues, j’en conviens, nous avons déjà eu l’occasion de présenter et de défendre longuement, hier, nos ambitions respectives. Toutefois, en cet instant, vous êtes appelés à faire un choix, à tracer concrètement une ligne qui va engager, pour des décennies, l’avenir des habitants de nos territoires, et je me dois de vous le dire : pour les habitants du Nord – Pas-de-Calais et de la Picardie, ce vote, favorable ou défavorable, sera extrêmement lourd de conséquences économiques, humaines, culturelles ou politiques.

Pourquoi ? Pour une raison simple. Chacun s’accorde à le dire – et, à l’origine, le Gouvernement avait dressé ce constat –, le Nord – Pas-de-Calais a fait preuve de ses capacités, et il a relevé en majeure partie le défi auquel il était confronté : reconstruire une stratégie d’aménagement du territoire, …

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Mais le Gouvernement n’a aucune stratégie !

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Létard

… de développement économique, notamment en nouant de grands partenariats transfrontaliers avec nos amis d’Europe du Nord. Bien sûr, il agit en lien avec la Picardie et l’Île-de-France. Nous l’avons déjà rappelé, l’étude d’impact elle-même reprenait ce constat.

Or tout a changé d’un coup de baguette magique, tout simplement parce qu’il fallait donner des gages à l’Europe. Certes, il faut prouver que nous sommes en mesure de mener de grandes réformes. Mais gardons-nous de tout confondre ! Nous avons un devoir de responsabilité envers nos concitoyens. Il ne faut pas nier la nécessité de réformer, de constituer de grandes régions. Nous pouvons y parvenir, mais à la condition de passer par une étape intermédiaire : il faut permettre aux régions Nord – Pas-de-Calais et Picardie de conserver, dans un premier temps, leur périmètre actuel.

En effet, il convient de répondre aux diverses demandes exprimées par nos amis picards. Les uns veulent être rattachés à la Champagne-Ardenne ; la Somme préfèrerait rejoindre le Nord – Pas-de-Calais ; quant à l’Oise, on le sait bien, elle manifeste un tropisme vers l’Île-de-France.

On le sait également, si nos deux régions restent telles quelles, le droit d’option pourra être employé et appliqué rapidement. A contrario, il se révélera inutilisable si nous les fusionnons d’emblée.

À ces raisons extrêmement simples s’ajoute cet argument : le Nord – Pas-de-Calais est, grâce à la métropole qui se trouve en son cœur, et au cœur des deux départements qui le composent, en capacité de prendre la même direction que l’Alsace, à savoir la rationalisation de ses institutions. La région gagnerait ainsi en efficacité. Elle bénéficierait d’économies d’échelle et, surtout, se révélerait beaucoup plus réactive, au service du développement économique, au service de nos populations et de nos entreprises. Une institution plus resserrée aurait le mérite d’être plus efficace.

Catherine Génisson l’a rappelé : nous allons rebattre les cartes pendant deux ans. Aussi, au cours de cette période, nous allons mettre un coup d’arrêt au développement économique, aux investissements publics qui, dans nos territoires, sont tout simplement vitaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Létard

Certes, ma chère collègue ! Alors, défendez votre région, défendez votre projet ! Ce que je vous dis, c’est qu’on a le droit de prendre une autre voie, …

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Létard

… tout en aboutissant au même résultat, à savoir la création de régions élargies. Mais il ne faut pas mépriser les territoires ! Il faut éviter de les plomber durablement, en plaçant la charrue avant les bœufs. Écoutons celles et ceux qui travaillent en leur sein ! Je ne juge pas votre région à votre place !

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Létard

Mme Valérie Létard. Je m’efforce de défendre l’intérêt général, l’intérêt de la France. Je m’adresse à vous avec respect. Dès lors, je vous en prie, entendez nos arguments, reconnaissez que nous devons respecter et protéger nos populations. Nous devons progresser vers de grandes régions. Choisissons la bonne voie pour aboutir à ce résultat : ces ensembles doivent pouvoir être améliorés. En l’espèce, les départements de Picardie doivent pouvoir recourir à leur droit d’option, pour faire des choix allant dans le sens de l’histoire, de la culture et du développement !

