Intervention de Alexandre Grillat

Commission des affaires économiques — Réunion du 9 décembre 2014 : 1ère réunion
Transition énergétique pour la croissance verte — Audition de M. Alexandre Grillat secrétaire national au secteur « développement durable logement rse et énergie » de la confédération française de l'encadrement - confédération générale des cadres cfe-cgc

Alexandre Grillat :

Soit, cependant, je veux vous en dire un mot car ce secteur, le plus grand consommateur d'énergie et émetteur de gaz à effet de serre, est fondamental pour une transition énergétique responsable, pragmatique et rationnelle. La sobriété et la décarbonation de notre consommation passent par le développement de véhicules propres, qu'ils soient électriques ou au biogaz, pour les particuliers comme pour les transports collectifs et le transport routier ; et par l'articulation des politiques de mobilité, d'habitat, d'aménagement et d'urbanisme au niveau des territoires.

La stratégie bas carbone doit également s'appliquer à nos modes de production. Pour une transition énergétique systémique, il aurait fallu engager une réflexion sur les usages du pétrole et nos modes d'approvisionnement, une dimension qui est totalement absente de ce texte. Plus polémique, le plafonnement de la part du nucléaire et la mise en concurrence des concessions hydrauliques regroupées au niveau des vallées paraissent incohérents avec l'objectif d'une production peu ou pas carbonée. Prenons exemple sur la Suède qui a mis l'accent sur les énergies renouvelables (EnR) thermiques - les chaufferies biomasse et les réseaux de chaleur - plutôt que sur les EnR électriques. Un bon deal, à la fois pour les salariés et pour une transition énergétique responsable, a été trouvé à l'Assemblée nationale s'agissant des concessions hydrauliques : investissement contre prolongation de la concession.

On a reproché à ce projet de loi d'être électrocentré. Le développement des énergies renouvelables électriques se fera à deux conditions. D'abord, contrebalancer le coût pour la collectivité par la perspective de constituer des filières industrielles, a minima européennes, créant des emplois durables, qualifiants et valorisables dans la compétition internationale. La France peut miser sur l'éolien offshore et les hydroliennes, alors qu'elle a pris beaucoup de retard sur l'éolien et le solaire. Ensuite, le coût de la transition énergétique doit être financièrement soutenable pour la collectivité car, in fine, ce sont les consommateurs et les contribuables qui en supporteront le prix. La soutenabilité n'est pas garantie en l'état actuel du texte, en raison d'un pilotage insuffisant du développement des énergies renouvelables et de l'évolution de la CSPE. À propos de la CSPE, et après les longs débats à l'Assemblée nationale, la CFE-CGC pense qu'il faut limiter son évolution à un niveau raisonnable à cause de sa place croissante dans la facture d'électricité, qui augmente à vive allure.

Je poursuis sur la structure des tarifs, un aspect de la loi qui pose particulièrement question. Il faut indéniablement une vérité économique dans le signal prix. Marcel Boiteux, le président d'honneur d'EDF, aime à dire : « les horloges sont faites pour donner l'heure, le prix pour donner le coût ». Les Français doivent pouvoir effectuer leur choix en connaissance de cause - les particuliers, mais aussi les investisseurs, dont les décisions déterminent la qualité du service public et les emplois chez les prestataires et fournisseurs de matériels. Vous le savez tous ici, la dynamique d'EDF et de GDF, avec leurs sous-traitants, irrigue nos territoires. Quels que soient les choix effectués, l'entretien du parc nucléaire ou l'augmentation de la part des EnR, les investissements s'évaluent à des dizaines de milliards d'euros. Il faut de bons signaux économiques, afin que les opérateurs économiques soient en mesure de prendre des décisions rationnelles. Inclure une composante de prix du marché dans la structure tarifaire constitue une entorse au principe de la couverture des coûts. J'ajoute que le marché électrique est aujourd'hui complètement déstructuré à cause de la distorsion au profit des EnR subventionnées. Ce qui, en outre, fragilise la rentabilité de certains actifs de plus en plus déclassés, alors que les sites correspondants peuvent être appelés à la pointe. En revanche, l'introduction de la régulation normative concernant l'utilisation des réseaux et la sécurité des investissements va clairement dans le bon sens.

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