Intervention de Roselyne Bachelot-Narquin

Réunion du 26 novembre 2010 à 22h15
Loi de finances pour 2011 — Solidarité insertion et égalité des chances

Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale :

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie d’être présents, avec Marie-Anne Montchamp et moi-même, en cette heure avancée de la nuit.

Dans le contexte de sortie de crise que nous connaissons, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » occupe une place centrale, tous les orateurs en sont convenus.

Je voudrais rappeler les principales priorités de cette mission : accroître l’engagement financier du Gouvernement envers les personnes en situation de handicap, soutenir une politique volontariste d’égalité entre les femmes et les hommes ; engager l’État en faveur des familles les plus vulnérables ; enfin, mettre l’accent sur l’accompagnement des personnes vers l’emploi, à travers le revenu de solidarité active.

Premièrement, avec un programme de 9, 9 milliards d'euros, en augmentation de 8, 6 %, les personnes handicapées occupent une place essentielle dans la mission « Solidarité ». Les engagements pris par le Président de la République lors de la Conférence nationale du handicap du 10 juin 2008 seront tenus.

Il s’agit, tout d’abord, de la revalorisation de 25 % de l’allocation aux adultes handicapés, qui représente un effort sans précédent de la solidarité nationale, à hauteur de 2, 3 milliards d’euros en cinq ans. Vous avez été plusieurs – M. Cazalet, Mme Hermange, M. Paul Blanc – à saluer cette mesure.

Dans le projet de loi de finances pour 2011, l’AAH augmente de 704 millions d'euros, pour un total de 6, 9 milliards d’euros. J’ai entendu les recommandations de prudence de Paul Blanc sur l’évaluation du montant inscrit pour 2011. Je note aussi qu’Albéric de Montgolfier donne acte au Gouvernement d’un progrès dans la sincérité de la budgétisation de l’AAH, et je l’en remercie.

Je crois que le montant de 6, 9 milliards d’euros de l’AAH est maintenant correctement estimé et qu’il est plus précis que celui qui avait été prévu pour 2010 : nous avons entendu les recommandations de la Haute Assemblée sur ce point.

En tout état de cause, il n’y a plus de dette de l’État vis-à-vis de la CNAF pour le versement de l’AAH et nous sommes attentifs à ce qu’une telle situation ne se reproduise pas.

Au-delà de la question des ressources, c’est l’intégration des personnes handicapées dans l’emploi qui doit être notre objectif.

Comme l’a fort bien souligné Mme Hermange dans son excellente intervention, cette intégration commence par la scolarisation des enfants handicapés. Elle passe aussi par l’accompagnement des personnes handicapées dans l’emploi, en particulier par le biais de la formation.

Le bilan à cet égard est positif, même s’il peut évidemment encore être amélioré – je pense à l’accessibilité effective des locaux de formation. Je voudrais saluer les résultats positifs de l’Association pour la formation professionnelle des adultes, l’AFPA, qui dispose de programmes spécifiques pour les travailleurs handicapés, le travail des centres de rééducation professionnels, les CRP, et la mobilisation de ces acteurs essentiels que sont l’AGEFIPH, l’Association de gestion des fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées, et les conseils régionaux.

Faciliter l’accès d’une personne handicapée à l’emploi, c’est aussi éviter qu’elle n’y perde financièrement quand elle accède à un travail. C’est la raison pour laquelle nous améliorons le mécanisme de cumul entre allocation et salaire pour faire plus simple, plus équitable et plus incitatif.

Le décret qui organise ce mécanisme entre en vigueur dès janvier prochain : le cumul entre le salaire et l’AAH sera possible jusqu’à 1, 32 fois le SMIC, contre 1, 1 aujourd’hui.

Nous mettons en place les conditions d’un véritable accompagnement vers l’emploi des attributaires de l’AAH : depuis 2009, ceux-ci bénéficient systématiquement d’un bilan professionnel et les personnes en capacité d’accéder à l’emploi sont automatiquement reconnues « travailleurs handicapés ».

Aider les personnes handicapées à accéder à l’emploi, c’est aussi offrir, à certaines d’entre elles, la possibilité d’intégrer une structure médico-sociale d’aide par le travail.