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC – M. René Vandierendonck applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. René Vandierendonck, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

Chers collègues, je me tourne en premier lieu vers mes amis socialistes.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

Le groupe socialiste soutient le maintien de la région Nord – Pas-de-Calais.

Monsieur Capo-Canellas, je m’adresse à présent à l’ensemble de cet hémicycle, et je m’exprime au nom de tous ceux qui, comme vous, cherchent, avec toute la souplesse nécessaire, à résoudre ce problème.

Le Nord – Pas-de-Calais est la troisième région de France en termes de population et de PIB. Il n’a pas bénéficié d’une concertation digne de ce nom, …

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

… au sujet de cette cartographie. Notre région a pourtant fourni la preuve qu’elle portait ses regards au-delà de son seul territoire : souvenons-nous simplement du travail accompli au titre des métropoles.

Par ailleurs, rappelons que, à l’origine, le Gouvernement proposait bien de conserver telle quelle la région Nord – Pas-de-Calais.

En outre, nous avons soutenu, et nous soutiendrons encore dans la suite de nos débats, l’extension du droit d’option, pour cette raison précise : nous n’entendons pas laisser sans réponse le seul département de Picardie qui souhaite rejoindre notre région ! Cela doit être clair.

Parallèlement, convenons-en, il est relativement rare qu’un sénateur UMP, une sénatrice centriste et la majorité des sénateurs socialistes se retrouvent sur une position commune, en l’occurrence qu’ils soutiennent la légitimité des revendications du Nord – Pas-de-Calais. Ce consensus doit faire écho à une réalité profonde !

Au reste, nous le répétons depuis ce matin : nous n’écartons personne. Les représentants de l’Aisne, qu’ils soient de gauche ou de droite, nous disent que leurs projets sont déjà ailleurs. Ce territoire ne sera pas frustré de ne pas rejoindre le Nord – Pas-de-Calais. Ne serait-ce que dans leur esprit, ses habitants ne sont jamais entrés dans notre région ! C’est la vérité !

Écoutons également ce que nous dit l’Oise, et souvenons-nous que le Paris-Roubaix part de Compiègne… §

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

M. René Vandierendonck. Je n’en dirai pas plus. Comprenne qui pourra !

M. Joël Labbé applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jérôme Bignon, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

Chers collègues, laissez-moi parler, je n’ai interrompu personne !

Mme Génisson a pris des précautions oratoires, en précisant qu’elle ne dénigrait nullement la Picardie. Mme Létard, en revanche, s’est montrée extrêmement désagréable, en employant un ton que je n’imaginais pas entendre dans cette assemblée. J’en ai souvent constaté l’emploi dans un autre hémicycle où j’ai siégé, mais j’avais cru comprendre en arrivant dans cette enceinte qu’il n’était pas dans les usages du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

Nous traitons certes d’un problème important pour toutes les régions. Mais j’ai été on ne peut plus étonné que l’on puisse faire preuve d’une telle violence verbale envers la Picardie. Le Picard que je suis depuis quelques années souffre réellement de cette situation.

Hier, vous avez entendu Christian Manable qui, comme moi, siège depuis peu dans cette assemblée. Il a défendu avec beaucoup de pertinence la fusion de la Picardie et du Nord – Pas-de-Calais. Il a invoqué des motifs économiques et culturels, notamment linguistiques. Il en a mentionné bien d’autres encore, en citant par exemple le littoral commun à ces deux régions, au niveau du détroit de la Manche.

Mes chers collègues, je suis surpris que, pour protéger leur région, laquelle est riche et remarquable à bien des égards, nos amis du Nord – Pas-de-Calais en viennent à rejeter la Picardie avec tant de violence.

Ma position est extrêmement simple. Je sais bien que mes arguments ne vous convaincront pas. Mais admettez tout au moins que la Picardie ne peut rester toute seule. À mon sens, le choix du Gouvernement, à savoir la réunion de notre région et du Nord – Pas-de-Calais, est la solution la plus pertinente sur les plans géographique, socio-économique et culturel, comme au regard des infrastructures.

