Intervention de Éric Bocquet

Réunion du 19 novembre 2014 à 21h45
Prise en compte par le bonus-malus automobile des émissions de particules fines et d'oxydes d'azote — Suite de la discussion et rejet d'une proposition de loi

Photo de Éric BocquetÉric Bocquet :

Autant dire que la proposition de loi de nos collègues écologistes doit plutôt nous inciter à poser, pour le moins, la question de la qualité des alternatives modales à l’usage de la voiture pour les déplacements professionnels ou personnels des salariés. Nous devrions ainsi nous demander s’il ne conviendrait pas, plutôt que de majorer le prix du gazole – un prix qu’il nous faudra ensuite détaxer pour les taxis ou les entreprises de transport, sous la pression des « réalités économiques » –, de mettre en œuvre dès maintenant une politique un tant soit peu plus audacieuse en matière de transport collectif.

Augmenter le prix du gazole sans accroître, par exemple, les ressources du Syndicat des transports d’Île-de-France ou des autres autorités organisatrices d’un réseau de transport public de voyageurs, c’est prendre le risque de repousser plus encore la mise en œuvre des solutions réelles.

La protection de l’environnement, pour aujourd’hui et pour l’avenir, n’est pas affaire de « révolution fiscale », mais bel et bien de dépenses publiques, de choix d’aménagement du territoire, de respect du droit à la ville, de rejet des ségrégations urbaines et professionnelles qui sont au cœur des enjeux de déplacement.

On ne peut pas vouloir lutter contre le réchauffement climatique et le recours modal à l’automobile en continuant à favoriser, par une législation orientée au bénéfice des investisseurs et des seuls bailleurs, la spéculation immobilière et la montée constante des prix du logement dans ce que l’on appelle « les zones tendues ».

De la même manière, quand on repousse la réalisation du prolongement d’une ligne de métro, quand on s’interroge sur la faisabilité d’une liaison fluviale à grand gabarit, pourtant utile pour le transport de moult marchandises à faible valeur ajoutée, on rejette les possibilités de report modal, solution qui pourrait répondre en grande partie aux impératifs de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Changer les politiques publiques du transport peut se faire, mes chers collègues, sans recourir à la moindre augmentation de nos prélèvements obligatoires. Il convient simplement que nous ayons, en qualité de législateur, la volonté et la détermination nécessaires pour que l’argent public, dont nous décidons de l’utilisation - outre le fait que nous en contrôlons l’usage -, soit effectivement orienté vers la satisfaction des besoins de la collectivité.

Nous devons faire reculer l’usage de l’automobile et, dans cet ensemble, celui du diesel ? Fort bien ! Alors, mettons en œuvre dès maintenant avec audace, détermination et lucidité, les politiques publiques d’investissement nécessaires au report modal sur le rail, les voies d’eau et les transports publics !

Nationalisons les autoroutes, comme nous le proposions ici même en mai dernier, par exemple pour financer l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF ! Et, s’il faut permettre le recyclage professionnel des « travailleurs du diesel », comme le suggérait Aline Archimbaud, ne tardons pas à solliciter leurs employeurs respectifs pour mettre en place un vaste plan national assorti d’objectifs précis, de formation et de qualification !

Pour synthétiser notre position, je dirai que nous sommes fondamentalement défavorables à l’article 1er de cette proposition de loi, mais tout à fait favorables à ses articles 2 et 3.

Je conclurai mon propos en saluant la pertinence de ce débat suscité par nos collègues écologistes.

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