Intervention de Mathieu Darnaud

Réunion du 15 décembre 2014 à 10h00
Amélioration du régime de la commune nouvelle — Suite de la discussion en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Mathieu DarnaudMathieu Darnaud :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, si un maire a pour mission de dessiner un avenir pour sa commune, le Sénat, lui, a vocation à veiller à celui de toutes les communes de France. La proposition de loi relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes tombe donc à point nommé pour redonner des perspectives et peut-être même un nouveau souffle à l’institution communale.

Je ne m’étendrai pas sur le détail des dispositions de ce texte brillamment développées par les orateurs qui m’ont précédé, en particulier par M. le rapporteur.

À l’heure où, au prétexte d’éclaircir le jardin à la française qu’est devenue notre organisation territoriale, on invente de nouvelles géométries complexes, cette proposition de loi présente le grand intérêt de redonner de sa légitimité à la cellule de base de notre organisation territoriale : la commune.

Car on peut le déplorer ou s’en réjouir, mais c’est un fait : l’attachement de nos concitoyens pour l’institution communale ne s’est jamais démenti. Le plus souvent, ils la perçoivent moins comme une entité administrative que comme une communauté humaine, dans l’histoire de laquelle ils inscrivent leur propre existence. Ils y cultivent fréquemment l’attachement à leurs racines et entretiennent des liens sociaux favorisés par la présence d’élus de proximité.

Un Français en déplacement à qui l’on demande d’où il vient ne répondra jamais qu’il a sa maison dans la communauté de communes de Rhône-Crussol ou de l’Ouest Rhodanien ; il dira, madame la ministre, qu’il est originaire de Loudéac, ou monsieur le rapporteur, de Thizy-les-Bourgs, ou encore de La Mure, de Guilherand-Granges, voire de Paris.

Mais il est vrai que cet attachement de nos compatriotes à leurs villes et à leurs villages ne doit pas nous distraire des réalités. Chacun, dans cette enceinte, a pu mesurer que, en dessous d’un niveau critique, la mutualisation des moyens est nécessaire pour continuer à rendre à la population les services qu’elle est en droit d’attendre. C’est tout l’intérêt de la chance historique que représente cette proposition de loi, qui offre aux communes des conditions financières inespérées en ces temps de restrictions budgétaires, pour, comme l’a expliqué M. le rapporteur, réorganiser leur bloc communal.

Utilisant le dispositif de la loi Marcellin, une vingtaine de communes de l’Ardèche ont déjà fait ce choix précurseur de la fusion depuis 1971, parmi lesquelles Saint-Alban-Auriolles, Berrias-et-Casteljau, ou encore Saint-Pierre-Saint-Jean. Autant de noms composés qui témoignent d’une volonté de voir perdurer l’identité des communes fusionnées. Sur ce point aussi, je soulignerai la grande sagesse du présent texte qui, me semble-t-il, est parvenu à trouver le juste équilibre entre l’efficacité de la commune nouvelle aux prérogatives affirmées et les communes déléguées, garantes de la proximité et, disons-le, gardiennes de la mémoire.

Voilà pourquoi miser sur l’intelligence et la bonne volonté des maires et de leur conseil municipal me semble être la meilleure voie.

Il n’y a rien de plus estimable que d’aider des communautés humaines à faire le choix de se fédérer pour bâtir quelque chose qui les dépasse sans les dissoudre. Cette approche est diamétralement opposée de celle du projet de loi NOTRe, dont nous commencerons l’examen dans cet hémicycle dès demain, visant, parfois par la contrainte, à fabriquer des intercommunalités de 20 000 habitants qui enjambent les réalités humaines, géographiques et démographiques.

Tous les partenaires en jeu gagneraient à travailler en suivant ces principes : inciter plutôt que contraindre ; encourager les évolutions plutôt que dicter un modèle éloigné des réalités.

Depuis 2003, l’article 72 de la Constitution dispose que les collectivités s’administrent librement. Allons au bout de cette logique et offrons-leur de s’associer entre elles librement.

Je le disais voilà un instant, nous aurons très prochainement l’occasion de débattre et de faire état de désaccords – peut-être d’ailleurs moins entre nous qu’avec l’Assemblée nationale. Savourons donc aujourd’hui la satisfaction de voter ensemble le présent texte, qui est le fruit d’un consensus nourri par l’expérience et les réalités locales.

Je veux à mon tour rendre hommage à Jacques Pélissard, qui, avant de quitter l’AMF, a non seulement su transmettre le flambeau en des mains hautement qualifiées, mais a également été à l’initiative de ce texte intelligent, pragmatique et qui réunit l’ensemble des élus de bonne volonté.

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