Monsieur le ministre, les questions économiques sont au cœur des préoccupations des territoires.
C’est la raison pour laquelle les élus locaux ont créé et développé des outils territoriaux capables d’organiser les stratégies de l’emploi en lien avec le développement économique. C’est ainsi que fut créée en 1991 la Maison de l’emploi et de la formation du Cotentin, qui affirmait notre volonté de disposer d’un outil permettant de penser et d’animer un projet de territoire sur un bassin de vie cohérent, complémentaire avec l’ensemble des autres outils présents localement.
La réussite de ces expérimentations locales diverses a conduit l’État à mesurer le rôle important joué par ces outils territoriaux et à reconnaître que les notions économiques et d’emplois devaient s’adapter aux spécificités liées aux territoires au travers de la création, en 2005, du label « Maisons de l’emploi ».
Pour mémoire, l’année de la labellisation des maisons de l’emploi, l’État avait dédié 100 millions d’euros à leur fonctionnement. Dans ce projet de loi de finances, nous sommes à 26 millions d’euros de fonctionnement. Inutile de vous préciser que le nombre de structures labellisées « Maisons de l’emploi » ne cesse de diminuer et que de nombreuses autres sont déstabilisées et fragilisées par les changements ou avenants au cahier des charges.
Les maisons de l’emploi développent et animent des actions pouvant être très diversifiées, car il s’agit de l’outil le plus proche des territoires, et pouvant donc préparer ceux-ci aux défis économiques et à l’emploi de demain !
Je prendrai pour exemple la Maison de l’emploi et de la formation du Cotentin, que je connais bien. Le travail qu’elle réalise sur le volet ressources humaines du grand chantier de l’EPR – European Pressurised Reactor – de Flamanville représente 541 000 heures de formation pour 776 demandeurs d’emploi et 681 embauches après cette formation entre 2008 et 2013. Mais c’est aussi la préparation de la main-d’œuvre locale à répondre aux besoins prochainement liés aux énergies marines renouvelables, ou encore les dispositifs d’insertion professionnelle et les 208 000 heures de travail pour 393 personnes en insertion entre 2007 et 2013.
J’insiste sur le fait que si les missions citées en exemple devaient être mises en difficulté, aucun autre partenaire sur le territoire ne disposerait de l’ingénierie, des savoir-faire et de la légitimité pour les accomplir.
Vous me répondrez qu’il sera possible pour les maisons de l’emploi de disposer des crédits liés à la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences sur les territoires par d’autres biais. Mais, monsieur le ministre, comme l’a souligné Mme Patricia Bouillaguet dans le bilan partagé des maisons de l’emploi : « La qualité de leurs interventions suppose qu’elles puissent inscrire leurs actions dans la durée et dans un cadre stabilisé. »
Vous le savez, les projets pensés et animés de manière partenariale mettent du temps à se mettre en place. Casser ces constructions, ces logiques ou freiner leur dynamique parce que le cadre n’est ni stable ni pérenne serait un signal négatif envoyé aux milieux économiques, aux personnes en insertion et aux territoires.
Suite à la diminution de plus de 50 % du budget alloué aux maisons de l’emploi en dix ans à peine, les collectivités territoriales ont pris une part du financement très conséquente à leur charge. En 2013, 124 maisons de l’emploi ont répondu à une consolidation nationale demandée par leur réseau : 46 % du budget total de l’opération a été apporté par l’État, 7, 5 % par le Fonds social européen, 13, 1 % par du financement privé ou autre et 36, 7 % par les collectivités territoriales. Vu le contexte budgétaire compliqué et restreint pour les collectivités locales, reconnaissez, monsieur le ministre, qu’il ne serait pas sérieux d’imaginer qu’elles consentent un tel investissement si de très bons résultats n’étaient pas au rendez-vous.
Ces maisons de l’emploi et de la formation – j’insiste sur l’aspect formation – sont tout à fait nécessaires à la reconversion des bassins d’emploi. C’est la raison pour laquelle je vous demande de maintenir les crédits à hauteur de 36 millions d’euros en transférant ces 10 millions d’euros d’un poste budgétaire à l’autre.