Les questions qui ont été posées touchent à des problèmes de fond. Le projet qui est actuellement en débat répond à deux objectifs, des mesures à court terme et des mesures à moyen terme. Pourquoi ce point n'a-t-il pas été abordé ? Je l'ai dit dans mon propos liminaire : toute réforme, pour être comprise et acceptée, doit paraître juste. Aborder le problème des régimes spéciaux et des régimes de fonctionnaires ne présentait pas de caractère d'urgence.
Le projet de loi vise à trouver les financements d'ici 2017 pour répondre aux injonctions de l'Europe, qui exige de la France qu'elle fournisse un certain nombre de réformes, et à celles des marchés qui nous financent.
On a fait le choix le plus facile pour ce faire, celui de l'allongement de la durée de cotisation. Il manque effectivement un volet. On considère qu'on aurait pu aborder la question de la convergence des trente-cinq régimes existants. C'est un sujet qui mérite clarification, afin de paraître plus équitable aux yeux de tous. Il faut prendre le temps de travailler sur le taux de remplacement, et bien définir le montant des pensions. Je regrette qu'on n'ait pas abordé plus clairement ce sujet dans le projet de loi. Nous souhaitons que l'on étudie cette convergence, mais avons bien conscience que cela nécessite un peu de temps.
Je rejoins sur ce plan ce qu'ont dit mes collègues : la réforme n'a pas pour autant exonéré totalement l'ensemble des régimes. Les cotisations, l'allongement de la durée, touchent les régimes de fonctionnaires, et les régimes spéciaux sont depuis 2008 en phase de rattrapage.
Comme on l'a déjà souligné, l'écart vient en partie de la réforme Balladur, qui portait sur le secteur privé, mais la situation est aujourd'hui telle qu'il y a urgence à clarifier ce point. C'est, selon moi, une des conditions pour que les jeunes et les moins jeunes demeurent attachés au système de répartition. Il faut démontrer que ce régime est un choix de société, qui répond aux exigences des différentes catégories sociales. Je vous engage à aborder rapidement ce sujet.
Ne risque-t-on pas, de ce fait, de se tourner vers la capitalisation ? Il suffit d'étudier ce qui se passe dans les pays qui ont choisi ce système. Cela n'a jamais empêché ces populations de voir leur pension baisser en cas de crise économique. Cela n'empêche pas non plus les choix individuels. Les Français l'ont déjà largement entériné : l'assurance-vie, de mémoire, représente environ l'équivalent, en en-cours, de la dette de la France ! Moins le système sera transparent, plus la méfiance s'installera. L'argent ainsi capitalisé n'ira pas vers la consommation, ni vers l'investissement, faute d'avoir su garantir la pérennité des décisions prises. Or, certaines personnes peuvent capitaliser ; d'autres ne le peuvent pas. Il y a donc effectivement là un véritable hiatus.
Faut-il changer le système ? Ce changement - qui prendra du temps - résoudra-t-il les problèmes de financement ? Le système suédois, où l'on ajuste les pensions en fonction de l'évolution du PIB, avec une incertitude sur le montant, est envisageable. Les Suédois ont mis très longtemps pour le mettre en oeuvre. Est-ce souhaitable ? Les Français le souhaitent-ils, compte tenu du régime qui est aujourd'hui le leur ?
Pourquoi pas un régime par points ? Mes collègues l'ont dit : le régime par points s'entend sur toute la carrière. Cela suppose un certain nombre de précautions, afin de ne pas risquer de facto une baisse des pensions, que l'on redoute.
Quels que soient les choix, ils ne peuvent se faire que sur le long terme. Or, notre problème porte sur 2017 et sur le mur de 2020. Changer de système résout-il nos difficultés de financement à court et moyen termes ? Je n'en suis pas certain. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas s'y attacher - mais l'urgence est ailleurs.
Pour le reste, je ne reviendrai pas sur ce qu'ont dit mes collègues s'agissant du COR et autres instances. Chacun doit être dans son rôle. Si ces rôles sont bien définis, la gouvernance aura des chances de fonctionner.
En ce qui concerne les TPE, les salariés doivent être défendus avec les mêmes droits, mais en la matière, on ne pourra faire autrement que par la régionalisation ou la mutualisation. On ne peut en effet reproduire, dans une TPE, ce qui existe dans les grandes entreprises. Ce n'est même pas envisageable.