Intervention de Roland du Luart

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 24 juin 2014 : 1ère réunion
Inventaire des oeuvres d'art en dépôt dans les représentations diplomatiques — Contrôle budgétaire - communication

Photo de Roland du LuartRoland du Luart, rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de la France » :

Il me revient de vous présenter les conclusions de mon contrôle budgétaire de cette année, qui a porté sur l'inventaire des oeuvres d'art et autres meubles en dépôt dans les représentations diplomatiques. Un tel sujet peut, de prime abord, paraître quelque peu futile. Pourtant, il s'agit d'un véritable enjeu patrimonial - qui a longtemps été négligé par l'État. Le ministère des affaires étrangères dispose, selon le dernier décompte, de plus de 18 000 objets d'art dans son réseau à l'étranger, dont près de 11 000 ne lui appartiennent pas.

Je dirai simplement quelques mots au préalable pour évoquer ce que sont les dépôts. Des meubles et objets d'art peuvent, depuis des temps anciens - le Mobilier national est le successeur du Garde meuble royal créé sous Henri IV, être déposés dans des locaux autres que des musées. Actuellement, ces dépôts servent en particulier à meubler les résidences présidentielles, l'hôtel et les résidences affectées au Premier ministre, les ambassades de France, les hôtels ministériels, les hôtels des présidents des assemblées ainsi que les cabinets de travail des chefs des grands corps de l'État.

Les principaux déposants sont le Mobilier national, le centre national des arts plastiques (CNAP) pour les objets inscrits sur l'inventaire du Fonds national d'art contemporain (FNAC) et, même s'ils ne procèdent plus à de tels dépôts, certains grands musées ainsi que la Cité de la céramique pour les services de Sèvres. Pour sa part, le ministère des affaires étrangères est évidemment l'un des principaux dépositaires tant du fait de l'importance de son réseau que de son rôle de représentation de notre pays.

Chaque dépôt fait à présent l'objet d'une convention détaillant notamment les responsabilités de chacun, les conditions de conservation des objets, les conditions dans lesquelles ils devront être restaurés ou rapatriés le cas échéant et les obligations du dépositaire en matière d'inventaire.

Tout d'abord, il faut rappeler que le ministère des affaires étrangères, comme les autres, vient de loin.

L'intérêt de l'État pour la question de son patrimoine mobilier et ses oeuvres d'art en dépôt date, en fait, d'un rapport public particulièrement vif de la Cour des comptes de février 1997, sur les musées nationaux et les collections nationales. La Cour des comptes a alors mis en lumière relevé l'insuffisante rigueur de la tenue des inventaires et du suivi des dépôts consentis par l'État depuis deux siècles, qui s'était traduite par des disparitions significatives dans les collections nationales.

Cette enquête a abouti en 1996, avant même la publication de ses conclusions, à la création de la commission de récolement des dépôts d'oeuvres d'art (CRDOA), aujourd'hui présidée par Jacques Sallois, ancien directeur des musées de France et ancien directeur de cabinet de Jack Lang. La commission veille au récolement, c'est à dire au contrôle sur place des dépôts d'oeuvres d'art effectués par les déposants au bénéfice des dépositaires.

Dans ce contexte, le ministère des affaires étrangères se montrait aussi peu soucieux que les autres du patrimoine dont il disposait. Il ne tenait aucun inventaire, la conservation des objets était plus qu'incertaine, la confusion sur leur statut ou leur valeur était complète. Une anecdote l'illustrera : en 1973, une pendule de grande valeur patrimoniale, issue d'un cadeau du roi d'Espagne à l'Empereur en 1808, appartenant au Mobilier national a été vendue à un antiquaire américain par notre ambassade à Washington avec d'autres objets qui croupissaient dans un grenier depuis qu'un incendie, douze ans auparavant, avait endommagé les lieux. Nous savons que l'antiquaire n'a pas fait une très bonne affaire puisqu'il a cédé la pendule pour 100 dollars...

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