J’ai quelques scrupules à intervenir de nouveau, mais le sujet est d’importance.
Vous indiquez, monsieur le président de la commission des lois, que remettre en cause le pouvoir d’un président de juridiction constituerait un précédent curieux. Or il ne s’agit pas de cela : avec cet amendement, le président de juridiction peut toujours désigner le juge des libertés et de la détention, et il continuera à le faire.
Nous désirons seulement apporter une sécurité supplémentaire, non pas en attribuant à l’exécutif une prérogative nouvelle, mais en démocratisant le fonctionnement des juridictions. En clair, il s’agit de permettre que l’assemblée des magistrats du siège du tribunal de grande instance se prononce sur le bien-fondé de la décision de mettre fin aux fonctions d’un juge des libertés et de la détention.
Cette fonction a pris tellement d’importance que tout le monde convient aujourd’hui que le juge qui l’exerce doit être reconnu comme magistrat spécialisé. Or il faudrait pour cela, je le répète, adopter une disposition qui relève du domaine de la loi organique.
Je précise néanmoins, monsieur le président de la commission des lois, que la conférence nationale des présidents de tribunaux de grande instance, dont vous pensez que nous allons dépouiller les membres de leur pouvoir, est également favorable à la mesure dont nous discutons. Dans le cadre de la réflexion sur la réforme de la justice au XXIe siècle, j’ai en effet procédé à de multiples consultations. La conférence des premiers présidents de cour d’appel, la conférence des procureurs généraux, les organisations syndicales et professionnelles : sur ce point précis, tout le monde est d’accord ! Pour tout vous dire, j’avais même prévu de faire la modification par décret, tant l’accord est général. Le Conseil d’État estime, quant à lui, qu’il faut une base législative, raison pour laquelle je m’adresse à vous.
Il s’agit seulement, mesdames, messieurs les sénateurs, de démocratiser le fonctionnement des juridictions. D’autres mesures vont également dans cette direction : nous avons par exemple décidé d’étendre les commissions d’études ; plusieurs décrets seront bientôt signés, afin de permettre, sur un certain nombre de sujets, un fonctionnement mobilisant davantage les ressources humaines au sein de nos juridictions. C’est aussi le sens du dispositif que je vous propose, auquel, je le répète, la conférence des présidents est favorable.