La présentation du projet de budget des outre-mer est un moment important dans un contexte de fortes tensions sur le budget de la Nation. Dans ce contexte difficile, le Gouvernement a voulu s'attacher à apporter des réponses précises aux attentes de nos concitoyens d'outre-mer. J'ai voulu que chacun de nos départements et de nos collectivités puisse trouver dans les crédits de la mission outre-mer les moyens budgétaires et financiers adaptés à ses problématiques spécifiques.
En 2015, en structure constante, le montant total des crédits de la mission s'élèvera à 2,064 millions d'euros en crédits de paiement, soit une progression globale de 0,3 % par rapport à 2014. Sur l'ensemble du budget triennal, cette progression des crédits de paiement atteindra 5,5 %, hors les dépenses de personnel. Si on fait abstraction de la mesure de périmètre qui touche les exonérations de charges sociales, la progression est encore beaucoup plus marquée, atteignant 2,7 % en évolution annuelle et 8,3 % sur trois ans.
Le budget des outre-mer pour 2015 fait en premier lieu ressortir la priorité qui est faite à l'emploi. Avec plus de 1,12 milliard d'euros, le poste de compensation des exonérations de charges sociales est de loin le plus important de la mission outre-mer.
Son importance est appelée à se renforcer puisque les arbitrages que j'ai obtenus en faveur des secteurs exposés se traduiront par un niveau supérieur d'exonération de charges sociales. En 2016, les secteurs les plus exposés feront l'objet d'allègements de charges renforcés à hauteur ou à l'équivalent d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) renforcé, au-delà de 9 %. Je souligne également que les entreprises des départements d'outre-mer bénéficieront par ailleurs d'un CICE qui est fixé au taux de 7,5 % en 2015 et à 9 % en 2016, contre 6 % en métropole. En régime de croisière, l'impact économique du CICE dans ces départements atteindra 880 millions d'euros. Une structure établie dans un département d'outre-mer et qui aurait une masse salariale de 260 000 euros bénéficiera d'un avantage fiscal de plus de 23 000 euros, contre 15 000 euros environ en métropole.
Ce budget est également, conformément aux orientations présidentielles, axé sur la jeunesse et la formation. Avec des crédits qui progressent de 3% sur le budget triennal pour atteindre 154 millions d'euros par an en 2017, le service militaire adapté (SMA) est doté de moyens lui permettant de remplir les objectifs du programme SMA 6.000. Ce sera également une augmentation des crédits de l'agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) qui passent à plus de 35 millions d'euros, en intégrant la dotation de l'association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA). Mon objectif pour LADOM est de conforter l'opérateur dans ses missions et de sanctuariser les crédits affectés au « passeport mobilité études » et au « passeport formation professionnelle ». J'ai pris dans ce domaine plusieurs décisions importantes : les crédits du passeport mobilité études seront augmentés de 2 millions d'euros ; nous créerons la possibilité pour les candidats aux concours qui veulent tenter une deuxième chance de bénéficier d'un deuxième billet dans la même année. Enfin, le deuxième accompagnant d'un enfant mineur pourra bénéficier d'une aide, lorsque l'accompagnant principal bénéficie d'une prise en charge par la sécurité sociale. Vous le savez, ces choix politiques impliquaient en parallèle de rationaliser les prestations sur l'aide à la continuité « tout public ». Rationaliser ne signifie pas dégrader : pour la majeure partie des bénéficiaires, le changement de rythme du droit au déplacement n'aura aucune incidence sur leurs habitudes de déplacement. Par ailleurs, le Gouvernement garantit le maintien du niveau d'aide majorée à son taux actuel, faisant ainsi le choix de se concentrer sur le coeur de cible, à caractère social, du dispositif. Je crois nécessaire de réaffirmer ce caractère social du dispositif de continuité territoriale, qui doit être tourné principalement vers les jeunes et les catégories sociales défavorisées, ce qu'on a eu parfois tendance à oublier, dans certains endroits.
Le projet de budget pour 2015 poursuit les efforts qui ont été consentis, depuis 2012, dans le domaine du logement, et particulièrement du logement social. En complément du dispositif d'incitation fiscale à l'investissement, les crédits de la ligne budgétaire unique sont maintenus en termes de moyens de paiement pour favoriser la réalisation des opérations lancées. Le projet de budget pour 2015 représente de 247 millions d'euros en autorisation d'engagement qui resteront stables pendant trois ans. Les crédits du fonds régional d'aménagement foncier et urbain et de la résorption de l'habitat insalubre (RHI) seront dimensionnés au regard de la consommation des années précédentes et l'aide à l'accession de l'habitat privé sera maintenue à hauteur de 10 millions d'euros.
