Je confirme l'importance considérable du marché de la rénovation. Il y a un besoin de construction, un besoin de rénovation. C'est pour cela que, malgré les difficultés qu'il traverse, le secteur de la construction garde malgré tout un certain optimisme. Il est vrai que, jusqu'à présent, ce marché, dont on prédit l'essor depuis des années, n'a pas encore décollé.
L'éco-conditionnalité des outils de financement constitue une réponse à la question de la formation. Le label RGE (Reconnu Garant de l'Environnement) des entreprises du secteur, qui conditionne l'accès aux dispositifs de financement public, rassure les consommateurs et incite les professionnels à acquérir les compétences nécessaires. Les chiffres montrent que cette éco-conditionnalité fonctionne et qu'il y a une vraie prise de conscience des professionnels du secteur qu'ils doivent se former. Avant l'été, on dénombrait deux cents entreprises qualifiées RGE par mois. Depuis la rentrée, ce nombre est passé à deux mille. À la fin de l'année, vingt-cinq mille entreprises auront obtenu la qualification. Pour être en mesure de répondre aux besoins du marché, nous pensons qu'il faudrait atteindre un total de trente à trente-deux mille entreprises. On s'en rapproche !
Concernant l'innovation, notamment des matériaux, je souligne qu'il n'y a pas d'innovation révolutionnaire impliquant l'émergence de nouveaux métiers, mais plutôt une adaptation des métiers existants. La révolution qui attend les professionnels du bâtiment, c'est d'apprendre à travailler ensemble, parce que la mise en oeuvre des techniques et des matériaux de la transition énergétique suppose une coordination plus poussée des interventions de chaque corps de métiers -sans quoi la performance énergétique n'est pas au rendez-vous. Les industriels nous aident d'ailleurs beaucoup à nous former, car ils sont conscients que leurs matériaux n'ont d'intérêt que s'ils sont bien posés.
Sur la question du détachement des travailleurs, il est vrai qu'elle nous préoccupe. Mais nous ne combattons pas le détachement des travailleurs européens lui-même, nous combattons la fraude au détachement : fraude sur le nombre d'heures effectuées pour un salaire fixe, sur les tarifs horaires, etc. Des mesures ont déjà été prises. La décision européenne de faire évoluer la directive sur le détachement des travailleurs va dans le bon sens ; la loi Savary visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale, qui permet la responsabilisation des maîtres d'ouvrage, également. Pour avoir un dispositif complet, il manque cependant encore deux choses. La première devrait être apportée par la loi Macron, grâce à la carte d'identification professionnelle pour les salariés du secteur, résidents ou non. C'est indispensable pour pouvoir réaliser des contrôles simplement et efficacement. Il est aujourd'hui très difficile de savoir qui fait quoi sur un chantier. Avec la carte, demain, nous pourrons le savoir. La seconde chose est la mobilisation des moyens de contrôle de l'État. L'inspection du travail n'est pas en capacité de les conduire. Il faudrait pouvoir réaliser des contrôles à toute heure, même le week-end. Associer les services des douanes permettrait d'aller beaucoup plus loin dans les contrôles, notamment en permettant de contrôler les matériels en même temps que les personnes. Je regrette que M. Michel Sapin ne se montre pas davantage réceptif à cette demande. Si l'on se demande comment utiliser les cent cinquante douaniers qui étaient prévus pour faire fonctionner le dispositif Ecomouv, nous aurions quelques idées... L'idée n'est pas de faire la chasse aux travailleurs détachés, mais d'enrayer la fraude au détachement. Il y a une hypocrisie des entreprises, des maîtres d'ouvrage, des architectes, des clients... Il faut y mettre un terme en faisant respecter les règles.
Concernant la formation des professionnels du secteur je ferai quelques remarques. Il est vrai qu'il y a trop de labels en matière de qualité et de performance des constructions, avec des exigences en matière de qualification qui ne sont pas harmonisées. On s'y perd. Les professionnels du secteur sont en partie responsables de cette situation, il est vrai. Pour ce qui est du rôle de l'éducation nationale dans le processus de formation, il n'est pas encore optimal, mais je tiens à dire que l'image des métiers du bâtiment s'améliore et que la difficulté principale aujourd'hui n'est pas d'orienter en nombre suffisant les jeunes vers ces filières de formation : elle est de trouver des entreprises et des artisans pour les accueillir en formation. Le nombre d'apprentis dans les CFA est en recul de 25 % !
La séance est levée à 17h30.