En toute franchise – et cela a déjà été dit –, on voit mal comment ce texte, tel qu’il est rédigé, pourrait avoir une quelconque portée pratique. Cette clause dérogatoire tient au contexte particulier des négociations, à une époque où Andorre figurait encore sur la liste des paradis fiscaux et où le gouvernement d’alors – je vous rappelle que c’était en 2011 et que le Premier ministre s’appelait François Fillon – affirmait sa volonté de combattre ces derniers, dans la continuité des travaux du G20. C’était en quelque sorte une clause de « dissuasion », que l’on prévoit précisément pour ne pas avoir à s’en servir – nous savons le faire excellemment en France pour d’autres grands sujets. C’est tout l’objet de la dissuasion.
Certes, l’idéal serait de négocier un avenant à cette convention, mais vous n’ignorez pas que les choses ne se passent pas ainsi. Une convention fiscale prend des années à négocier, et l’on ne doit y toucher que d’une main tremblante, comme certains l’ont dit avant moi de manière bien solennelle. Rouvrir les négociations prendrait sans doute de longs mois, si ce n’est des années, et conduirait inévitablement à rediscuter de chacun des vingt-neuf articles, ou presque, de la convention. En attendant, les ressortissants des deux pays risqueraient de se retrouver doublement imposés. La crédibilité de la France dans les autres négociations en cours – avec le Luxembourg, la Belgique, la Colombie et d’autres pays – pourrait s’en trouver entamée. Cela serait cher payé pour une clause qui n’est pas applicable et ne pose pas forcément problème.
Que va-t-il se passer ? L’Assemblée nationale a adopté le projet de loi, et nous nous apprêtons sans doute à le rejeter. Une commission mixte paritaire se tiendra en janvier… et l’Assemblée nationale aura le dernier mot. Mais pour ce qui me concerne, je regrette que le Sénat n’ait pas cru possible d’aller jusqu’à une adoption qui serait une reconnaissance des efforts, des progrès et des encouragements dont a besoin la Principauté d’Andorre, à l’égard de laquelle nous avons une responsabilité historique, mais actuelle aussi. §