Intervention de Vincent Delahaye

Réunion du 6 novembre 2014 à 9h30
Programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Vincent DelahayeVincent Delahaye :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je dois vous confier ma déception – un Anglais parlerait de « lassitude » – celle-là même que beaucoup de Français que je croise me confient également, quand ce n’est pas de la colère.

Depuis que j’ai été élu sénateur, voilà trois ans, de loi de programmation en programme de stabilité, de budget en budget, la seule prévision qui ait été vraiment vérifiée, de texte en texte, c’est celle que nous avons faite à l’UDI, certains que nous étions que vos objectifs ne seraient pas tenus, car ils péchaient systématiquement par optimisme. Et, chaque fois, les scénarios émis pour bâtir un projet de budget ont été démentis par les suivants. Je crains malheureusement que ce texte ne déroge pas à la règle.

Si je reprends les chiffres d’il y a six mois, ceux du dernier programme de stabilité – on ne pas peut dire que cela soit vieux ; six mois, depuis avril 2014, ce n’est pas une éternité ! – l’écart de croissance, l’écart de déficit nominal, l’écart de déficit structurel, bref, quel que soit le bout par lequel on prend le problème, ils sont tous revus à la baisse ou à la hausse. L’objectif est repoussé de deux ans – excusez du peu ! –, à peine six mois après qu’un retour à l’équilibre en 2017 a été affirmé.

Non, la seule prévision qui tienne, monsieur le secrétaire d’État, c’est que nous ne tiendrons pas nos engagements, cette fois-ci pas plus que les précédentes, et que nous pouvons préparer dès aujourd’hui les documents qui nous seront fournis dans six mois – ce n’est pas moi qui le dis, c’est le Haut Conseil des finances publiques, que vous avez créé et qui juge « optimistes » vos prévisions de croissance, notamment sur 2016 et 2017. Et, avant même d’être examiné par le Parlement, votre projet de loi de finances est déjà contredit par la Commission de Bruxelles, qui révise la croissance à la baisse et le déficit à la hausse !

Depuis trois ans, quatre lois de finances, deux lois de programmation, trois programmes de stabilité, et autant d’aveux que ce gouvernement – je suis triste d’en faire le constat ici – n’a de prise sur rien. Et, pendant ce temps, le Président fait comme Pénélope qui attendait Ulysse, il regarde la mer, se disant que la croissance finira bien par rentrer au port…

Bon nombre de Français, pour ceux qui s’intéressent encore à ce type de débat – s’il y en a ! – doivent se demander : « À quoi bon ? » À quoi bon tant de débats, tant de mots, tant de courbes, tant de temps passé en vain, quand chacun sait bien que la réalité nous échappe et qu’aucune des mesures qui ont été prises par ce gouvernement n’a permis d’inverser la courbe du chômage, pas plus qu’elles n’ont réussi à améliorer l’état économique du pays ou le moral des Français !

La vraie question qui se pose à nous est de savoir comment reprendre la main, comment trouver ce qui peut redonner confiance aux Français et leur faire dire que, oui, cette fois, les prévisions affichées sont justes et que nous avons des chances de les réaliser.

D’abord, il ne faut pas leur mentir ! Il est fini ce temps où prévalait le principe selon lequel l’optimisme entraînait l’optimisme tandis qu’un surcroît de croissance provoquait un sursaut de consommation et d’élan entrepreneurial. Il est fini le temps de la méthode Coué !

Bien au contraire, les Français attendent qu’on leur tienne un langage de vérité. Ils attendent que les prévisions, même modestes, se réalisent enfin.

Mieux vaut donc un excès de prudence, mieux vaut de bonnes surprises à la fin qu’un excès d’optimisme et des déceptions supplémentaires, qui sont, chaque fois, un coup de plus sur la tête des Français, un coup de plus qui fait beaucoup plus mal que le précédent !

Renoncez donc, monsieur le secrétaire d’État, à la stabilité des emplois publics. Ce n’est pas en vous contentant de maintenir stables des dépenses qui représentent à elles seules 40 % des dépenses du budget général de l’État que nous pourrons amener les dépenses publiques à passer en dessous d’un niveau aujourd’hui élevé au point d’en être insupportable. Le bon sens commande de réduire les effectifs de l’État en ne rendant pas tabou le retour aux 39 heures dans la fonction publique.

Il faut également sans tarder remettre le débat des retraites sur la table. Il y a deux ans, vous n’avez pas eu le courage d’aller assez loin et nous savons tous qu’il faudra y revenir. Pourquoi attendre ?

Il faut remettre en discussion les conditions d’attribution des allocations chômage. Tout le monde sait qu’il faudra y venir. Pourquoi attendre ?

Le Président de la République s’était engagé pendant la campagne à fusionner l’impôt sur le revenu et la contribution sociale généralisée.

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