C’est donc le choix le plus pertinent, même s’il n’est peut-être pas idéal. Encore une fois, comme nous l’évoquions pour Champagne–Ardenne, les départements qui ne se sentent pas à l’aise dans ce découpage pourront exercer leur droit d’option. Je gage que certains s’y essaieront, je ne suis toutefois pas sûr qu’ils puissent aller au bout de la démarche ; mais, la loi la prévoyant, il sera légitime de la tenter.

Ne préjugeons pas les décisions des départements. À partir du moment où il existe un mécanisme d’option, nous pouvons avancer en confiance, ainsi que le propose le Gouvernement, même si, à mon grand étonnement, ses plus fervents supporters n’acceptent pas ses propositions.

Et l’occasion est trop belle : puisque la commission spéciale et le Gouvernement s’accordent sur une option, saisissons-la, et nous adapterons le dispositif en fonction des circonstances et des choix, département par département.

Vous supposez, et avec quelle facilité, que l’Oise souhaite absolument être rattachée à la région parisienne. Détrompez-vous ! Pour être un peu Picard aussi, je connais comme vous ce département. Toute la zone située au nord de la RN 31 est beaucoup plus picarde que vous ne semblez le croire. Les alentours de Chantilly et de Compiègne sont peut-être franciliens, mais le département est partagé en deux.

Dans ce type de débat, il convient de se méfier des effets de frontière. Il me semble que l’on s’arrête trop souvent à ces considérations.

Ma position est claire : bien qu’elle ait le sentiment de ne pas être accueillie à bras ouverts par la région Nord – Pas-de-Calais, et c’est le moins que l’on puisse dire, la Picardie la rejoindra avec joie. Or il semble ici que ceux qui sont un peu plus riches ne veulent pas des plus misérables. Selon que vous serez puissant ou misérable… Nous viendrons pourtant, et nous démontrerons que les Picards que nous sommes sont capables de contribuer à construire un projet territorial, social, humain, qui a du sens pour la France du XXIe siècle, un projet qui fera honneur à notre pays !

Très bien ! sur plusieurs travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, si je prends la parole à cet instant, avant que les débats ne nous amènent à traverser la Loire, c’est pour que l’on ne puisse pas me soupçonner de faire une intervention « localiste ».

Je suis surprise devant la teneur des débats que nous avons depuis hier.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

J’ai eu le sentiment d’assister à Bonjour Monsieur le sénateur ou Bonjour Madame la sénatrice, sur le modèle de Bonjour Monsieur le maire, cette émission diffusée il y a quelques années. Depuis hier – et cela va continuer cet après-midi et ce soir –, nous avons entendu de quoi nous faire une idée parfaite des différents départements, tous également respectables. Chacun a vanté les qualités du sien, sa particularité linguistique, gastronomique, architecturale, économique, les uns soulignant leur atout littoral, les autres leur atout montagnard, d’autres enfin l’atout fluvial. Chaque département a ses avantages !

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Je vous invite vraiment, mes chers collègues, à manifester le même souci pour l’ensemble des autres territoires, ceux qui ne font pas partie de votre région, au moment du vote sur l’ensemble, cette nuit.

Toutes les fusions de régions qui nous sont proposées emporteront des conséquences. Je suis très étonnée d’entendre un certain nombre d’entre vous refuser, avec une passion que je respecte, une fusion avec la région voisine, quelle qu’en soit la raison. Tout de même, chers collègues, arrêtez-vous un instant : les regroupements que vous refusez chez vous se produiront ailleurs, avec toutes leurs conséquences.

Les désastres sanitaires que les agences régionales de santé préparent en anticipant la fusion de certaines régions ne sont pas propres au Nord – Pas-de-Calais, madame Létard ! En votant la fusion de Rhône-Alpes et Auvergne, vous provoquerez ce que vous refusez pour votre propre région : la suppression du CHU de Saint-Étienne !

Oh ! sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Être sénateur, c’est savoir nourrir une vision d’ensemble de ce que sera ou ne sera pas un texte au moment du vote, plutôt que se soucier seulement de sa propre région.

