Intervention de Daniel Gremillet

Réunion du 28 janvier 2015 à 14h30
Débat sur le thème : « quels emplois pour demain ? »

Photo de Daniel GremilletDaniel Gremillet :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président, mes chers collègues, l’année 2014, avec une hausse du chômage de 5, 7 %, a confirmé la tendance à l’œuvre depuis la crise financière et économique amorcée en 2007. Aucune inversion de la courbe du chômage n’a été constatée, malgré ce qui avait été initialement annoncé par le Gouvernement. En y regardant de plus près, on remarque que la catégorie d’âge la plus touchée par le chômage regroupe les plus de cinquante ans, qui sont 800 000 à connaître cette situation. Quant aux jeunes, même si le chômage des moins de vingt-cinq a connu une certaine stagnation en 2014, ils sont également très touchés.

Ces deux exemples me permettront de faire le lien entre l’évolution du chômage et la situation de l’industrie.

Selon l’INSEE, le secteur productif français a perdu 9 % de ses actifs depuis les années quatre-vingt. Dans la même période, la part de l’industrie dans le PIB est passée de 35 % à 20 % seulement. Le chiffre d’affaires dans l’industrie, quant à lui, a baissé de 0, 9 % en 2014.

Un récent rapport de la Commission européenne montre que, depuis 2007, les trois pays ayant détruit le plus d’emplois industriels sont l’Espagne, l’Italie et la France, tandis qu’un seul en créait, à hauteur de 60 000 : l’Allemagne.

En 1975, il y avait en tout 689 000 chômeurs dans notre pays. Ils sont aujourd’hui 3 496 000, dont, je l’ai dit, 800 000 âgés de plus de cinquante ans. Il convient donc d’analyser de manière très lucide ce qui s’est passé dans nos territoires, dans notre économie, pour que nous en arrivions là.

Mon propos consiste à faire le parallèle entre croissance du taux de chômage et baisse, année après année, de la production industrielle de notre pays ; entre croissance du taux de chômage et désindustrialisation de la France ; entre croissance du taux de chômage et perte de compétences dans notre pays.

Seuls 27 % des salariés de l’industrie suivent une formation. Cela doit nous interpeller, et nous inciter à nous poser des questions.

De 2005 à 2013, le nombre d’ingénieurs diplômés en France, mais partis travailler à l’étranger est passé de 13 % à plus de 15 %.

Certes, on pourrait se réjouir d’une hausse de la demande. Mais il faut mettre notre situation en perspective avec celle de l’Europe, qui est notre espace économique ; c’est à cet échelon que nous devrions normalement apporter des réponses en matière d’industrie et d’emploi. Or les besoins en postes d’ingénieurs progressent de 5, 9 % à l’étranger, contre 3, 8 % chez nous ! Il y a donc un tassement en France par rapport aux autres pays industrialisés, qui continuent de se développer.

Le tiers des ingénieurs qui quittent la France avec un tel niveau de formation le font à la demande de l’employeur. Autrement dit, les deux tiers le font de leur propre initiative…

Chaque fois qu’un jeune quitte notre territoire, c’est un appauvrissement pour notre territoire.

Chaque fois qu’un jeune perd l’envie d’entreprendre dans notre pays, c’est un appauvrissement pour notre pays.

Certes, créer une entreprise, c’est prendre le risque de l’échec, mais cela peut aussi mener au succès.

Pour gagner la bataille de l’emploi, il faut reconquérir une industrie de production.

Nous venons d’examiner le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République. Je suis heureux des positions que nous avons, ici, au Sénat, adoptées ensemble. Les mesures qui figurent dans le texte sont désormais plus conformes aux réalités du terrain. Il est absolument primordial de rapprocher l’économie des territoires, et confier clairement le rôle de chef de file en matière économique aux régions y contribue.

Nous devons créer des emplois partout en France, en nous appuyant sur les spécificités des territoires. À cet égard, la région est bien l’échelon adéquat de cette connaissance des spécificités de chaque territoire.

Nous devons assurer la vitalité de nos territoires, en leur offrant les meilleures conditions de réussite. Autrefois, en Lorraine, où je suis élu, les industries étaient au milieu des habitations et les investissements cohabitaient avec la vie locale. Aujourd'hui, pour des raisons que je ne conteste pas, le positionnement industriel est tout autre, mais ces bouleversements ne facilitent pas la compréhension et l’acceptation des choix faits sur notre territoire au nom de la production.

Il nous faut renforcer le couple formation/emploi. Il nous faut renforcer le couple formation/entreprise. Il nous faut renforcer le couple formation/production.

Le Sénat a pris la décision de rapprocher la responsabilité économique de la responsabilité de production.

L’été dernier, mon collègue Jackie Pierre et moi-même avons rencontré des chefs d’entreprise du secteur de la chaudronnerie qui avaient des postes à pourvoir et souhaitaient former des chaudronniers. Mais ils n’ont jamais pu le faire, l’autorisation de dispenser la formation dans le lycée tout proche n’ayant jamais été accordée.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion