Madame le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je présenterai quelques observations tirées de l’avis budgétaire adopté par la commission des lois, qui traite des aspects financiers, mais s’intéresse aussi à certains aspects des politiques menées. J’insisterai sur la stabilisation des crédits consacrés à la lutte contre l’immigration irrégulière, avant de mettre ce budget dans la perspective d’une réforme de la politique d’accueil et d’intégration.
Les crédits dont l’examen pour avis m’a été confié, c’est-à-dire ceux qui ne se rapportent pas à l’action n° 2, Garantie de l’exercice du droit d’asile, du programme 303, « Immigration et asile », dont l’analyse a été confiée par notre commission à Mme Esther Benbassa, se montent à 146, 2 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 156, 4 millions d’euros en crédits de paiement ; ces montants font apparaître respectivement une diminution de 2, 7 millions et de 3, 9 millions d’euros par rapport aux crédits ouverts pour l’année en cours.
Les principes qui ont guidé l’élaboration du budget de cette mission pour 2015 s’inspirent de ceux suivis l’année dernière : la légère augmentation des crédits affectés à l’asile est compensée par une diminution des crédits consacrés à l’immigration, notamment de ceux alloués au programme 104, « Intégration et accès à la nationalité française », qui concerne en particulier les étrangers primo-arrivants.
Il faut reconnaître que le programme 303, « Immigration et asile », quant à lui, bénéficie d’une stabilisation de ses crédits. Il comprend notamment l’action n° 3, Lutte contre l’immigration irrégulière, une action extrêmement importante à laquelle sont alloués 63, 6 millions d’euros en autorisations d’engagement et 73, 8 millions d’euros en crédits de paiement.
La commission des lois estime qu’il convient de poursuivre la rationalisation de la gestion des centres de rétention administrative. Les travaux du centre de Mayotte avancent, mais ceux du centre de Coquelles ont pris un peu de retard. Nous attendons les résultats des enquêtes menées par les différents services pour déterminer précisément les actions à mener.
Je tiens à attirer votre attention sur un phénomène qui n’est pas strictement d’ordre financier, mais qui devrait avoir des conséquences budgétaires : nos centres de rétention administrative sont peu occupés – le taux d’occupation n’a atteint que 48 % en 2013 –, ce qui rend une réorganisation absolument nécessaire.
J’ajoute que les salles d’audience délocalisées créées à proximité de ces centres sont peu utilisées, au point que trois seulement fonctionnent vraiment. Il est possible que des économies puissent être réalisées de ce côté-là. En tout cas, je constate que le projet de loi de finances ne prévoit la création d’aucune salle supplémentaire.
J’en viens à ma seconde série d’observations, destinées à montrer que ce budget est en attente de la réforme à venir des politiques d’immigration et d’accueil.
La commission des lois a constaté que la structure de l’immigration légale ne faisait apparaître aucun changement majeur. Mon rapport comporte des données chiffrées relatives aux vingt principaux pays d’origine, dont proviennent 151 711 personnes sur un total de 213 253. En tête des pays d’origine, on trouve toujours les pays du Maghreb et la Chine. On constate seulement quelques changements mineurs en ce qui concerne l’immigration économique, sans incidence sur les structures fondamentales.
En revanche, des évolutions se sont produites pour ce qui est de l’obtention des titres de séjour. À cet égard, nous attendons beaucoup de la future carte pluriannuelle de séjour, dont les étrangers ne pourront bénéficier que s’ils respectent le contrat d’accueil et d’intégration, le CAI ; nous en parlerons lors de la discussion du projet de loi relatif au droit des étrangers en France. Si le CAI est satisfaisant dans son principe, il l’est moins dans ses modalités : il fait l’objet de nombreuses critiques, qui visent en particulier le niveau de langue exigé, mais aussi la formation civique.
Ce contrat doit d’autant plus être réformé que le dispositif actuel est un peu coûteux, puisque les diverses formations dispensées au titre de l’intégration ont représenté en 2013 une dépense de près de 50 millions d’euros.
Enfin, comme M. Karoutchi l’a signalé au nom de la commission des finances, une interrogation entoure le financement de l’OFII, dont le budget ne tient pas compte des missions nouvelles qui lui sont confiées, en particulier dans le domaine de l’asile. Le montant total des ressources de l’OFII s’est élevé à 172, 7 millions d’euros en 2013, contre 178, 7 millions d’euros en 2012.
La commission des lois partage les inquiétudes que M. le rapporteur spécial de la commission des finances vient d’exprimer à l’égard de cet organisme, qui joue un rôle important pour assurer la qualité de l’accueil des migrants et de l’appréciation de ceux qui viennent sur notre territoire. Nous craignons que les crédits qui lui sont alloués ne soient pas à la mesure de ses missions.
Telles sont, mes chers collègues, les observations que je souhaitais porter à votre connaissance dans le temps qui m’était imparti.