Nous avons été plusieurs, depuis hier, à voter systématiquement les amendements qui tendaient à ne pas acter les fusions de région, ayant dit et répété que nous revendiquions le temps nécessaire à une consultation de la population. Nous voterons donc ces amendements

Très bien ! sur certaines travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Je crois cependant que nous avons besoin d’élargir notre vision. Certes, et cette séance restera pour moi exceptionnelle à ce titre, j’ai découvert que nous étions visiblement tous très bons dans la promotion touristique de nos départements.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Cela me rappelle mes années d’école primaire, quand sept bons points donnaient droit à une petite image d'Épinal sur les départements de France…

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Eh oui, car j’ai connu cela aussi, monsieur Bas. Il y a des résistances dans l’éducation nationale, et certaines maîtresses ont distribué des bons points jusque récemment.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Nous avons au moins ce point en commun !

Mais sortons de ces images d’Épinal : c’est d’une réflexion de fond que nous avons besoin ! Si, plutôt que de nous demander ce qu’il fallait fusionner ou non, nous avions commencé par nous demander à quelles fins nous le faisions, en évoquant les compétences, nous aurions peut-être connu un débat plus sain…

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

… et en tout cas moins « territorialisé ». Je crains pourtant qu’il ne continue ainsi, et tard dans la nuit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Le débat de ce matin est profondément décevant.

Cette assemblée a montré à plusieurs reprises au cours de son histoire qu’elle était capable d’avoir une vision de la France décentralisée, capable de placer le citoyen au cœur de sa réflexion, capable de rechercher l’organisation des services et de la démocratie la mieux adaptée à la satisfaction des besoins de nos concitoyens.

Aujourd’hui, nos concitoyens souffrent de la crise et sont inquiets de notre organisation. Ils attendent des réponses, non pour nous, mais pour eux.

Nous leur donnons pourtant le sentiment que nos débats actuels sont des débats d’élus, des débats de territoires, et pas des débats de citoyens, même si je n’ignore pas la force du lien qui existe entre le citoyen et ces questions.

Nous passons à mon sens à côté de la mission du Sénat aujourd’hui, qui est de répondre aux Français. Plutôt que de nous demander qui doit aller là, qui doit aller ailleurs, sachons nous poser les vraies questions : comment organiser la République la plus efficace, dans l’intérêt des citoyens, pour les citoyens ? Comment faire fonctionner les services publics ? Comment articuler la proximité et la puissance ? Car nous aurons toujours besoin de l’une et de l’autre.

Oui, il nous faudra sans cesse tenter de rassembler des outils de puissance, pour porter des grands projets, et des outils de proximité, pour comprendre les aspirations des gens. Cette logique-là était à l’œuvre dans la réflexion commune que le Sénat avait engagée.

Et c’est ce Sénat rassemblé, ce Sénat qui croit à une certaine vision de la France décentralisée au point de l’avoir inscrite dans la Constitution, qui va en définitive donner le sentiment qu’il est agi par des égoïsmes territoriaux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Au fond, ce débat fait une sorte de tête-à-queue. Nous étions partis pour tracer une carte régionale et, chemin faisant, nous nous apercevons que chacun voudrait dessiner la sienne, que l’Alsace a raison - elle connaît ses circonstances -, que le Nord - Pas-de-Calais a raison - il connaît les siennes. Nous finirions presque par tous nous entendre sur l’idée de rendre aux régions l’organisation de leurs territoires !

Qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie, monsieur le ministre, qu’il n’y a, dans ce projet, ni vision ni autorité !

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Il n’y a pas d’autorité parce qu’il n’y a pas de vision. Ce matin, notre débat est privé de ligne directrice. Pourquoi ? Parce qu’il n’y a pas de vision. Et, puisque, au total, on manque d’autorité, la France, avec ses charmes et ses talents, mais aussi sa diversité, se dit que chacun pourrait bien avoir autorité sur son propre territoire. Voilà aujourd’hui notre grande faiblesse !

Pourtant, ne soyons pas pessimistes. Vous allez nous donner une nouvelle chance avec la discussion du deuxième projet de loi, qui aurait dû être le premier, au cours de laquelle nous aborderons le contenu. Car nous discutons aujourd’hui des récipients, sans évoquer leur contenu.

