Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la proposition de loi des sénateurs Alain Richard et Jean-Pierre Sueur, examinée aujourd’hui en deuxième lecture, est essentielle et attendue par les nombreux EPCI – plus d’une centaine sur le territoire – que la censure du Conseil constitutionnel du 20 juin 2014 a fortement impactés ou fragilisés.
À la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité, les sages de la rue Montpensier ont jugé que les dispositions actuelles du code général des collectivités territoriales dérogeaient au principe général de proportionnalité par rapport à la population de chaque commune « dans une mesure qui est manifestement disproportionnée », annulant de ce fait le principe même d’un accord local initialement inscrit dans la loi du 16 décembre 2010 à la demande générale des élus locaux et nationaux.
La décision du Conseil constitutionnel a privé les communes de la possibilité de conclure un accord local : il n’y a plus d’aménagement possible en considération de l’histoire partagée et des enjeux de chaque territoire. Seule reste en vigueur l’unique règle de représentation purement démographique avec l’application du tableau de l’article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales.
Dans mon département, je citerai le cas de la communauté de communes du Genevois, touchée par les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel. Cette communauté de communes est composée de 38 000 habitants répartis sur 17 communes : après la censure du Conseil constitutionnel, elle ne dispose plus que de 42 conseillers communautaires, contre 52 auparavant. Certes, toutes les communes sont représentées, mais deux voient le nombre de leurs délégués passer de trois à deux et huit d’entre elles n’ont plus qu’un seul délégué. Or le développement territorial que peuvent impulser quatre bourgs représentant 13 000 habitants, autour d’une ville-centre de 12 000 habitants, ne correspond en rien aux douze autres collectivités.
L’accord local qui avait été trouvé permettait d’équilibrer la représentation du territoire entre une part prépondérante accordée à la représentation au prorata de la population et une représentation minimale de chaque commune. Il s’agissait de trouver des points d’équilibre et de déterminer une gouvernance adaptée aux enjeux de chaque territoire. La solidarité sur un territoire ne se mesure pas seulement en nombre d’habitants ! Une telle solution profiterait nécessairement aux grosses communes, entraînant de fait une opposition entre l’urbain et le rural.
Il y avait donc urgence : urgence pour les élus locaux de décider de leur représentativité dans leur intercommunalité ; urgence à sécuriser une telle disposition dans un cadre juridique conforme, en apportant notamment une réponse à l’instabilité liée au possible renouvellement des instances de l’intercommunalité. D’ailleurs, je rappelle que les sénateurs Gélard, Leleux, Milon, Carle et l’ensemble des membres du groupe UMP ont déposé, le 3 septembre dernier, une proposition de loi allant en ce sens.
Les ajustements opérés par l’une et l’autre des assemblées dans le cadre de ce texte ont permis de trouver un équilibre, aussi contraignant soit-il : préserver dans les meilleures conditions de sécurité juridique la faculté d’un accord local pour faciliter le consensus intercommunal, dans le respect du principe de l’égalité devant le suffrage.
Redonner un fondement aux accords locaux tout en les encadrant, c’est respecter la démocratie dans sa double composante, démographique et territoriale, ce que le présent texte a essayé de préserver.
Écouter les dynamiques locales, avoir confiance dans leur travail et l’intelligence locale, c’est aussi la mission de notre mandat. Notre histoire est unique : les communes sont le socle de notre pays et de notre démocratie. Sachons écouter leurs représentants et préserver leur représentativité et leur investissement !
Je voterai ce texte, car il préserve un peu de démocratie locale.