Là encore, il s’agit de la réalisation d’un engagement du Président de la République : 1 000 places dans les ESAT, c'est-à-dire les établissements et service d’aide par le travail, seront créées en 2011, en plus des 117 211 places existant à ce jour. Les crédits qui sont consacrés à ce dispositif s’élèvent à 2, 6 milliards d’euros pour 2011. Ils sont en augmentation de 2, 9 % par rapport à 2010.

En plus de cet effort sur les créations de places, nous dégageons des crédits d’investissement, à hauteur de 12 millions d’euros, pour financer, entre 2011 et 2013, la remise aux normes des établissements qui en ont besoin.

Mme Hermange, ainsi que M. Paul Blanc, me semble-t-il, ont évoqué la place centrale des maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH.

Je tiens à souligner les progrès qui ont été possibles grâce à ces structures : après des difficultés au démarrage et malgré quelques points noirs ici ou là, les MDPH se sont imposées dans le paysage du handicap.

Une partie des difficultés résiduelles sont liées, je le reconnais, aux conditions de la mise à disposition de personnels de l’État. Comme Mme Hermange, je veux souligner les solutions qui sont apportées au travers de la proposition de loi de M. Paul Blanc, qui a été adoptée par le Sénat le 25 octobre dernier et qui sera examinée très prochainement par l’Assemblée nationale, me semble-t-il. Ce texte permettra une meilleure intervention des MDPH et leur offrira des garanties financières renforcées.

S’agissant de la contribution de l’État à ces maisons, nous tiendrons nos engagements. Pour 2010, tous les postes laissés vacants par des fonctionnaires mis à disposition par l’État ont donné lieu à une compensation, dès cette année. Pour la dette restante des années 2006 à 2009, le projet de loi de finances rectificative prévoit un versement qui solde – enfin ! – ce contentieux, et je m’en réjouis.

Deuxièmement, je voudrais évoquer le droit des femmes, à propos duquel Mmes Printz et Pasquet sont intervenues. C’est un thème qui me tient à cœur, particulièrement au lendemain de la journée nationale de lutte contre les violences conjugales.

Madame Printz, je vous rappelle tout d’abord que l’Assemblée nationale a augmenté de 2, 5 millions d’euros les crédits du programme en faveur des femmes, qui s’accroîtront ainsi de 7 %. Le Gouvernement ne reviendra pas sur cet effort particulier voulu par l’Assemblée nationale et que le Sénat a souhaité également saluer.

M. de Montgolfier m’a interrogé sur la répartition des crédits de ce programme. Le nombre d’associations qui sont soutenues est effectivement important. Certains ont parlé de saupoudrage. Au contraire, je crois qu’il s'agit d’une façon de saluer un tissu associatif très dense et réticulé, car les actions menées dans ce secteur, même si elles s’inscrivent dans le cadre d’axes définis à l'échelle nationale, doivent trouver leur traduction au niveau local.

Toutes les mesures financées au travers de ce programme reflètent la volonté forte du Gouvernement d’agir en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes.

Le dernier plan en date de lutte contre les violences conjugales arrive à son terme. Les résultats en sont positifs, car il a permis d’améliorer la sensibilisation du grand public. La plateforme téléphonique du 39-19 est de mieux en mieux connue. Elle rencontre un vrai succès. On peut d'ailleurs le regretter, car il montre que les violences sont très importantes, mais au moins ce numéro est-il largement diffusé auprès des femmes.

Nous avons élargi notre approche des violences au sein du couple : pour la première fois, la question, trop longtemps ignorée, des enfants témoins de ces violences a été prise en compte. Le cadre juridique de protection des femmes victimes a ainsi considérablement évolué cette année avec la loi du 9 juillet 2010. À cet égard, je veux rendre hommage à notre collègue Nadine Morano, qui a été une fervente partisane de ce texte extrêmement important.

Comme je l’ai annoncé, je présenterai, avant la fin de l’année, un troisième plan de lutte contre les violences faites aux femmes. Je veux rassurer Mme Pasquet : le Gouvernement ne relâchera pas ses efforts.