Donc, nous y viendrons, au contenu, mais vous ne nous ferez pas voter de grandes régions pour faire de la proximité ! Vous ne nous ferez pas voter des choses absurdes, comme de grandes régions chargées de s’occuper pour cinq, dix, quinze, vingt ou trente départements, de tourisme, de terrains de camping, de relations humaines ou d’action sociale !

C’est le débat sur les prestations et sur l’action auprès des citoyens qui va compter. Nous reprendrons alors très probablement la carte, parce que nous nous apercevrons que ce que l’on aura dessiné au nom d’une somme de différences et de diversités manquera forcément de l’unité recherchée par le citoyen, seule à même de garantir la prestation attendue de la démocratie.

Je trouve donc cette discussion décevante, mais je vous donne rendez-vous, mes chers collègues, sur la question des compétences, parce que c’est à ce moment-là que nous aurons le vrai débat. Nous devrons alors véritablement définir les périmètres pertinents pour les compétences pertinentes.

Nous pouvons continuer à discuter ainsi, mais nous manquons le grand rendez-vous, celui du service aux Français !

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas. Je souhaite tout d’abord dire au Premier ministre Jean-Pierre Raffarin que, si le Gouvernement n’a pas de ligne directrice

M. Roland Courteau s’esclaffe.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ce rapport nous engage dans une direction précise, simple, lisible, claire, celle de l’amélioration du service à nos concitoyens par une organisation territoriale qui réserve à l’échelon de la région, et de la grande région, l’impulsion pour le développement économique, la croissance et l’emploi, et assure au niveau départemental la mutualisation de services et d’infrastructures de proximité. Tel est notre cap !

Dans cette première étape de la discussion, qui vient effectivement avant l’étape principale, révélant ainsi une procédure véritablement mal conçue, ce cap doit être visible. C’est celui qu’a retenu notre commission spéciale, réserve faite de sa position, confirmée par le Sénat, concernant la collectivité territoriale particulière que les élus d’Alsace entendent constituer depuis longtemps.

À ce stade de la discussion, il me semble que chacun peut exprimer ce qu’est son idéal, pour sa propre région. Nous ne faisons toutefois que démontrer ainsi la nécessité d’un arbitrage en fonction de critères et de principes d’intérêt général au niveau national.

Or c’est bien le Parlement qui est le mieux placé pour rendre cet arbitrage et, au sein du Parlement, le Sénat, en raison de sa vocation propre de représentation des collectivités territoriales, doit avoir son mot à dire et ne pas accepter de rester à l’écart du débat.

Petit-fils de Picard, fils de Haut-Normand, élu de Basse-Normandie, je pouvais présenter un amendement pour faire valoir un dessein idéal qu’il me serait légitime de nourrir : celui de la grande région picardo-normande. Je ne l’ai pas fait parce que j’estime que la carte qui sortira des travaux du Sénat devra être guidée par l’application de critères dépassant mon propre jugement et mon propre plaisir, considération qui ne serait d’ailleurs pas, en l’occurrence, dénuée de tout fondement d’intérêt général.

Il me semble que nous gagnerions à tenir compte du travail très approfondi qui a été réalisé par notre commission spéciale, et à nous en tenir, pour les amendements identiques dont nous discutons, à sa proposition de constituer, à l’égal des autres régions retenues dans la carte, une région Nord – Pas-de-Calais - Picardie. De mon point de vue, elle est judicieuse et cohérente en ce qu’elle permet l’agrandissement des régions actuelles et la limitation du nombre de régions dans notre pays. À condition toutefois, j’y insiste, que l’on en reste à un système où la région est un véritable stratège, qui ne s’enlise pas dans la gestion quotidienne et qui a une capacité d’impulsion pour le développement des territoires qui la composent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

On nous a proposé précédemment de rattacher la Picardie à un ensemble régional comportant la Lorraine, à près de 400 kilomètres de distance ! Maintenant, on veut séparer la Picardie du Nord – Pas-de-Calais, alors même que ces deux régions se touchent et qu’elles ont en commun la côte de la mer du Nord, ainsi que toutes les grandes infrastructures – le TGV, l’autoroute, etc.

À un moment donné, un minimum de cohérence s’impose !

