Intervention de Thani Mohamed Soilihi

Réunion du 22 janvier 2015 à 9h30
Simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures — Adoption en nouvelle lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, nous sommes saisis en nouvelle lecture du projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.

À l’origine, ce texte comptait plus de quinze demandes d’habilitation. En première lecture, notre assemblée a suivi sa commission des lois, qui lui proposait d’appliquer quelques principes simples de bonne législation : contenir le champ des habilitations à légiférer par ordonnance dans des limites strictes ; privilégier, dans la mesure du possible, l’intégration dans la loi des réformes proposées, sans renvoyer à une ordonnance future ; éviter l’accumulation, souvent observée à l’occasion des lois de simplification, d’amendements trop nombreux, qui étendent excessivement le périmètre du texte.

Mais avant tout, le Sénat s’est opposé à ce que la réforme du droit des obligations échappe au Parlement et soit abandonnée à la procédure de l’ordonnance : les enjeux politiques de la réforme méritaient, en effet, d’être soumis à la décision de la représentation nationale. Ce faisant, nous avons réaffirmé notre confiance dans l’examen parlementaire.

La majorité de l’Assemblée nationale s’est, elle, laissée convaincre par les arguments avancés par le Gouvernement sur la technicité du texte ou sur l’ordre du jour, irrémédiablement encombré. Instruit des expériences passées et plus confiant dans les ressources de la volonté politique, lorsque l’enjeu est unanimement reconnu, le Sénat avait pourtant écarté de tels arguments. Je reviendrai tout à l’heure sur ce point.

Ce désaccord de principe entre les deux chambres a conduit à l’échec de la commission mixte paritaire. En nouvelle lecture, l’Assemblée nationale a largement repris son texte de première lecture, y apportant cependant quelques-unes des corrections formelles ou des adaptations de fond que nous avions suggérées lors de la commission mixte paritaire.

Nous examinons ce texte en nouvelle lecture, ce qui signifie que le Gouvernement pourra décider ensuite d’accorder le dernier mot à l’Assemblée nationale. Celle-ci pourra alors adopter son texte, modifié le cas échéant des amendements que vous adopterez en séance publique, mes chers collègues, ainsi que de ceux adoptés par votre commission et intégrés au texte que vous voterez.

Sur beaucoup de points, les analyses de nos deux assemblées concordent : en première lecture, les députés ont d’ailleurs largement approuvé les nombreuses modifications apportées par le Sénat au projet de loi. Ils ont eux-mêmes apporté au texte plusieurs améliorations notables, que votre commission vous propose de reprendre, sous réserve de quelques modifications. Il en va ainsi de certaines précisions ou simplifications : aux articles 2 et suivants en matière successorale ; à l’article 8 sur les scellés judiciaires ; à l’article 14 bis A sur la signalétique de protection des mineurs applicable aux DVD et jeux vidéos ; aux articles 14 bis et 14 ter sur la création d’un tribunal foncier en Polynésie française.

Sur la vingtaine d’amendements adoptés par votre commission, la plupart sont de coordination ou tendent à apporter certaines améliorations, conformes à l’objet des articles concernés. Plusieurs d’entre eux, toutefois, visent à modifier sensiblement certains dispositifs, voire à les supprimer.

Ainsi, votre commission a souhaité rétablir, à l’article 8, en matière de signification pénale par voie électronique, la symétrie parfaite entre les garanties offertes par ces procédés électroniques et la lettre recommandée avec accusé de réception qu’ils sont censés remplacer.

Tout en validant la création du tribunal foncier en Polynésie française, elle a rejeté l’instauration d’un commissaire du Gouvernement, qui ne présenterait pas les garanties d’indépendance qu’on peut attendre d’un membre de cette juridiction.

Elle a par ailleurs supprimé les articles 9 bis et 9 ter, relatifs aux voiturettes et aux moniteurs d’auto-école, sans lien avec l’objet du présent texte.

Surtout, elle a décidé, d’une part, de supprimer l’article 1er bis, introduit en séance publique à l’Assemblée nationale et relatif au statut juridique des animaux et, d’autre part, de confirmer le choix du Sénat de refuser l’habilitation demandée par le Gouvernement pour conduire la réforme du droit des obligations par ordonnances.

Ces deux points importants méritent quelques explications.

S’agissant du statut juridique des animaux, nous nous sommes interrogés. Pourquoi avoir légiféré ainsi à la va-vite sur un tel sujet ? La rédaction retenue est loin d’être parfaite, en plus de soulever de réelles interrogations. Les promoteurs du texte prétendent qu’il faut assurer une reconnaissance symbolique de la spécificité des animaux dans le code civil. Mais cela pose une grave question de principe : une loi à vocation symbolique est-elle vraiment normative ? Le code civil doit-il être un code civil de symboles ? Surtout, qu’y a-t-il de normatif à disposer que les « animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité » ? La loi n’a pas à dire ce qui est vrai ou faux ; elle proclame ce qui juste ou injuste, autorisé ou interdit.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion