Intervention de Delphine d'Amarzit

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 7 novembre 2012 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2013 — Mission « aide publique au développement » - programme « aide économique et financière au développement » - Audition de Mme Delphine d'aMarzit chef du service des affaires multilatérales et du développement à la direction générale du trésor

Delphine d'Amarzit, chef du service des affaires multilatérales et du développement à la direction générale du Trésor :

Le programme 110 relève de la responsabilité du ministère de l'économie et des finances et concentre un tiers du programme budgétaire concourant à l'aide publique au développement (APD). Il est très complémentaire du programme 209, et s'intéresse à trois grandes thématiques : le soutien à la stabilité macro-économique, le soutien aux politiques de croissance et le développement durable.

Les crédits relatifs à l'aide multilatérale, non européenne et non onusienne, sont le principal bloc de ce programme, notamment les contributions de la France aux fonds concessionnels hébergés par les banques multilatérales de développement (BMD) ainsi qu'à certains fonds sectoriels. Sur le PLF 2013, ce sont 674 millions d'euros qui sont prévus, dont 400 millions pour l'association internationale de développement (AID), et 127 millions pour le fonds africain de développement (FAD). Il regroupe également les crédits relatifs aux bonifications des prêts portés par l'AFD vers les États étrangers, et à l'aide budgétaire globale (ABG), ainsi que le financement des opérations d'allégement de dette, multilatérales comme bilatérales.

Au total, le budget 2013 est quasi stable par rapport à 2012 : -2,5% en crédits de paiement, et la répartition prévue est de 58% pour les actions multilatérales, 32% pour les bilatérales, et 10% pour le traitement de la dette des pays pauvres. Une forte baisse, de l'ordre de 24%, est constatée en autorisations d'engagement, mais celle-ci est due à la saisonnalité des annulations de dette.

Pourquoi une telle attention portée aux instruments multilatéraux ? En 2013 auront lieu d'importantes reconstitutions. Nous préparons d'ores et déjà la négociation de la future reconstitution de l'AID (le fonds concessionnel du groupe Banque mondiale) dont la conclusion est prévue dans le courant de l'année prochaine, de même que celle du Fonds africain de développement, le FAD. Concrètement, lors de ces cycles de négociation, les bailleurs de fonds dialoguent avec les institutions pour essayer d'influer sur leurs priorités. Il est important pour la France de faire entendre sa voix sur ces questions, et nous avons particulièrement insisté au cours du temps pour que l'AID accentue sa priorité sur l'Afrique subsaharienne. D'une manière générale, nous participons davantage aux fonds multilatéraux sur lesquels nos priorités sont alignées : nous avons des objectifs en termes d'allocation de notre aide vers l'Afrique subsaharienne, et participer à ces fonds multilatéraux démultiplie ces objectifs. Plus de la moitié des interventions de l'AID, sous forme de dons ou de prêts concessionnels, est dirigée vers les pays d'Afrique subsaharienne. Et bien sûr davantage pour le FAD.

Dans le cadre de cette action multilatérale, nous oeuvrons également à amener les pays émergents à contribuer progressivement à ces fonds. Ceux-ci conduisent de plus en plus une politique d'aide et une politique commerciale dans ces pays. Il faut veiller à ce que ces politiques aient les mêmes standards que les nôtres. En les amenant vers ces outils multilatéraux, on les intègre à une communauté de bailleurs qui procède du même esprit. A défaut, ils interviennent selon leurs propres modalités, et c'est un risque qui peut être mis en avant avec le projet de « banque des BRICS ». La France, de par sa position internationale, doit oeuvrer pour ce système plus inclusif et plus respectueux des standards communs. L'action multilatérale favorise aussi nos entreprises, en permettant de créer un effet de levier important. La part des entreprises françaises dans les marchés de la Banque mondiale est supérieure à celle du Japon, 3ème contributeur de l'AID, et équivalente à celle du Royaume-Uni, 2ème contributeur. Ainsi, dans le cadre de la revue à mi-parcours des actions de la Banque mondiale avant de basculer vers la négociation du prochain cycle, la France a animé pendant un an un groupe de travail sur les États fragiles et proposé des pistes sur la façon d'intervenir et selon quelles modalités dans ces États.

Nous soutenons également des interventions multilatérales sectorielles, au premier rang desquelles l'environnement et le financement de la lutte contre le changement climatique. A travers le programme 110, nous participons aux fonds préalablement existants, comme le fonds pour l'environnement mondial. Le PLF 2013 nous permettra de participer au futur fonds vert pour le climat, issu de la négociation de Copenhague et de Cancun, via une quote-part de la taxe sur les transactions financières domestique. Notre contribution au Fonds vert bénéficie d'ailleurs de la forte visibilité politique attachée à cette taxe.

Le deuxième grand bloc du programme 110 est la contribution aux actions de l'AFD, puisque le ministère met à disposition de l'AFD les fonds nécessaires pour lui permettre de bonifier ses prêts aux États étrangers qui en ont besoin. 242 millions d'euros sont inscrits au PLF 2013. Certains pays sont particulièrement ciblés : la panoplie de prêts de l'AFD permet en effet de mettre en place des partenariats différenciés prévus dans le cadre de la stratégie défendue par le Gouvernement et repris dans le document-cadre de coopération, qui prévoit une différenciation importante en fonction de la zone géographique et de l'état de développement des pays concernés entre les pays émergents, l'Afrique subsaharienne et la zone méditerranéenne.

L'autre grand instrument de financement est celui des aides budgétaires globales, instrument souple et conforme à l'esprit de la Déclaration de Paris. Elles interviennent soit pour apporter un soutien rapide d'urgence, pour favoriser la stabilisation macroéconomique en cas d'un besoin de financement clair, soit pour contribuer à des stratégies de plus long terme visant à lutter contre la pauvreté, via un canal d'aide budgétaire en dons ou en prêts.

Enfin, le programme 110 intègre les impacts budgétaires des annulations de dette des pays pauvres, conformément aux engagements internationaux de la France. En 2012, nous absorbons le point d'achèvement de la Côte d'Ivoire et de la Guinée. En 2013, nous aurons des traitements de dette importants, surtout si nous parvenons à négocier le traitement des arriérés de la Birmanie, peut-être le Zimbabwe également (ces deux traitements sont imputés sur le programme 852). Il nous restera ensuite deux pays importants à traiter, dont le calendrier est incertain : la Somalie et le Soudan.

Enfin, le programme 110 finance aussi les instruments d'aide-liée de l'État, qui ont un double objectif d'aide au développement et de positionnement des entreprises françaises sur des marchés à fort potentiel. La réserve pays émergents n'émarge pas sur le programme 110, mais nous avons le fonds d'études et d'aides au secteur privé (FASEP) ainsi que des fonds plus ciblés.

Voilà pour les axes principaux du programme 110. Il existe une forte complémentarité avec les actions du ministère des affaires étrangères. Nous nous répartissons les instruments mais discutons ensemble des objectifs. Le document-cadre de coopération a été élaboré en commun, nous siégeons ensemble dans certaines instances et le dernier COM de l'AFD, document unique à la différence de la période précédente où chacun négociait le sien, a été élaboré en commun. Notre dialogue est fréquent et va s'intensifier dans le cadre des Assises du développement et de la solidarité internationale.

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