Je n’ai pas l’intention de me mêler des affaires de la Picardie ou de celles du Nord – Pas-de-Calais mais, vu de l’extérieur, et très humblement, on peut se poser la question de savoir s’il est plus pertinent de rattacher la Picardie à la Lorraine ou bien au Nord –Pas-de-Calais…

Je n’habite ni le Nord – Pas-de-Calais ni la Picardie, mais les réactions exprimées à l’égard de la Picardie sont apparemment un peu surprenantes.

Apparemment, disais-je, parce que, et c’est heureux, la presse – elle n’a pas toujours que du bon, mais elle permet parfois d’utiles éclairages ! – nous apprend pourquoi certains se comportent comme des fous furieux pour empêcher le rattachement de la Picardie au Nord – Pas-de-Calais.

(M. Roland Courteau s’exclame.) Il faut appeler un chat un chat ! Voilà la vraie raison ! Il n’y en a pas d’autres !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

C’est en effet en lisant la presse relative aux débats qui se sont déroulés à l'Assemblée nationale que l’on comprend : Mme Aubry n’avait pas grand souci de l’intérêt des gens et il s’agissait surtout d’une question de politique politicienne, car elle redoutait que la nouvelle région Picardie – Nord – Pas-de-Calais n’échappe à la mainmise du parti socialiste. §

J’accepte tous les arguments techniques qui peuvent être avancés, mais, quand on connaît les arrière-pensées sur un dossier tel que celui-ci…

De deux choses l’une : ou bien les journalistes et les observateurs spécialisés sont tous des menteurs – c’est toujours possible ! –, ou bien la raison donnée est la bonne, ce dont je suis persuadé.

Il s’agit là d’une affaire purement et médiocrement politicienne, qui ne s’inscrit pas du tout dans le souci de l’intérêt général. Et c’est parce que c’est une affaire politicienne, et non parce que je veux me mêler des problèmes de la Picardie et du Nord – Pas-de-Calais, que je voterai contre ces amendements identiques.

D’ailleurs, ce sont des élus socialistes – Mme Aubry elle-même ! – qui ont dit très clairement qu’il faudrait faire une croix sur la présidence de la nouvelle région lors des prochaines élections régionales si le Gouvernement laissait faire une chose pareille, des arguments qui n’ont jamais été reniés par leurs auteurs.

De telles arrière-pensées sont graves. Nous créons des régions pour cinquante ou soixante ans. On ne sait pas, dans soixante ans, si le parti socialiste ou le Front national, que cible Mme Aubry, existeront encore ! Vous sacrifiez la cohérence d’un découpage à l’échéance de décembre 2015 pour satisfaire à des considérations politiciennes ; je ne m’associe pas à une telle opération !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Monsieur le ministre, ce n’est pas la fusion des régions que vous avez organisée, c’est bien plutôt la confusion des régions !

On en revient toujours au même point : vous avez mis le feu aux territoires ! L’affaire est grave. Quand on touche au patrimoine génétique, il peut y avoir – et c’est normal ! – des répercussions.

Certes, il faut s’engager dans la voie de l’innovation, mais tout en s’attachant au principe de précaution, qui existe dans notre République. Or, en la matière, les précautions n’ont pas été prises. On en arriverait presque à s’écharper !

Alors, sachons raison garder.

L’article important est celui qui est relatif au détachement des territoires. Nous en sommes tous conscients, le découpage des régions n’est pas uniquement affaire de cartographie : tout dépend de la réalité des territoires, qui voit s’imbriquer des départements les uns dans les autres. Certes, ce n’est pas encore suffisant, mais donner la possibilité à des départements de se détacher de la carte martyre que va être cette carte régionale constitue déjà un pas.

On peut avoir des idées différentes sans s’écharper.

Pour ma part, je reste dans la même logique : il faudra, pour des régions sans métropole, avec un PIB peu élevé et une densité de population relativement similaire, une massification de la population. J’attire votre attention sur ce point, mes chers collègues, c’est le seul moyen d’avoir des régions stratégiques, que l’on tirera vers le haut, à condition, bien sûr, de ne pas leur confier ensuite des compétences de gestion.

Je soutiens ces deux amendements identiques. Je comprends la position de nos amis du Nord – Pas-de-Calais, qui est la même que celle de nos amis Alsaciens : il faudra rationaliser là où c’est possible, et il n’y a pas de temps à perdre si l’on veut faire du développement.

