Intervention de Philippe Dallier

Réunion du 6 novembre 2014 à 9h30
Programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Philippe DallierPhilippe Dallier :

En 2011, le résultat fut de 5, 2 % pour un objectif de 6 %.

Aujourd’hui, la situation dramatique que nous connaissons, plutôt que d’en assumer la responsabilité, vous vous en défaussez sur des facteurs extérieurs : faible croissance et faible inflation, qui seraient autant de facteurs importés.

Mais, monsieur le secrétaire d’État, la faible croissance – probablement 0, 4 % en 2014 – et les prévisions pour 2015, qui oscillent entre 0, 7 % et 1 %, sont en grande partie la résultante de la politique de François Hollande depuis 2012 !

La preuve en est que la quasi-totalité des autres pays de la zone euro feront mieux que nous cette année et l’année prochaine, puisque la moyenne devrait se situer, selon l’Observatoire français des conjonctures économiques et la Banque centrale européenne, entre 0, 8 % et 0, 9 % en 2014, et entre 1, 3 % et 1, 6 % en 2015.

Même monnaie, même inflation, mêmes règles du jeu, et pourtant les résultats seront meilleurs chez la plupart de nos voisins. Cela prouve bien que des facteurs propres à la France, résultant notamment de la politique économique récessive menée depuis 2012, retardent le retour de la croissance dans l’Hexagone.

Nous n’avons pas suffisamment réduit la dépense publique pour alléger de façon suffisante les charges pesant sur nos entreprises : voilà la réalité, voilà le mal ! Car le CICE, même le Gouvernement a fini par en convenir, n’était vraiment pas à la hauteur des enjeux.

Quant à la réduction des dépenses, seul véritable levier pour réduire le déficit public, faute de croissance, vous n’avez pas vraiment voulu y recourir. Nous en payons le prix.

La création de 60 000 postes dans l’éducation nationale obère toute possibilité de diminution des effectifs, sans compter le coût de ces recrutements : 300 millions d’euros par an pendant les quarante prochaines années !

Dans le même temps, alors que nous vivons une période d’extrême tension internationale, on réduit les effectifs de l’armée de terre, qui seront bientôt moins nombreux que ceux de la gendarmerie, et on rogne sur tous les crédits d’équipements, alors que nos soldats sont, eux, de plus en plus nombreux à être envoyés en opérations extérieures.

Pour la période à venir, la stabilisation des effectifs de l’État et de ses opérateurs montre bien que vous vous refusez encore à toucher aux effectifs de la fonction publique.

Quant au taux de prélèvements obligatoires, vous prévoyez une quasi-stabilité d’ici à 2017. La pression fiscale, dans sa globalité, ne va donc pas diminuer, ou très peu.

Je terminerai en disant un mot des collectivités locales et du sort que vous leur réservez.

Le projet de loi de programmation instaure un nouvel objectif indicatif d’évolution de la dépense publique locale, dit « ODEDEL ». Soit, mais il existe déjà de nombreux ratios qui classent les collectivités territoriales par strate et par catégorie. Je n’ai pas le sentiment que cet indice synthétique supplémentaire changera grand-chose...

Le Gouvernement transmettra d’ailleurs, avant le débat d’orientation des finances publiques, un rapport au Comité des finances locales sur le respect de ce nouvel indice censé éclairer le débat.

On voit bien que l’idée est de s’inspirer de ce qui a été fait avec l’ONDAM pour encadrer les dépenses de santé. Mais les choses sont-elles comparables ?

Se pose d’ailleurs la question de la constitutionalité d’une telle mesure. Si cet indice n’était plus seulement indicatif, mais devenait une règle, il irait à l’encontre du principe de libre administration des collectivités territoriales.

Au-delà de ce problème juridique, la question de la mise en œuvre d’un tel dispositif relèvera certainement du casse-tête et je crains que nous ne soyons capables, pleins de bonnes intentions, de monter une nouvelle usine à gaz, digne, par exemple, de la complexité de nos dotations de péréquation, censées corriger les défauts d’une dotation globale de fonctionnement qui, au fil du temps, ne représente plus rien et ne permet pas de comparer les collectivités entre elles.

Pour tout vous dire, monsieur le secrétaire d'État, nous sommes très réservés sur ce point, mais l’essentiel n’est pas là ; il réside bien évidemment dans la baisse programmée de 12, 5 milliards d’euros de la DGF entre 2014 et 2017, dont l’impact sur les dépenses d’investissement des collectivités territoriales entraînera, à coup sûr, un effet récessif pour l’économie, notamment dans les secteurs du bâtiment et des travaux publics, qui sont déjà bien mal en point.

Il est certain que nous n’éviterons pas non plus une hausse sensible des impôts locaux, qui reportera ainsi sur les maires et les présidents de conseil général la responsabilité de cette hausse. Cela se traduira probablement par un recours à l’emprunt, peut-être excessif pour certaines collectivités, alors même que la baisse de la dette publique est l’un des objectifs affichés par le Gouvernement.

Monsieur le secrétaire d'État, comprenons-nous bien : je ne suis pas en train de vous dire que les collectivités territoriales doivent s’exonérer de tout effort de réduction de la dépense publique.

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