Intervention de André Reichardt

Réunion du 15 décembre 2014 à 14h30
Délimitation des régions et élections régionales et départementales — Adoption d'un projet de loi en nouvelle lecture dans le texte de la commission modifié

Photo de André ReichardtAndré Reichardt :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’un de nos plus illustres prédécesseurs en ces lieux, l’immense Victor Hugo, disait de l’Alsace qu’elle était une terre bien particulière. Pas à cause de son identité et de son caractère, non ! Mais à cause de son destin. À cause de l’histoire qui l’a placée à cet endroit précis où deux mondes se rencontrent et s’achoppent : le monde latin et le monde germanique.

L’Alsace est une terre de France. C’est la République sur le Rhin. C’est aussi, pour le pays tout entier, la promesse de l’Europe comme destin.

Aussi, ceux qui veulent aujourd'hui rayer notre région de la carte administrative, disent-ils, des régions françaises ne portent-ils pas simplement atteinte à l’Alsace, à son identité, à sa langue, à sa culture. C’est à la France qu’ils attentent, ni plus ni moins, à sa diversité, à son histoire, à son destin. Oui, monsieur le secrétaire d'État, c’est la France – la France et rien d’autre ! – qu’ils sont en train de défaire.

Qu’est-ce que la France ? C’est au fond la seule question qui vaille et la seule question que nous devons nous poser au moment où le Gouvernement entend réorganiser le pays.

La France, c’est, pour nous, un long et patient édifice. Ce sont des provinces qui se sont rencontrées, au fil de l’âge, et se sont unies par la conquête et les armes, les mariages et les charmes. Et, au final, ces provinces ont fini par apprendre à se connaître et s’apprécier. Pour tout dire, elles ont fini par s’aimer.

Et pourquoi l’Alsace s’est-elle sentie si bien dans le creuset français ? Simplement parce qu’elle était reconnue. Parce qu’on prenait ses spécificités non pas comme des traits d’exotisme, mais comme de vraies chances et de véritables potentialités d’ouverture continentale pour l’ensemble français.

L’Alsace, c’est la France sur le Rhin, la porte vers l’Allemagne et la Mitteleuropa.

Voilà pourquoi les gouvernements qui se sont succédé à la tête du pays depuis deux siècles n’ont jamais voulu dissoudre l’Alsace dans quoi que ce fût.

Avec votre réforme, monsieur le secrétaire d'État, vous êtes en train de rompre avec la diversité constitutive de notre pays. Et vous le faites pour d’obscures raisons. Un peu de technocratie par-ci, à n’en pas douter, beaucoup de chicaneries politiciennes par-là !

Vous nous expliquez que les régions françaises sont trop petites par rapport à leurs homologues européennes. Vous savez bien qu’elles sont juste dans la moyenne. Et si l’on s’en tient à leur seule superficie, elles comptent parmi les plus grandes d’Europe.

On est ici dans un certain déni de la réalité.

En fait, il n’existe aucun argument valable, aucune raison sensée, aucun mobile rationnel qui milite en faveur de la réforme territoriale aujourd’hui proposée. Tous les spécialistes – les géographes, les démographes, les aménageurs, mais également les économistes – nous disent, à l’instar de Jean Tirole, prix Nobel d’économie, que j’ai personnellement entendu, que cette réforme ne va pas dans le bon sens, qu’elle n’entraînera aucune économie, …

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