Le projet de loi de finances pour 2013 du ministère de la défense est un budget de transition à trois titres.
Première annuité du budget triennal 2013-2015, il constitue un budget de transition vers le redressement des finances publiques qui implique des économies notamment dans le domaine du fonctionnement et de l'infrastructure qui à terme peuvent poser des difficultés.
Prenant acte de l'écart entre les ressources initialement programmées au titre de la LPM 2009-2014 et les ressources effectivement affectées, écart qui s'élève à 3 milliards d'euros sur la période 2009-2012, c'est un budget de transition dans l'attente d'une nouvelle LPM 2014-2019. Ceci nous a amené, notamment dans le domaine de l'infrastructure, à revoir un certain nombre de dépenses pour tenir compte de la diminution des crédits mais sans anticiper la prochaine LPM et donc à décaler plutôt qu'annuler des opérations.
Enfin, c'est un budget de transition vers le nouveau modèle d'armées qui sera proposé dans le cadre des travaux sur le Livre blanc et la défense nationale, et dont il convient de ne pas préempter les choix qui seront examinés en conseil de défense et de sécurité nationale au tout début de l'année 2013.
En ce sens, le budget pour 2013 tient compte des besoins de financement de la LPM 2009-2014.
Il confirme la baisse des effectifs inscrite dans cette loi, sans pour autant préempter les choix futurs. De plus, il concrétise la juste participation de la défense à l'effort de redressement des finances publiques.
Ainsi sur le périmètre de la mission « Défense », le montant des crédits inscrits au projet de loi de finances s'élève, hors pensions, à 31,4 milliards d'euros, soit le maintien du budget prévu en LFI 2012.
Trois programmes budgétaires sont placés sous la responsabilité du secrétaire général pour l'administration : au sein de la mission « Défense », le programme 212 intitulé « Soutien de la politique de la défense », au sein de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée » et le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ». Je vais vous présenter sept points concernant le programme 212 « Soutien de la politique de la défense » dont vous avez rappelé le montant modeste mais aussi le rôle dans le soutien de la politique de défense.
Il répond à trois enjeux ministériels : d'abord, le pilotage et la coordination des politiques transverses exercées par des directions fonctionnelles, par exemple les questions financières, la politique des ressources humaines ou la gestion du patrimoine immobilier, ensuite la fourniture de prestations dans des domaines particuliers de soutien (infrastructure, soutien du cabinet de l'administration centrale, systèmes d'information, d'administration et de gestion, action sociale, reconversion, etc....) et enfin l'accompagnement social, économique et immobilier de la réforme dans laquelle est engagé le ministère, notamment au titre des restructurations.
Les crédits budgétaires de ce programme s'élèvent à 3,513 milliards d'euros en AE et 2,852 milliards d'euros en CP, soit, comparativement à 2012, une augmentation de 137 millions d'euros des AE et une diminution de 193 millions d'euros des CP. L'augmentation des AE répond à un élément purement technique sur lequel je reviendrai à propos des crédits d'infrastructure.
A ces crédits s'ajoutent des recettes exceptionnelles au titre des cessions immobilières plafonnées à hauteur de 200 millions d'euros, prévision de recettes qui apparaît réaliste et prudentielle mais qui nécessite une forte mobilisation, en tenant compte des risques pesant sur les cessions parisiennes, notamment en terme de calendrier et de décote si elles sont utilisées pour répondre à la politique de logement. Ce sera probablement le cas pour la caserne de Reuilly où le président de la République a fait les annonces relatives à la politique du logement social. Sont ainsi prévus d'être cédés en 2013 à la ville de Paris ou à des investisseurs la caserne de Reuilly, rue de Bellechasse, l'hôtel du génie ainsi que le pavillon et l'abbaye de Penthemont, l'hôtel de l'artillerie à Saint Thomas d'Aquin et le centre de la pépinière. Ce sont des immeubles qui peuvent avoir des vocations diverses, de bureaux mais pas uniquement, et sur lesquels les intentions que pourrait avoir de la ville de Paris en matière de réalisation de logements peuvent avoir un impact. Certaines de ces cessions interviendront tardivement et les recettes ne seront pas utilisables en 2013. La caserne Lourcine a été cédée en 2012 au CROUS et à des établissements spécialisés pour réaliser des logements pour les étudiants pour la somme de 52 millions d'euros qui ont été versés sur le CAS fin septembre par transfert de crédits du CAS du ministère de l'enseignement supérieur. Ils font partie des crédits que nous pourrons utiliser en 2013.
