Intervention de Thani Mohamed Soilihi

Réunion du 4 novembre 2014 à 14h30
Simplification de la vie des entreprises — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

Selon l’OCDE, la complexité administrative, ou « l’impôt papier » comme on l’appelle également, coûterait aux entreprises françaises entre 60 et 80 milliards d’euros par an, soit 3 % à 4 % du produit intérieur brut !

L’urgence et l’attente sur ces sujets justifient donc l’engagement par le Gouvernement de la procédure accélérée et le recours aux ordonnances pour certaines dispositions.

Nous serons évidemment extrêmement vigilants lorsque le projet de loi de ratification sera soumis au Parlement, et nous vous demandons instamment, monsieur le secrétaire d’état, d’associer les parlementaires à la rédaction des ordonnances.

Le texte qui nous est aujourd'hui soumis est néanmoins le fruit d’une démarche collaborative tout à fait rassurante, à laquelle vous avez associé, et continuez d’associer, les acteurs économiques et les citoyens.

Il est ainsi la traduction législative de quatorze des cinquante recommandations du Conseil de la simplification pour les entreprises mis en place par le Gouvernement au mois janvier dernier, dont les missions sont d’accélérer la mise en œuvre du programme de simplification à destination des entreprises, d’en garantir la cohérence et, enfin, de proposer de nouvelles pistes de simplification. Cette instance associe administrations et chefs d’entreprise pour répondre au plus près aux besoins réels des entreprises. Vous en avez exercé, monsieur le secrétaire d’État, la co-présidence avec Guillaume Poitrinal, lui-même chef d’entreprise, avant d’accéder à vos actuelles fonctions et d’être remplacé par le député de la Côte-d’Or, Laurent Grandguillaume.

Je tiens à rappeler pour mémoire que les trente-six recommandations restantes n’ont pas été abandonnées. Soit elles ont déjà été mises en œuvre par ordonnances, soit elles sont d’ordre réglementaire.

Cette démarche participative est tout à fait innovante et moderne, car vous avez également mis en place, monsieur le secrétaire d’État, des sites internet pour permettre aux citoyens de découvrir l’ensemble des mesures de simplification en cours et de suivre leur avancement, ou encore de proposer des idées de simplification de l’administration.

Pour toutes ces raisons, je m’étonne que la majorité sénatoriale qui, bien qu’elle ait approuvé la philosophie du présent projet de loi dont elle reconnaît l’inscription dans un processus de simplification de l’environnement juridique des entreprises, semble néanmoins considérer qu’il s’agit d’un texte fourre-tout, dont le contenu est décevant et manque d’ambition. Selon elle, les dispositions qu’il contient ne seraient pas à la hauteur des attentes et des besoins des entreprises et ne constitueraient pas un véritable « choc de simplification ». Pourtant, ces mesures ont été réclamées par les entreprises elles-mêmes !

Ce projet de loi comporte des dispositions d’ordre législatif, mais je rappelle que le volet réglementaire ne doit pas être oublié. La simplification de la vie des entreprises est en perpétuel mouvement. Cinquante nouvelles mesures ont été adoptées jeudi dernier et d’autres suivront très prochainement.

J’ai moi-même déposé une proposition de loi tendant à simplifier et à clarifier le code de commerce – je vous remercie de l’avoir rappelé, monsieur le rapporteur – et j’espère moi aussi que ce texte sera très rapidement soumis au Sénat.

Le présent texte contient certes des mesures éparses, qui, prises séparément, peuvent paraître négligeables pour nombre d’entre vous, mes chers collègues, mais, mises bout à bout, elles créeront un véritable choc, en redonnant de la confiance, en créant de la croissance et des emplois.

Avec l’extension de l’instrument du rescrit fiscal, par exemple, on va véritablement vers le « choc de simplification ». Cet outil, qui permet à une entreprise d’interroger l’administration, dont l’avis est opposable juridiquement, sur l’interprétation d’un texte en fonction de sa situation, figure d’ailleurs dans une proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale par des députés UMP. Le succès de la procédure et son utilité avérée pour les entreprises appelaient l’extension de son champ d’application à d’autres domaines de l’action administrative, tels que le droit du travail, le droit de la concurrence, ou encore le droit de la consommation. C’est désormais chose faite.

J’évoquerai également le principe du « silence vaut accord », qui renverse celui qui est en vigueur depuis la publication de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, dite « loi DCRA », selon lequel le silence gardé par l’administration pendant deux mois sur la demande qui lui est adressée par un usager vaut rejet de celle-ci. Près de 1 200 procédures devraient être soumises à cette règle, ce qui signifie qu’environ deux tiers des régimes d’autorisation deviendront plus simples et plus rapides. Il s’agit là d’une véritable révolution administrative qui facilitera les relations entre les Français et leur administration.

L’habilitation ayant été jugée trop large, l’article 4 a malheureusement été supprimé. Le Gouvernement nous fera, je l’espère, d’ici à la fin de la séance, une liste exhaustive des procédures administratives concernées afin de rassurer mes collègues réticents.

Le premier bilan que l’on peut dresser après dix-huit mois d’action est positif, même si l’on sait qu’il reste encore beaucoup de travail à accomplir. Le Gouvernement marque sa volonté d’agir de concert avec les acteurs économiques et d’agir vite. On ne peut que souscrire à un tel objectif.

Il serait fort dommageable que le vote du présent projet de loi soit en quelque sorte plombé par la suppression de deux mesures, le compte personnel de prévention de la pénibilité et l’obligation d’information préalable des salariés en cas de cession d’une entreprise de moins de 250 salariés, mesures dont le maintien nous semble indispensable.

Pour conclure, permettez-moi de vous faire part d’un regret. La commission des lois, dont je suis membre, a été saisie de ce texte. Elle a décidé d’en déléguer au fond trente et un des articles à la commission des affaires économiques, à la commission des affaires sociales, à la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire et à la commission des finances. À titre personnel, je pense qu’un tel éclatement entre cinq commissions nuit à la qualité du travail parlementaire. La transversalité des sujets abordés dans le projet de loi aurait nécessité à mon sens la création d’une commission spéciale, comme ce fut le cas à l’Assemblée nationale.

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