Je veux également apaiser les craintes de Mme Printz sur l’avenir du service du droit des femmes, de ses déléguées au plan local et des moyens qui leur sont consacrés.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, la mécanique budgétaire a été modifiée : il a été décidé de transférer les dépenses de personnel du programme 137 vers le programme 124, le programme support du ministère qui regroupera désormais l’ensemble des dépenses du personnel de la mission.

Il s’agit d’une mesure de simplification administrative, mais les moyens humains de la politique en faveur du droit des femmes continueront de faire l’objet d’un suivi particulier en crédits et en emplois.

Troisièmement, le soutien aux familles est renforcé dans ce projet de loi de finances. Ce programme atteindra 232 millions d’euros l’an prochain.

Je veux d’emblée apporter un éclairage sur la baisse apparente des crédits.

D’une part, le transfert de l’allocation de parent isolé aux départements d’outre-mer, avec la mise en place du RSA en outre-mer, diminue de 12, 5 millions d'euros la dépense retracée dans le programme 106. Toutefois, les départements d’outre-mer retrouvent bien sûr un montant équivalent grâce à un transfert de TIPP.

D’autre part, la diminution toute relative du financement des actions en faveur de la politique d’aide à la parentalité est plus que compensée par l’augmentation des crédits qui ont la même finalité et qui sont prévus dans le cadre de la COG, la convention d’objectifs et de gestion, 2009-2012, signée entre l’État et la CNAF, la Caisse nationale d’allocations familiales : d’ici à 2012, ces crédits augmenteront de 15, 5 % par an, pour atteindre 53 millions d’euros en 2012.

J’en viens au Fonds national de financement de la protection de l’enfance, dont nous aurons l’occasion de débattre dans quelques instants, lors de l’examen des amendements.

Je rappelle que l’État n’a pas l’obligation de compenser intégralement les charges résultant pour les départements de la mise en œuvre de la loi, car ce texte n’a pas créé de compétences nouvelles, ni étendu celles qui existaient déjà.

S’agissant des départements, le Gouvernement a pris plusieurs mesures récemment.

Tout d'abord, un fonds de soutien aux départements en difficulté sera mis en place. Ce sont 75 millions d'euros qui seront ainsi répartis et prévus dans le projet de loi de finances rectificative, afin de tenir compte de l’évolution de l’APA.

Ensuite, un deuxième fonds, également doté de 75 millions d'euros, sera institué pour apporter un soutien, contractualisé avec les départements les plus en difficulté.

Enfin, le Gouvernement a accepté de revaloriser la compensation du RSA pour 35 départements, en reconduisant le montant versé en 2010, alors que la loi prévoyait un ajustement au vu de la dépense constatée dans le compte administratif.

Plus généralement, en ce qui concerne l’action du Gouvernement en faveur de l’enfance, je voudrais rappeler l’apport majeur des états généraux consacrés à cette question, qui se sont tenus d’avril à mai 2010 à la demande du Président de la République.

Parmi les 19 mesures annoncées, certaines sont prioritaires. J’en citerai seulement trois.

Tout d'abord, le Comité national de soutien à la parentalité, qui a d'ailleurs été installé il y a quelques jours par Nadine Morano, rendra plus efficace le pilotage des dispositifs en la matière.

Ensuite, le décret qui doit favoriser le suivi de l’enfant bénéficiaire de l’aide sociale lorsque la famille change de ville ou de département sera publié d’ici à quelques jours.

Enfin, des tests des logiciels de contrôle parental seront lancés, avec l’objectif d’en faire une norme expérimentale AFNOR.

Bien d’autres mesures, tout aussi importantes, telles que le livret de parentalité, ou encore l’accès aux soins bucco-dentaires pour les enfants en situation de pauvreté, seront mises en œuvre au premier semestre de 2011.

Quatrièmement, le revenu de solidarité active constitue un axe majeur de la politique du Gouvernement pour les publics les plus fragiles.

Il a été mis en œuvre dans une période difficile et il n’a jamais aussi bien répondu à ses objectifs, à savoir lutter contre la pauvreté et inciter à la reprise d’activité.

Monsieur de Montgolfier, nous aurons l’occasion de débattre du montant du Fonds national des solidarités actives, le FNSA, et de l’existence ou non d’excédents.

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