Le plafond d'emploi du programme 212 pour 2013, avec 13 160 ETPT, augmente de 54 emplois par rapport à 2012. Cette évolution s'explique par la poursuite des réformes engagées au niveau de l'administration centrale notamment par la mutualisation de différents services. Nous avons, en 2009, fusionné les structures de soutien de l'administration centrale et celles de la direction générale pour l'armement (DGA) en créant le service parisien de soutien de l'administration centrale (SPAC). Nous allons en 2013 poursuivre ce mouvement en y intégrant le soutien RH-Paie de la DGA, ce qui se traduira par le transfert de 155 emplois de la DGA vers le SGA avec une charge de déflation de 45 emplois qui s'appliquera entre 2014 et 2017. La création du service ministériel des systèmes d'information de fonctionnement RH (SMSIF-RH), à Tours, au plus près du pôle des DRH d'armées, et qui regroupe l'ensemble des compétences de maintenance applicative et de tierce maintenance d'exploitation des SI RH du ministère, se traduira par le transfert de 136 emplois venant des armées vers le SGA.
En neutralisant ces variations de périmètre liées à la réforme, le programme contribue à la réduction globale des effectifs à hauteur de 273 emplois (ETPT).
Les crédits au profit des infrastructures portent sur trois types de dépenses :
- les infrastructures d'une manière générale ;
- la politique du logement familial ;
- et enfin la mise en place du nouveau plan de stationnement.
Les crédits d'investissement au profit des infrastructures représentent un total de près de 1 280 millions d'euros d'AE et plus de 820 millions d'euros de CP, dont les 200 millions d'euros de recettes exceptionnelles évoquées précédemment.
La comparaison entre les dotations 2012 et 2013 doit tenir compte de la mise en place d'AE affectées sur des tranches fonctionnelles, dont notamment 250 millions d'euros au titre des infrastructures d'accueil et de soutien des sous-marins nucléaires d'attaque Barracuda à Brest, Toulon et Cherbourg. Ce mécanisme des tranches fonctionnelles, qui permet d'avoir une indication précise du coût prévisionnel d'un investissement et d'assurer sa réalisation, est mis en place pour les dépenses d'infrastructure à compter de 2013 après avoir été expérimenté en 2011 et 2012.
Entre 2012 et 2013, les crédits destinés aux dépenses d'infrastructure diminuent (recettes exceptionnelles comprises) de 166 millions d'euros.
Pour tenir compte de cette diminution des crédits de paiements en 2013, le plan d'engagement a fait l'objet d'un refroidissement à hauteur de 393 millions d'euros pour l'année 2012 et à hauteur de 351 millions d'euros en 2013 par rapport à la programmation issue de l'exécution de l'actuelle LPM. Les décisions ont été prises en étroite relation avec l'EMA, dans le cadre d'un comité de pilotage de la fonction infrastructure qui réunit sous ma présidence, le major général des armées, les sous-chefs plans et soutien de l'EMA, le directeur des affaires financières, le directeur de la mémoire du patrimoine et des archives et le directeur du service d'infrastructure de la défense. Cet abattement de 393 millions d'euros, soit 30 % des crédits initialement prévus en 2012, a porté sur les infrastructures classiques et surtout les infrastructures techniques, notamment les infrastructures opérationnelles ainsi que sur les infrastructures concernant la mise en place du nouveau plan de stationnement. Les travaux relatifs à la condition du personnel, à l'accueil des nouveaux matériels et à la dissuasion ont été préservés, tant en exécution 2012 qu'en construction budgétaire pour 2013, le ministre nous ayant demandé d'être attentif au maintien de l'activité du personnel militaire, mais aussi à ses conditions de vie car c'est important notamment dans la période du retour de nos troupes d'Afghanistan.
Seront ainsi réalisées et financées en 2013 (crédits de paiement), au titre des opérations majeures, les opérations d'infrastructure pour l'accueil des hélicoptères HN90-Caïman au 1er RHC de Phalsbourg (42,54 millions d'euros) ; les structures de mise en oeuvre et de maintenance ainsi qu'un centre de formation au profit des équipages et des mécaniciens nécessaires à l'accueil de la flotte des A400M sur la base d'Orléans-Bricy (38,62 millions d'euros) ; les études pour l'adaptation des infrastructures d'accueil et de soutien à Toulon, Cherbourg et Brest en vue de la livraison des SNA BARRACUDA (20 millions d'euros) ; les opérations d'infrastructure nécessaires à l'accueil des véhicules blindés de combats d'infanterie - VBCI (19,46 millions d'euros) et l'adaptation des infrastructures nécessaires à l'accueil des frégates multi-missions (FREMM) à Brest (8,05 millions d'euros) qui commencent à sortir des chantiers de Lorient.
