Intervention de Jean-Pierre Godefroy

Réunion du 18 juillet 2008 à 10h00
Démocratie sociale et temps de travail — Articles additionnels avant l'article 16

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

Il est évident, monsieur le ministre, que les syndicats continueront à dialoguer avec vous, car c’est la nature même du dialogue social ! Il s’agit plutôt de savoir s’ils viendront vous voir pour signer des accords avec la même confiance. L’affaire de la position commune est extrêmement grave, parce qu’elle a porté un coup sévère à la confiance dans la négociation et dans le contrat. Plus grave encore, votre décision a créé une incompréhension au sein du monde syndical et a conduit à des divisions qui risquent de laisser des traces très profondes. Il me semble que cela est tout à fait dommageable et que ce n’était pas la bonne façon d’agir.

Le dialogue social, et à plus forte raison au niveau de l’État, nécessite un minimum de respect des engagements pris. L’expérimentation prévue par l’article 17 n’était pas une mauvaise chose. Si vous saviez le nombre de fois où nous nous sommes entendus dire, par des membres de ce gouvernement ou du précédent, qu’il fallait expérimenter… Et là, tout à coup, on n’avait plus le temps !

Ensuite, le renversement de la hiérarchie des normes auquel vous avez procédé est une erreur ; nous nous en apercevrons très vite. C’est la seule protection pour les salariés, mais aussi et surtout pour les entreprises elles-mêmes, peut-être pas immédiatement, mais à long terme. Renverser cette hiérarchie pourra avoir des conséquences dramatiques pour les entreprises quand la concurrence deviendra plus forte. Ceux qui vont payer les pots cassés, ce sont les salariés, à qui on demandera de se « serrer la ceinture » en termes de salaires et de temps de travail.

Quant au partage du temps de travail, vous le savez bien, monsieur le ministre, les 35 heures sont mortes depuis longtemps, sous le coup de toutes les mesures qui ont été prises depuis plusieurs années.

Si le taux de chômage baisse – plus pour des raisons mécaniques que grâce à l’action du Gouvernement –, la précarité augmente dans notre pays. Avec votre dispositif, les heures supplémentaires moins payées vont se multiplier de façon totalement dérégulée sans que l’on puisse exercer un contrôle par les accords de branches, tout cela au détriment immanquablement des chômeurs – alors qu’on veut les contraindre à trouver un emploi –, des travailleurs à temps partiel ou à durée déterminée et des seniors.

En effet, votre réforme ne peut pas marcher « par les deux bouts » : plus les heures supplémentaires sont libérées, plus celui qui a un emploi pourra travailler et plus vous aggraverez la situation de ceux qui en cherchent.

J’ai entendu bien souvent l’argument selon lequel les employeurs ne veulent pas embaucher et préfèrent recourir aux heures supplémentaires. Assurément, lorsque le carnet de commandes se remplira, les entreprises préféreront votre système d’heures supplémentaires à la création d’emplois. Monsieur le ministre, même si nous avons des divergences, nous nous respectons. Mais permettez-moi de vous dire que, selon nous, cette mesure va à l’encontre du développement de l’emploi.

J’en reviens au dialogue social. Il faut certes écouter les propos qui sont tenus dans cet hémicycle et dans les milieux que nous fréquentons dans le cadre de nos fonctions, mais il faut également tenir compte de ce qui se dit « à la base », même si je n’aime pas beaucoup cette expression. Je peux vous dire que l’échec d’une négociation comme celle-là est très mal perçu par les salariés, par les syndiqués et même par les patrons. Ils ne comprennent pas, surtout les salariés, qu’on puisse se faire ainsi « rouler dans la farine ». Vous portez là encore un coup à la représentation syndicale.

Nous n’avons pas fini de débattre de cette question. Les résultats de ce que vous allez voter et imposer aujourd’hui ne se feront sentir que dans plusieurs années. Nous aurons l’occasion d’en reparler !

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