Je présenterai le volet numérique des assises de la ruralité la semaine prochaine dans les Côtes d'Armor. Un séminaire gouvernemental a été consacré à la ruralité à Matignon, et je peux vous assurer que le numérique est systématiquement introduit dans cette problématique, que ce soit dans la définition des objectifs par le Premier ministre ou dans le travail quotidien que nous menons avec Sylvia Pinel. C'est une priorité absolue de ce Gouvernement.
Par exemple, pourquoi ne pas étendre les zones d'initiative publique à certaines zones périphériques considérées comme étant en zone AMII (appel à manifestation d'intention d'investissement) ? Si les opérateurs privés ne souhaitent pas y aller, et que nous sommes en mesure d'attirer des investisseurs, y compris étrangers, je n'exclus pas cette option pour régler la question du financement. Affirmer cela ne remet pas en cause l'objectif de déploiement du très haut débit à l'horizon 2022.
Je partage une très grande partie des conclusions du rapport de Corinne Erhel et Laure de La Raudière, qui est le fruit d'un travail très étoffé mené en France et à l'étranger. La plupart d'entre elles sont mises en oeuvre. Cet après-midi même, j'ai annoncé le nom des métropoles labellisées « French Tech ». Le rapport insiste sur l'importance de soutenir les écosystèmes numériques, en particulier ces jeunes entreprises innovantes à très forte croissance qui sont à l'origine des créations d'emplois dans les secteurs innovants. Le président de la République a lancé un plan e-education, qui est une des préconisations fortes du rapport. J'ai, par exemple, beaucoup insisté, avec succès, pour que l'apprentissage du code soit offert dans le temps périscolaire et intégré au socle commun de l'éducation nationale. Enfin, ce rapport demande une position forte de la France à l'échelle européenne, en faveur d'une stratégie industrielle européenne en matière de numérique. Nos industriels ont perdu des parts de marché face à l'émergence d'acteurs dits « over-the-top » (OTT), les géants de l'Internet. 78 % des entreprises du numérique cotées sont américaines, 2 % européennes. L'Europe doit désormais mener une contre-offensive, après avoir délaissé ce secteur de façon coupable. La nouvelle Commission européenne a réalisé l'importance de ces enjeux, puisque trois commissaires européens, dont le commissaire allemand, seront en charge de ce sujet. Lors du conseil du 27 novembre prochain, nous défendrons des positions françaises fortes, qui sont aujourd'hui largement entendues et partagées.
En ce qui concerne le service public universel du numérique, il était temps d'avancer. Depuis que l'idée d'espaces publics numériques a été lancée en 1997, des réseaux d'acteurs du numérique ont été mis en place, en particulier dans le domaine de la médiation, mais sans pilotage stratégique. Depuis quinze ans, les forces du marché l'ont emporté. Cet été, j'ai lancé une consultation auprès des centres de médiation, pour les identifier dans un premier temps, car ils prennent des formes nouvelles. Outre les traditionnels réseaux de service public numérique, sont désormais recensés les fab lab, les ateliers de fabrication numérique, les tiers lieux, les ateliers de travail partagé, les espaces de coworking... Ces initiatives locales foisonnent, souvent sous la forme de partenariats entre acteurs privés et publics. Cette consultation a rencontré un vif succès. Des centaines d'acteurs ont répondu, pour demander une mise en valeur de leur action, leur mise en réseau ainsi qu'un accompagnement de l'État. Cet immense chantier a été lancé cet été. J'ai fait quelques annonces lors des assises de la médiation du numérique à Bordeaux, auxquelles je vous renvoie.
Je ne remets aucunement en cause l'action des collectivités territoriales. Au contraire, le déploiement d'internet dans les territoires dépend d'elles. Il ne s'agit pas là d'un désengagement de l'État, mais d'une revendication de leur part. Dès que l'État intervient un peu trop dans ce domaine, cela nous est reproché. Et ce système fonctionne plutôt bien, il faut aussi savoir le dire. Après deux ans de mise en oeuvre de ce plan très haut débit, il est déjà possible d'identifier les collectivités « bonnes élèves » de celles qui accusent un certain retard, sans porter de jugement sur leur capacité de mobilisation et de financement. A la fin, l'État devra naturellement identifier les cas les plus problématiques. En attendant, le temps passe, et les collectivités peuvent agir, pour répondre aux attentes de la population. Il est aujourd'hui inacceptable de ne pas disposer d'accès internet ou à la téléphonie mobile. C'est une compétence ancienne des collectivités, et non un transfert récent. Depuis un certain nombre d'années, les plans de déploiement se sont multipliés. Il ne s'agit donc aucunement de remettre en cause l'action des collectivités territoriales. Au contraire, par rapport aux autres pays, nous n'avons pas à rougir de leur action.
1,4 milliard d'euros sont consacrés au numérique dans le projet de loi de finances pour 2015, auxquels il faut ajouter les 900 millions déployés dans le cadre du programme d'investissements d'avenir (PIA). L'investissement de l'État pour les années 2015 et 2016 est sécurisé, car il est issu des redevances pour les fréquences de la bande 1800 Mhz, qui seront consacrées au plan très haut débit. Le montant de l'investissement total, que j'ai déjà mentionné, est de 3,3 milliards d'euros.
Dans les collectivités d'outre-mer, nous avons avancé, même si cela ne se voit pas nécessairement car les déploiements prennent du temps, pour des raisons géographiques évidentes. Pour la Guadeloupe, l'accord de pré-engagement a été signé cet été par le Premier ministre. La Guadeloupe entre naturellement dans le cadre du plan France très haut débit et fait partie des collectivités motrices, qui vont pouvoir avoir des résultats très concrets d'ici quelques années. L'attribution des licences mobiles en 4G a été accélérée : elle s'effectuera dès le début de l'année prochaine. C'est là aussi un processus très complexe. On peut certes regretter qu'il intervienne en outre-mer dans un second temps, après le territoire métropolitain, mais il faut se réjouir de cette accélération du calendrier voulue par le Gouvernement.
En ce qui concerne le prix des offres de fibre pour les entreprises, je connais cette complainte des entreprises. Sachez que les artisans et les très petites entreprises bénéficient des mêmes tarifs que les particuliers. Un des effets vertueux attendu du déploiement de France très haut débit est justement que l'arrivée massive de la fibre permette de faire baisser les prix. Il faudra le vérifier, lorsque le plan aura atteint sa vitesse de croisière. Je veille à la question, car il est effectivement regrettable de perdre en coût d'abonnement ce qu'on gagne en compétitivité grâce à la fibre. A défaut de baisse des prix, l'État devra agir en conséquence.