S'agissant de la force de dissuasion, nous avons engagé des travaux à l'Ile Longue de réfection des installations électriques et de la station de pompage. Le plan de charge du service d'infrastructure de la défense sera donc bien rempli avec notamment des infrastructures très techniques comme celles que je viens d'évoquer mais avec aussi un programme de remise en état des installations électriques des ports de Brest et Toulon. Ce plan de charges nous permettra de maintenir les compétences du personnel du SID, compétences techniques qui font la singularité du service, l'un des derniers au sein des administrations de l'État, et qui doivent être une priorité si l'on veut conserver un service capable d'apporter aux armées les infrastructures techniques dont elles ont besoin. Si nous voulons conserver dans ce service des ingénieurs et des techniciens de bon niveau, il faut maintenir un volume suffisant de travaux. Donc je me réjouis que nous puissions lancer des travaux d'une certaines technicité (aménagement de quais, installations électriques, dragage).
Les crédits d'investissement au profit du logement familial représentent 45 millions d'euros, complétés par 55 millions d'euros au titre des crédits de fonctionnement, consacrés principalement au paiement de loyers outre-mer et à des dépenses d'entretien du propriétaire. Nous avons passé une convention de longue durée avec la SNI qui est chargée des travaux d'entretien du locataire. Ces montants, qui peuvent paraître modestes, permettront de poursuivre l'adaptation du parc du ministère de la défense à la nouvelle carte militaire, au travers de ventes (559 depuis 2009, 1 300 d'ici 2016), de nouvelles réservations (1 200 depuis 2009, 1 300 d'ici 2016), de résiliations de conventions (2 000 depuis 2009, 500 d'ici 2016) et d'évolution du parc des logements domaniaux. Un complément de dotation sur cette politique sera fourni par l'établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique dans le cadre d'un fonds de concours à hauteur de 10 millions d'euros. Cet établissement public est intervenu à hauteur de 18 millions d'euros en 2012. Ces fonds ont des réserves financières de plusieurs centaines de millions d'euros. Grâce à une modification du décret qui les concerne, les excédents de résultats de ces fonds peuvent être utilisés pour acquérir des logements qui servent de garantie pour le fonds et en même temps répondent à la demande des personnels.
Enfin, 202,63 millions d'euros en AE et 208,62 millions d'euros en CP seront consacrés à la mise en oeuvre du nouveau plan de stationnement, en réalisant par exemple le transfert du centre de renseignement Air (CRA) et le commandement des forces aériennes (CFA) au Mont-Verdun (10,8 millions d'euros), en créant une plate-forme logistique à Orléans-Chanteau dans le cadre de la réorganisation du ravitaillement sanitaire (28,7 millions d'euros) ou encore en restructurant le quartier Rannes de Tours qui accueille les services de la direction du personnel militaire de la marine (6,3 millions d'euros), la poursuite des travaux d'installation des groupements de soutien des bases de défense (11 millions d'euros).
Il convient cependant d'être vigilant et de garantir le maintien des crédits à ce niveau afin de préserver et développer les compétences du service. A cet égard, le fait que nous (état-major des armées, SGA) ayons été contraints au 1er trimestre de reporter près de 750 millions d'euros d'opérations inscrites initialement en programmation ne peut pas être renouvelé. Si nous ne disposons pas des crédits suffisants pour entretenir et améliorer le patrimoine, il faudra nécessairement revoir le plan de stationnement. Une étude sur la rationalisation de la maintenance du parc immobilier du ministère nous a conduit à considérer que pour maintenir en l'état le patrimoine, il faudrait consacrer en 2012, 16,77 euros TTC par m², soit 529 millions d'euros alors que nous consacrons 10,45 euros par m² soit 350 millions d'euros, toutes ressources confondues, c'est-à-dire les crédits d'entretien courant 130 millions d'euros et les crédits destinés à la rémunération du personnel employé dans des régies (4 031 postes). Au-delà de la maintenance des bâtiments, ce constat nous conduit à mener une réflexion sur la nécessité d'acquérir plutôt que de louer dans le cas des immeubles de bureaux non spécifiques. Faut-il faire cet investissement pour 25-30 ans alors que nous ne savons pas si les structures seront organisées de la même façon et avec les mêmes besoins à cette échéance ? Nous nous interrogeons en définitive sur la vision très patrimoniale que nous avons de ce parc et sa conciliation avec une diminution des enveloppes de crédits qui peuvent lui être consacrées. En l'état actuel, il faudrait autour de 1,5 milliard d'euros par an, or on est bien en dessous et on ne voit pas comment atteindre un tel niveau, ce qui conduit à réviser notre politique en ce domaine, en tout cas à l'étudier, le dernier rapport de la Cour des comptes nous y invitant d'ailleurs.