Dans le domaine du logement intermédiaire, nous avons, conformément aux engagements du Président de la République, assuré l'application outre-mer du plan national en faveur du logement, en particulier en faveur du logement intermédiaire. Le plafond du « dispositif Duflot-Pinel » s'élève à 18 millions d'euros : c'est une importante avancée qui va faciliter la réalisation d'opérations mieux adaptées au marché locatif des outre-mer.
Dans la logique de la stratégie en faveur du logement que j'ai présentée aux acteurs institutionnels, nous avons pu enregistrer un premier succès avec l'adaptation du bouquet de travaux prévu dans le cadre du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) aux caractéristiques des géographies ultramarines. Je suivrai avec intérêt les travaux du Parlement sur ce point, plusieurs amendements significatifs étant susceptibles d'être déposés pour améliorer encore le dispositif.
Sur la rénovation des immeubles sociaux de plus de vingt ans ou bien la réouverture de la défiscalisation pour la location en accession sociale, je me tiendrai naturellement à vos côtés pour faire avancer les propositions qui me paraissent s'inscrire dans l'intérêt général.
L'une des priorités que traduit le projet de budget pour 2015 de ce ministère est donc celle du soutien de l'investissement des collectivités locales si important pour les économies ultramarines. L'effort collectif de diminution de la dépense publique a conduit à diminuer les crédits du fonds exceptionnel d'investissement à 40 millions d'euros par an pour 2015 et 2016. Mais ils seront portés de nouveau, en fin de période, à 50 millions d'euros. Surtout, les crédits de paiement continueront à progresser pendant toute la période triennale, permettant de maintenir et de pérenniser le programme de rattrapage des investissements structurants.
Cette priorité est également illustrée par le déploiement de crédits dédiés à la politique contractuelle. Ces crédits progressent de 6,5 % dès 2015 et de 11 % sur la période triennale. Avec 137 millions d'euros en 2015, la contribution de l'État aux contrats de projet État-région est en augmentation dans toutes les régions d'outre-mer, par rapport aux contrats de projets 2007-2013. En moyenne, la progression est de + 27 % à périmètre comparable. L'effort de l'État par habitant est près de trois fois plus important outre-mer que dans l'hexagone. Mayotte et la Guyane bénéficient d'un taux d'aide par habitant encore plus élevé. La progression des crédits en faveur de la politique contractuelle au sein de la mission outre-mer permettra aussi le renouvellement, à enveloppe constante, des contrats en Polynésie française en 2015, en Nouvelle-Calédonie en 2016 et à Wallis-et-Futuna en 2017, de même que la poursuite des contrats actuels dans les autres collectivités d'outre-mer.
Je me félicite de l'arbitrage qui a été rendu au plus haut niveau de l'État en ce qui concerne la baisse de la dotation globale de fonctionnement de quatre régions d'outre-mer. Sans contester l'idée d'une participation de tous aux efforts de maîtrise de nos dépenses publiques, je me réjouis d'avoir obtenu que la part d'effort de ces collectivités soit proportionnelle à la réalité des finances publiques outre-mer, en tenant compte des charges particulières des régions concernées.
Concernant les problématiques de sécurité, je tenais à mentionner ici que nos capacités opérationnelles ont été préservées pour assurer toutes les missions qui leur sont dédiées. Je citerai par exemple pour la Guyane, la lutte contre l'orpaillage avec la mission HARPIE mise en oeuvre depuis 2008 ou la lutte contre la pêche illégale dans nos zones économiques exclusives. À l'horizon 2016, plusieurs bâtiments de la Marine Nationale seront remplacés par trois bâtiments multi-missions pour maintenir notre opérabilité sur les océans. En ce qui concerne les moyens humains déployés dans les outre-mer, les effectifs de la police et de la gendarmerie n'ont pas baissé. Au contraire, 29 gendarmes supplémentaires y ont été affectés en 2014. Ainsi, sur l'ensemble des territoires ultra-marins, nous enregistrons une baisse des atteintes aux biens de 1,5 % et une baisse des cambriolages dans tous les territoires avec un recul de 1,2 %. La création des quatre zones de sécurité prioritaires - Fort-de-France, Pointe-Pitre, Cayenne et Kourou - a contribué également à ces bons résultats.
Enfin, je voudrais vous donner mon sentiment sur les problématiques institutionnelles et statutaires outre-mer. La Nouvelle-Calédonie est actuellement dans la phase de sortie de l'Accord de Nouméa, qui prévoit cinq types de transferts qui se veulent progressifs et, une fois effectués, irréversibles. Compte-tenu des enjeux que représente l'effectivité des transferts de compétences, des attentes exprimées localement et de l'échéance relative à l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, le Premier ministre a décidé, en accord avec les parties prenantes de l'Accord de Nouméa, la création d'une « commission interministérielle de suivi des transferts de compétences ».
Je voudrais enfin saluer l'intérêt de sénateurs de métropole pour les outre-mer, dans le sillage de votre ancien collègue Christian Cointat.