Intervention de René Vestri

Réunion du 26 novembre 2010 à 14h45
Loi de finances pour 2011 — Compte spécial : avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres

Photo de René VestriRené Vestri :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les questions environnementales touchent chaque citoyen dans son quotidien et son avenir.

Le Président de la République, dès son élection, a fait de la lutte contre le réchauffement climatique l’une de ses priorités, car notre pays a le devoir de participer au défi mondial de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

D’après un récent sondage, 74 % des Français jugent que l’augmentation des températures observée depuis un siècle est due, essentiellement, aux effets de l’activité humaine.

Il y a donc urgence à mettre en œuvre tous les moyens pour lutter contre le changement climatique, comme il y a urgence à lutter contre la dégradation de la biodiversité.

Aujourd’hui, c’est dans un contexte de rigueur budgétaire que nous sommes appelés à examiner les crédits consacrés à la mission « Écologie, développement et aménagement durables » et à ses quelque onze programmes.

Je constate que le budget de la mission pour 2011 se stabilise après deux années de dotations exceptionnelles, notamment au titre du plan de relance, qui a donné une formidable accélération à notre politique en matière de développement durable, avec un investissement de l’État et des entreprises publiques de 5 milliards d’euros en deux ans. Je note que, malgré la « non-reconduction » de ce plan en 2011, les crédits seront stables, à hauteur de 9, 5 milliards d'euros en 2012 et de 9, 48 milliards d'euros en 2013.

Le projet de loi de finances pour 2011 prévoit de porter les crédits du programme Prévention des risques à 373, 6 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 303, 6 millions d’euros en crédits de paiement, avec une forte augmentation – de plus de 8 % – pour les autorisations d’engagement, afin de répondre à trois priorités : la réalisation des plans de prévention des risques technologiques, la mise en œuvre du plan Digues et l’application des mesures du Grenelle de l’environnement.

Je félicite l’ADEME, qui amplifie son action de soutien au projet de chaleur renouvelable ainsi que son action en faveur de la dépollution des sites industriels et du traitement des déchets, en portant la programmation sur les actions du Grenelle à 500 millions d’euros par an, contre 320 millions d'euros il y a deux ans.

En revanche, je m’interroge sur la capacité de l’État et des collectivités locales à mettre en œuvre les projets de trame verte et bleue, pour cause de financement du programme. Nous devons donner les moyens nécessaires aux différents acteurs impliqués dans cette mission, car, pour réussir cet engagement voulu par le Président de la République, il faut des investissements. Certes, la protection de l’environnement a un coût, mais notre devoir n’est-il pas de laisser un « héritage durable » aux générations futures ?

En cette année internationale de la biodiversité, je constate avec regret que les crédits consacrés à cette cause internationale n’ont pas évolué. Pourtant, la préservation de la biodiversité recèle bien plus d’enjeux qu’il n’y paraît, car la biodiversité joue un rôle crucial dans l’équilibre des écosystèmes ou leur dépendance aux ressources naturelles. Elle est également un enjeu pour les entreprises, qui sont encore très loin d’avoir intégré le sujet dans leur politique de développement durable.

D’ailleurs, la décision de déclarer 2010 « Année internationale de la biodiversité » témoigne de la prise de conscience à l’échelle mondiale des efforts déployés jusqu’ici pour enrayer le processus de perte de la biodiversité : diversité des gènes, des espèces et des écosystèmes.

Selon l’Union internationale pour la conservation de la nature, la biodiversité s’écroule 1 000 à 10 000 fois plus vite que son rythme naturel et une espèce de mammifère sur quatre est menacée d’extinction.

La disparition de la biodiversité serait une catastrophe planétaire, car celle-ci est essentielle à notre vie quotidienne, depuis la nourriture jusqu’aux vêtements que nous portons, en passant par les médicaments que nous utilisons.

À l’issue de la 10e conférence des parties à la convention-cadre des Nations unies sur la diversité biologique à Nagoya, le 29 octobre 2010, les 193 États membres ont conclu un accord sur les trois piliers de cette convention. Il définit vingt objectifs à l’horizon 2020 et arrête quelques mesures phares. Celles-ci concernent notamment : la préservation des espèces menacées d’extinction ; les subventions à la pêche et à l’agriculture qui devront être réduites progressivement et remplacées par des incitations positives en faveur de la conservation des écosystèmes ; la réduction de moitié des destructions d’habitats naturels, y compris les forêts ; la restauration de 15 % des habitats dégradés, étant entendu qu’au moins 17 % des zones terrestres et d’eaux intérieures et 10 % des zones marines et côtières devront être conservées au moyen de réseaux écologiques et d’aires protégées.

Certains objectifs de cet accord ne peuvent que satisfaire l’élu du littoral méditerranéen que je suis, fondateur, en 1989, de SOS Grand Bleu, association de protection des mammifères marins qui regroupe 150 associations européennes de protection de l’environnement et de la biodiversité, et acteur parmi d’autres du projet Pelagos, qui a abouti à un accord entre l’Italie, Monaco et la France pour la création d’un sanctuaire marin en Méditerranée.

Avec ses départements et collectivités d’outre-mer, la France présente une biodiversité exceptionnelle.

Je me permets de rappeler le rôle essentiel que jouent les océans, notamment en raison des ressources qu’ils recèlent, des activités économiques qui en dépendent ainsi que des enjeux scientifiques et technologiques majeurs qui y sont liés du fait de leur influence sur le climat. L’exploitation des richesses de la mer est essentielle pour l’homme. Mais cette exploitation doit désormais s’effectuer dans une perspective à long terme de gestion durable, perspective dans laquelle le maintien du bon état écologique des océans et des mers constitue une exigence incontournable.

À juste titre, lors de son récent discours de politique générale le Premier Ministre a déclaré : « Le développement durable constitue, lui aussi, un instrument de notre croissance. [...] L’écologie créative, et non punitive, est une source d’emplois. »

Évidemment, on continue à massacrer les baleines, ce que le défenseur des mammifères marins et de la faune marine en général que je suis ne peut que dénoncer.

Je ne saurais d’ailleurs conclure mon intervention sans évoquer le sort du thon rouge. J’ai déjà posé une question orale sur le rejet par les pays riverains de la Méditerranée, dont la France, de la proposition tendant à inscrire le thon rouge à l’annexe 1 de la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction. Sans vouloir polémiquer avec les thoniers, je pense que la disparition du thon rouge de Méditerranée aurait des conséquences dramatiques sur l’ensemble des écosystèmes. Or, seules l’autorisation d’une pêche industrielle réglementée et l’interdiction de pêcher dans les zones de frai pendant la période de reproduction pourraient sauver cette espèce menacée d’extinction.

Permettez-moi de conclure sur cette citation du chef amérindien Seattle : « Lorsque l’homme aura coupé le dernier arbre, pollué la dernière goutte d’eau, tué le dernier animal et pêché le dernier poisson, alors il se rendra compte que l’argent n’est pas comestible. » C’était en 1854.

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