Les crédits destinés aux systèmes d'information d'administration et de gestion s'élèvent à 118 millions d'euros en AE et 106,2 millions d'euros en CP soit une baisse de 8 % pour les crédits de paiement. Cette baisse est possible grâce à la rationalisation du parc, notamment la diminution du nombre d'applications, qui commence à produire des effets.
Mais des difficultés comme celles que nous rencontrons avec Louvois entraînent aussi des dépenses supplémentaires que nous n'avons pas prévues. Ainsi, le décalage du raccordement de l'Armée de l'air entraîne une dépense supplémentaire de 1,5 million d'euros. En conséquence, nous sommes en train d'effectuer une revue de tous les projets en cours pour les maintenir sous des contraintes budgétaires fortes et j'ai décidé la mise en place d'un système de pilotage en crédits de paiements plus précis que celui dont nous disposions, en autorisations d'engagement.
S'agissant des crédits de la politique des ressources humaines, le budget de l'action sociale s'établit à 78,4 millions d'euros. Il retrouve ainsi son niveau de 2009. Cela permettra néanmoins de maintenir les actions en faveur de l'accueil des jeunes enfants, de la protection complémentaire, du soutien psychologique des familles des militaires servant notamment en Afghanistan et des personnels handicapés et la prise en compte des risques psychosociaux.
S'agissant des restructurations, le ministère consacrera 210 millions d'euros en 2013 à l'accompagnement social (dont 95 millions d'euros sur le programme 212). Les mesures de ce plan d'accompagnement des restructurations (PAR) porteront notamment sur l'aide à la mobilité et l'incitation au départ des militaires, pour 115 millions d'euros (dont 106 millions d'euros pour le financement du pécule). S'agissant du personnel civil, elles se répartiront, pour l'essentiel, entre les indemnités de départ volontaire, pour 33 millions d'euros (dont 28 millions d'euros dédiés aux ouvriers de l'Etat), l'accompagnement de la mobilité (28 millions d'euros) et le financement des surcoûts liés à l'indemnisation du chômage (29 millions d'euros).
Enfin, le volet économique de l'accompagnement des restructurations sera doté à hauteur de 60,3 millions d'euros en AE. 60 millions d'euros seront destinés aux entreprises, collectivités territoriales et autres collectivités, et 0,3 million d'euros à des diagnostics territoriaux. Nous allons entrer dans une phase d'accélération de la consommation de ces crédits car nous avons désormais 45 contrats de redynamisation des sites de défense et plans locaux de redynamisation signés sur les 58 prévus initialement, et ils commencent à être mis en oeuvre.
Au global, les crédits de fonctionnement du programme 212 seront réduits de 54 millions d'euros en crédits de paiement au titre des économies prévues pour le redressement des comptes publics. 15 millions d'euros porteront sur les fonctions supports et concerneront principalement le fonctionnement de l'administration centrale (13,7 millions d'euros). Cela nous conduit à examiner l'ensemble des dépenses de fonctionnement courant, à demander par exemple de ne plus acheter de mobilier de bureau pour les services appelés à rejoindre Balard en 2015, mais aussi à réduire l'ensemble du parc des véhicules de gamme commerciale de 3 000 véhicules sur 16 000, en essayant de faire principalement l'effort sur les administrations centrales et d'en limiter l'impact sur les bases de défense. La mise en oeuvre de ces mesures d'économies commence à poser des difficultés de fonctionnement quotidien. Elle est néanmoins indispensable.
En conclusion, le budget pour le programme 212 s'inscrit pleinement dans les objectifs de réduction des dépenses de l'État. Il fait apparaître des difficultés notamment en ce qui concerne les crédits d'infrastructure qui doivent nous inciter à nous poser de réelles questions dans la perspective de la prochaine LPM sur notre déploiement sur le territoire. Nous avons fait le nécessaire pour faciliter l'arrivée de nouveaux matériels et pour maintenir les infrastructures techniques et celles en faveur du personnel à niveau.
Cependant les dépenses d'infrastructures vont peser sur la prochaine LPM, car il va falloir réaliser des dépenses très importantes compte tenu de l'arrivée de nouveaux équipements comme les sous-marins nucléaires, mais aussi des travaux sur nos installations nucléaires des ports de Brest et Toulon et sur certaines bases aériennes.