Malheureusement, dans les régions génétiquement modifiées qui vont être créées, il faudra forcément prendre du temps pour essayer de se comprendre, de trouver un destin commun ; l’affaire sera particulièrement délicate.

Il n’empêche, si nous avons cette approche, qui n’est en rien dogmatique, alors, dans certains territoires – c’est ce que propose l’Alsace, et c’est ce qui peut être fait dans le Nord – Pas-de-Calais –, le conseiller territorial doit être mis en place, tandis que, dans d’autres régions, beaucoup plus importantes parce que les territoires y sont plus faiblement peuplés, le maintien du département est indispensable, à condition que celui-ci reste bien sur ses deux pieds, sur ces deux vocations, celles d’amortisseur social, d’un côté, d’aménageur du territoire, de l’autre.

Telle est la logique qui m’a conduit à vous proposer un certain nombre d’amendements et qui me pousse à soutenir les amendements défendus par des élus du Nord – Pas-de-Calais.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous vous exprimez sur la fusion du Nord – Pas-de-Calais avec la Picardie. Je comprends les problèmes que cela peut poser aux territoires concernés, mais d’autres collectivités, notamment dans la région Picardie, considèrent que cette fusion est tout à fait opportune et souhaitable.

Permettez-moi tout d’abord de procéder à quelques rappels.

Dans la carte initiale du Gouvernement, la fusion de la Picardie avec le Nord – Pas-de-Calais n’était pas proposée. C’est l'Assemblée nationale qui l’a décidée, et le Gouvernement, après qu’une majorité l’a adoptée, en a pris acte.

Vous venez de dire votre souhait, en vous exprimant par un vote, de ne pas voir la région Champagne-Ardenne et la région Picardie fusionner. Mais, à un moment donné, il faudra bien que, dans l’apaisement et le calme, et tout en respectant les arguments de chacun, nous essayons de trouver une solution conforme à l’intérêt général.

Monsieur Savary, notre carte, dites-vous, sèmerait la confusion et mettrait le feu aux territoires. Dans le contexte actuel, sachons raison garder : essayons, les uns et les autres, de tenir des propos qui permettent de construire de bons compromis.

Si la carte était évidente, les débats seraient déjà achevés. Mais nous passons des heures sur chaque proposition de fusion de régions, preuve que cette carte n’a rien d’évident !

Vous avez tous parlé de la carte évidente que le Gouvernement n’aurait pas eu l’intelligence d’élaborer, mais, à tous vous écouter, je cherche où elle est… Il y a autant de propositions qu’il y a de parlementaires, chacune reposant sur des considérations politiques, d’aménagement du territoire, d’infrastructures, de développement économique et de différences de potentiel fiscal, qui vont obérer la démarche. On est donc bien là face à un exercice difficile, qui est, pour autant, nécessaire.

Sans nous suspecter, sans nous invectiver, tentons de trouver des solutions d’intérêt général sur le sujet qui nous occupe, sauf à nous retrouver dans une situation similaire à celle qu’a connue le Sénat au début de l’été, lorsqu’il a décidé de ne pas débattre de la carte territoriale, mais de s’emparer du sujet pour proposer, finalement, la même carte que celle qui existait avant que la réforme ne soit conçue, c'est-à-dire une carte à vingt-deux régions…

Franchement, essayons d’avancer !

Je comprends et respecte les arguments de Mme Létard, qu’elle a développés avec passion, ceux de Michel Delebarre et ceux de René Vandierendonck, défendus avec beaucoup d’intelligence, de finesse et de talent, comme à l’accoutumée. Mais, à un moment donné, il faut bien dégager une carte, et trouver les bons arguments pour ce faire.

