Intervention de Jean-Baptiste Lemoyne

Réunion du 1er décembre 2014 à 22h00
Loi de finances pour 2015 — Anciens combattants mémoires et liens avec la nation

Photo de Jean-Baptiste LemoyneJean-Baptiste Lemoyne :

La commission a salué le succès des commémorations de 2014, qui ont vu les Français se réapproprier la Grande Guerre à l’occasion du centenaire de son déclenchement, et des débarquements, dont c’était le soixante-dixième anniversaire. Nous avons tous en tête les cérémonies réussies d’Ouistreham et de Notre-Dame-de-Lorette, tout comme ce 14 juillet aux quatre-vingts nations représentées. N’oublions pas non plus d’autres tragiques événements des années en « 4 », comme les soixante ans de la chute de Diên Biên Phu, qui a aussi fait l’objet d’une semaine de commémoration.

Loin de toute confusion mémorielle, les nombreux événements organisés au niveau local ou national ont permis de mettre en perspective les bouleversements engendrés par ces conflits. La Mission du centenaire 14-18, avec des moyens réduits et en faisant également appel au mécénat, a pleinement rempli son rôle pour le début de ce cycle. Nous espérons qu’elle sera prolongée et dotée d’un financement suffisant l’an prochain.

Nous sommes heureux que ce projet de loi de finances consacre définitivement l’égalité des droits entre toutes les générations du feu. La commission a été très satisfaite de constater qu’une partie des dispositions de la proposition de loi Cléach, que le Sénat avait malheureusement rejetée l’an dernier, se trouve reprise afin d’accorder la carte du combattant aux soldats ayant servi quatre mois en opérations extérieures, en OPEX. Jusqu’à présent, les critères retenus n’étaient pas adaptés à la réalité de leurs engagements et des dangers rencontrés en opération.

Cette disposition vient confirmer sans ambigüité l’égalité de toutes les générations du feu devant le droit à réparation. Il n’est que de saluer la mémoire de l’adjudant Bajja, mort ce week-end dans le cadre de l’opération Barkhane, pour mesurer que ces missions et leurs préparations comportent des risques qui légitiment cette mesure.

S’agissant des mesures de reconnaissance, réparation et d’aide aux anciens combattants, il semble indispensable d’engager la sécurisation, sous une forme nouvelle, de certains mécanismes d’aide sociale de l’ONAC, l’Office national des anciens combattants. Il en va ainsi de l’ADCS, l’allocation différentielle aux conjoints survivants, qui fait l’objet d’une mesure nouvelle dans ce projet de loi de finances, mais dont les anciens combattants les plus démunis sont exclus et qui mérite d’être assise sur une base juridique plus solide.

Enfin, la commission a jugé que le traitement réservé aux harkis jusqu’à nos jours n’a pas toujours été à la hauteur de notre République. L’article 49 du projet de loi, qui revalorise leur allocation de reconnaissance de 14 euros par mois, a été jugé par les intéressés que j’ai pu rencontrer comme une « mesurette ». Leur principal souhait est que la France reconnaisse enfin l’abandon qu’ils ont subi et sa responsabilité dans les massacres qui ont suivi, comme d'ailleurs s’y était engagé le Président de la République en 2012. De ce point de vue, j’ai senti leur déception après les discours du Premier ministre du 25 septembre dernier. L’attente est forte.

Permettez-moi d’évoquer la JDC : cette journée défense citoyenneté est le rendez-vous incontournable, chaque année, pour 760 000 jeunes Français qui y sont sensibilisés à l’esprit de défense. Le Président de la République a évoqué dernièrement sa transformation en un service civique universel dont les contours restent assez flous.

Pour ma part, je considère que la suppression de la conscription a suscité un certain délitement de la cohésion sociale. À mon avis, nous pourrions utilement nous inspirer de certaines préparations militaires pour recréer un temps obligatoire qui soit à la fois un nouveau creuset républicain et un temps de formation. Ce dernier serait loin d’être inutile, que ce soit en termes de maîtrise de certains apprentissages fondamentaux, de physique, voire de mental, comme disent les sportifs de haut niveau.

Sur ma proposition, la commission a adopté trois amendements dont les dispositions, je l’espère, recueilleront une large majorité.

Le premier vise à revaloriser de deux points la retraite du combattant, pour la faire passer de 670 euros à 698 euros par an. Celle-ci est restée figée depuis 2012 ; le coût de la vie, lui, continue à évoluer. Ce petit coup de pouce est donc attendu.

De même, la situation des conjoints survivants des grands invalides n’est pas acceptable. Si une prise de conscience a bien eu lieu ces dernières années, les mesures prises demeurent insuffisantes. Le plafonnement de la pension de réversion à laquelle elles peuvent prétendre les plonge dans la précarité. Il est temps d’agir – nous y reviendrons lors de l’examen de ce second amendement.

Enfin, un troisième amendement vise à corriger une incohérence juridique.

Il pourrait être reproché à mes deux premiers amendements d’être financés au détriment de la JDC. Or il n’en est rien. C’est simplement pour me conformer aux contraintes de la LOLF, dont vous savez qu’elle impose ces transferts de crédits. Je sais que le Gouvernement dispose dans l’exécution de son budget des moyens de redéployer des crédits entre les actions, les programmes et les missions. Ces mesures ne constituent donc pas un effort insurmontable et représenteraient pour le monde combattant un signal fort de reconnaissance.

Monsieur le secrétaire d’État, c’est là l’occasion de marquer le budget de votre empreinte. Nous vous attendons à l’écoute sur ces amendements.

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