Intervention de Esther Benbassa

Réunion du 28 novembre 2014 à 15h00
Loi de finances pour 2015 — Immigration asile et intégration

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n’interviens plus ici en tant que rapporteur pour avis de la commission des lois, mais en tant que membre du groupe écologiste, sur l’ensemble de la mission « Immigration, asile et intégration ». Je me concentrerai plus particulièrement sur le volet asile.

En vue de l’élaboration de mon avis, j’ai organisé de nombreuses auditions, qui ont mis en évidence certaines problématiques que je me suis engagée à relayer devant vous.

Dans le cadre de la réforme de l’asile, l’OFII, qui contribue à la politique d’accueil des demandeurs d’asile, voit sa charge de travail s’accroître considérablement alors même que le projet de loi de finances ne prévoit pas d’augmentation de ses moyens. Si l’OFII est en charge de la coordination du réseau des plateformes d’accueil des demandeurs d’asile, ou PADA, il n’en assure pour l’heure qu’assez rarement la gestion directe, s’appuyant de manière très importante sur le secteur associatif.

Cependant, dans la perspective de la mise en place d’un « guichet unique », il est prévu que l’OFII internalise nombre des prestations aujourd’hui dispensées par les associations. Serait-il en mesure d’assumer ces nouvelles missions avec ce budget ?

Les PADA ont été progressivement mises en place par le milieu associatif à compter de l’année 2000, à la demande des pouvoirs publics, afin de pallier les limites du dispositif national d’accueil, ou DNA, et de tenter de réduire les délais d’attente pour entrer en centre d’accueil pour demandeurs d’asile. Ces structures jouent un rôle central dans le premier accueil des demandeurs d’asile en assurant leur domiciliation et en les accompagnant dans leurs démarches administratives et sociales. Certaines plateformes assurent également l’orientation vers une solution d’hébergement d’urgence. En outre, elles accompagnent les demandeurs d’asile tout au long de l’instruction de leur dossier par l’OFPRA, puis, le cas échéant, par la CNDA.

Assurant une mission de service public, les PADA associatives sont financées par des subventions, provenant majoritairement de l’OFII – les collectivités territoriales couvrent le reste –, et des financements européens.

Dans le cadre de la réforme de l’asile, le Gouvernement prévoit la création d’un « guichet unique » d’enregistrement de la demande et d’entrée dans le dispositif d’accueil. Il existe donc des incertitudes sur l’avenir des PADA et de leur financement.

Si tous les acteurs reconnaissent que le statu quo n’est pas souhaitable, et si nombre d’entre eux estiment que l’État doit retrouver son rôle dans le premier accueil des demandeurs d’asile, beaucoup expriment des doutes quant à la capacité de l’OFII à reprendre l’intégralité des missions aujourd’hui assurées par les PADA associatives, en particulier l’accompagnement social, et notamment celui des familles.

Si nous sommes conscients des efforts qui sont mis en place pour améliorer la qualité de l’accueil des demandeurs d’asile en France, sachez que nous attendons beaucoup du projet de loi relatif à la réforme de l’asile, dont nous discuterons prochainement.

Plus généralement, les écologistes attendent un véritable changement de politique envers les migrants. Notre politique doit être fondée sur la liberté de circulation et d’installation, le respect de la dignité humaine et du droit des migrants. Il est temps d’admettre que, comme de nombreux travaux sérieux le montrent, l’immigration apporte à la France autant économiquement que démographiquement. La politique menée par certaines formations, qui consiste à faire des migrants des boucs émissaires, ne pourra que mener notre pays dans une impasse.

Quant à la politique d’asile, elle doit aussi être guidée par un certain pragmatisme. L’état du monde est tel que des millions de gens fuient leur pays, parfois prêts à risquer leur vie pour avoir un avenir. N’en déplaise à certains, la France, ex-terre d’asile pour des milliers de personnes, qui ont ensuite servi le pays avec abnégation et ont contribué à son rayonnement, se doit de continuer dans cette voie. Monsieur le ministre, nous pouvons faire beaucoup plus et surtout beaucoup mieux !

Cela étant dit, le budget nous semble relativement cohérent avec les objectifs fixés par le projet de réforme de l’asile et nous sommes prêts à lui apporter notre soutien. Toutefois, vous comprendrez, monsieur le ministre, que le groupe écologiste fasse dépendre son vote du sort qui sera réservé aux amendements déposés sur cette mission.

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