Pour ce qui concerne la Picardie et le Nord – Pas-de-Calais, si l’on considère les infrastructures, l’université, les politiques maritimes, il y a bien des sujets sur lesquels des coopérations sont possibles, ainsi que Catherine Génisson l’a dit précédemment. Certes, des considérations politiques ou de temporalité peuvent s’exprimer, que je comprends, mais nous n’avons pas besoin de mettre autant de passion à débattre, d’autant que le sujet est compliqué. Or la complexité ajoutée à la passion conduit généralement à l’impasse.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

C'est la raison pour laquelle je vous demande simplement, mesdames, messieurs les sénateurs, d’avancer de façon pragmatique, en vue de parvenir aux compromis qui soient les plus intelligents possible, même si, je le répète, je comprends tous vos arguments.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme Delphine Bataille, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Bataille

Les amendements identiques dont nous discutons prévoient le « dégroupage » des régions Nord – Pas-de-Calais et Picardie. À ce stade, je dirai quelques mots de la manière dont je vis la situation en tant que Nordiste.

La fusion de ces deux régions représente une évolution historique logique, mais, dans le sud du Nord – oui, ça existe ; oui, on y vit ! –, on ne voit pas les choses de la même manière que depuis la métropole ou depuis le littoral. Compte tenu de la proximité géographique, on se sent autant picard que nordiste.

Nous avons des caractéristiques rurales communes : la sociologie de la population, un niveau de développement économique comparable et un fonds culturel et linguistique, comme l’ont souligné de nombreux collègues. D’ailleurs, les linguistes appellent notre patois « le picard ».

Au-delà, nous avons vécu les mêmes drames de l’histoire. Je veux parler, notamment en cette période de commémoration, de la guerre de 1914-1918 et des ravages qu’elle a provoqués dans ces régions.

Par ailleurs, du fait de son périmètre, cette nouvelle région pourrait voir renforcée sa dimension européenne, tandis que de nombreux aménagements, dont certains sont en souffrance depuis trop longtemps, seraient favorisés. Je pense notamment à la RN 2, et singulièrement à la liaison de Maubeuge et Avesnes-sur-Helpe à Vervins et Laon, en Picardie, ainsi qu’aux liaisons ferroviaires Intercités de Cambrai et Maubeuge vers Paris via Saint-Quentin. Sans oublier l’incontournable canal Seine-Nord Europe, dont on a déjà beaucoup parlé, réalisation que ces régions ont soutenue ensemble et qui permettra la structuration de l’axe transrégional.

Voilà pourquoi je ne puis accéder à l’idée qu’il n’y aurait aucune possibilité de coopération entre ces deux régions et, par conséquent, aucune pour le Nord – Pas-de-Calais. Car, si ce n’est pas avec la Picardie, nous avons le choix, entre l’Angleterre et la Belgique, avec lesquelles, du reste, nous développons des partenariats efficaces.

Ces raisons, que j’ai exposées très brièvement et sans les développer, me conduisent à ne pas voter ces amendements identiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Sans doute sommes-nous entrés dans ce débat avec le sentiment qu’il était piégé, mais que le Sénat, du fait de son expertise, devait imprimer sa marque dans l’élaboration de la carte et faire valoir sa vision, qui n’est ni celle du Gouvernement ni celle qui résulte des votes de l’Assemblée nationale.

La commission spéciale nous a proposé un certain nombre de choix, auxquels, globalement, le groupe UDI-UC adhère. Nous venons d’ailleurs de confirmer l’un de ces choix, en ce qui concerne l’Alsace ; ce faisant, nous avons commencé d’affirmer une vision sénatoriale, ce que je crois extrêmement positif.

Chacun s’exprime avec passion et engagement, chacun apporte au débat son vécu, ce qui est normal de la part d’élus locaux attachés à leur territoire.

Je précise que mon groupe, qui suit les orientations globales de la commission spéciale, laissera à ses membres une liberté de vote sur ces amendements identiques n° 43 et 70, considérant que la question posée mérite tout notre intérêt, de même que pour l’Alsace à l’instant ; on peut sans doute d’ailleurs établir une analogie entre les deux.

Le Sénat progresse vers une vision nouvelle du projet de redécoupage et il me semble que c’est dans ce contexte qu’il convient d’envisager ces amendements identiques.

Enfin, je le répète à l’intention des collègues qui viennent de s’exprimer, le fait que nous cherchions à retoucher la carte du Gouvernement et celle de l’Assemblée nationale n’enlève rien aux objections que nous formulons s’agissant de la méthode du Gouvernement et de son absence de vision.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas les amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures, pour les questions d’actualité au Gouvernement.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.